Moïse, vêtu d’une tunique courte et les pieds chaussés comme un esclave, se penche sur l’entonnoir d’un moulin, où il déverse le contenu du sac de grain qu’il porte sur son épaule. Saint Paul, pieds nus et en toge de citoyen, tend un autre sac sous la meule pour recueillir la farine. La roue du moulin figure une croix inscrite dans un cercle.
La croix est au centre du chapiteau, dont toutes les lignes suivent la courbe de la roue : le corps des deux personnages, les plis de leurs vêtements, tourbillonnant aux hanches sous le vent de l’Esprit, le sac à demi vide sur l’épaule de Moïse, la barbe de saint Paul, le geste de son bras entraîné par le mouvement de la roue et corrigeant la courbe inverse du visage familier, au front et au menton fuyants, au nez busqué, aux grands yeux à fleur de tête.
Moïse verse le grain tout brut de la Loi ancienne dans le pressoir de la croix. Par sa Passion, le Christ en extrait la pure et fine farine de la Nouvelle Alliance que reçoit l’apôtre, délivré de l’esclavage du péché que la Loi rendait inévitable (Romains 6 : 20 et 7 : 7), libre comme un fils de Dieu et un frère du Christ (Romains 8 : 14-17)
C’est le plus célèbre chapiteau de la basilique de la Madeleine à Vézelay : le moulin mystique.
Michel Zink « Moulin mystique. À propos d’un chapiteau de Vézelay : figures allégoriques dans la prédication et dans l’iconographie romanes » Annales, 1976, XXXI, 3, p. 481.
Vézelay vit naître Théodore de Bèze (1519-1605). Ce chapiteau exprime admirablement sa théologie du salut.