La tristesse et la sécheresse de cœur ou l’appauvrissement de notre joie et de notre douceur spirituelle sont très bienfaisants à l’âme si nous les acceptons et les endurons avec humilité et patience. Si un homme connaissait d’avance ce bienfait, il ne considérerait aucunement cet état comme un fardeau et ne serait pas attristé s’il devait passer par là. Car alors il ne considérerait pas cette absence amère de réconforts spirituels intérieurs comme un signe de désapprobation divine, mais le verrait plutôt comme une œuvre particulière d’amour de Dieu à son égard et ainsi l’accepterait joyeusement comme une grande grâce.
En fait, il peut déjà tirer réconfort du fait que ces états sont principalement vécus par des hommes qui s’abandonnent avec un zèle tout particulier au service ce Dieu et qui sont spécialement attentif à éviter tout ce qui pourrait l’offenser. Ils en font l’expérience non au début de leur conversion à Dieu mais quand ils ont depuis déjà longtemps travaillés à son service, quand leur cœur est bien purifié par la prière sainte et le repentir, quand ils ont ressenti une certaine douceur, chaleur et joie spirituelle qui les poussaient à se consacrer entièrement à Dieu et quand en fait ils se sont déjà engagés pratiquement dans une telle consécration. Nous ne voyons pas des pécheurs où des gens liés aux vanités du monde et de la vie quotidienne avoir de telles expériences ou être sujets à de telles tentations. Ceci montre clairement qu’une telle amertume est un repas honorable et précieux auquel le Seigneur convie ceux qu’Il aime le plus, même si son goût n’est point agréable au manger, il nous apporte néanmoins grand profit, bien qu’au moment même cela n’est pas évident.
Quand l’âme est dans un tel état de sécheresse, quand elle goûte cette amertume et souffre des tentations dont le seul souvenir nous fait trembler, cela empoisonne le cœur et tue presque l’homme intérieur. Mais quand l’âme se trouve dans un tel état, elle apprend à se méfier d’elle-même et à ne pas s’appuyer sur son état favorable et ainsi elle acquiert la véritable humilité que Dieu désir tant que nous ayons. En plus, l’âme en est inspirée du désir d’acquérir un amour des plus ardents pour Dieu, une attention méticuleuse envers ses propres pensées et le plus grand courage pour supporter de telles tentations sans dommage et elle sort de combat « le sens exercé par l’usage au discernement du bien et du mal » Héb. 5 :14) comme le disait St. Paul. Mais comme ces excellents fruits sont cachés à la vue de l’âme, je le répète, elle est troublée et fuit cette amertume car elle ne désire pas être privée, même un court instant, de ses réconforte spirituels et considère tout exercice spirituel qui n’est pas accompagné de tels réconforts comme étant une perte de temps et un labeur inutile.
Lorenzo Scupoli[1]
[1]Lorenzo Scupoli, Combattimento spirituale (1589). Traduit de l’édition anglaise “Unseen Warfare » (1952), pp. 273-274.