Le 7 décembre 1965, dans son discours de clôture du Concile Vatican II, le pape Paul VI prononça les paroles suivantes devant toute l’Assemblée conciliaire :
« L’Église du Concile, il est vrai, … s’est beaucoup occupée de l’homme, de l’homme tel qu’en réalité il se présente à notre époque, l’homme vivant, l’homme tout entier occupé de soi, l’homme qui se fait non seulement le centre de tout ce qui l’intéresse, mais qui ose se prétendre le principe et la raison dernière de toute réalité…
L’humanisme laïque et profane enfin est apparu dans sa terrible stature et a, en un sens, défié le Concile. La religion du Dieu qui s’est fait homme s’est rencontrée avec la religion (car c’en est une) de l’homme qui se fait Dieu.
Qu’est-il arrivé ? un choc, une lutte, un anathème ? cela pouvait arriver ; mais cela n’a pas eu lieu : La vieille histoire du Samaritain a été le modèle de la spiritualité du Concile. Une sympathie sans bornes l’a envahi tout entier. La découverte des besoins humains – et ils sont d’autant plus grands que le fils de la terre se fait plus grand – à absorbé l’attention de ce Synode.
Reconnaissez-lui au moins ce mérite, Vous, humanistes modernes, qui renoncez à le transcendance des choses suprêmes, et sachez reconnaître notre nouvel humanisme : nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de l’homme[1]. »
L’Abbé Georges de Nantes, qui cite ce texte, le commente bibliquement
« On mesure ici le glissement forcé de votre hétéropraxie à l’hétérodoxie pleine et entière, je ne dis même plus de l’hérésie, mais de l’apostasie. Dans votre bonté, apostolique ! à l’encontre des conseils de prudence et des enseignements infaillibles de tous vos prédécesseurs, vous voulez être le Samaritain évangélique, affectueusement penché sur tout homme, son frère et voilà que ce sentiment d’amour immodéré vous conduit à vous réconcilier avec le Goliath du Monde Moderne, à vous agenouiller devant l’ennemi de Dieu qui vous défie et vous hait. Au lieu de prendre courage et de lutter, comme David, contre l’Adversaire, vous vous déclarez plein d’amour pour lui, vous l’adulez et vous allez bientôt vous ranger à son service exclusif ! Votre charité se fait culte et service de l’Ennemi de Dieu et, pour le flatter, vous allez jusqu’à rivaliser avec lui dans son erreur, dans son blasphème même[2]. »
Nous retrouvons la même analyse lucide chez Maurice Clavel :
« Je prends une formule, tenez ! une formule absolument orthodoxe : « Le religion de Dieu fait homme a rencontré la religion de l’homme fait Dieu »[3]. C’est de 1964, je crois. On a dit : les effets seront extraordinaires : Eh bien, non ! La religion de Dieu fait homme a rencontré celle de l’homme fait Dieu, eh ! bien, pardonnez-moi ma vulgarité, elle s’est fait avoir, pour un peu je dirais, elle s’est fait baiser par la religion de l’homme fait Dieu.
Pourquoi ? Parce que la religion de Dieu fait homme nous impose de mourir à nous-mêmes pour retrouver notre substance et notre nature divines[4], elle est difficile. La religion de l’homme fait Dieu qui consiste à se diviniser narcissiquement et à ne croire qu’en soi, elle est facile. Le difficile est mis en contact avec le facile, et une fois de plus c’est le facile qui l’a emporté et c’est toute l’exigence, toute l’ascèse de la vie spirituelle qui s’est trouvée emportée et dissipée. Et voilà pourquoi, pardonnez-moi de le dire, tant de curés folâtrent, dans des dissipations idéologiques et politiques … »[5]
En commentent un entretien de Maurice Clavel avec un journaliste du journal « La Croix »[6], le père R.-L. Bruckberger écrit de cette fameuse citation « d’un évêque qui a participé au Concile », et qui aurait fait la citation que nous avons déjà citée sur la rencontre de la religion du Dieu fait homme avec celle de l’homme fait dieu[7] :
« Ce que Clavel n’a pas l’air de soupçonner, ce que le journaliste de « Le Croix » s’est bien gardé de lui dire, c’est que cette stupéfiante « déclaration d’un évêque qui a participé au Concile » n’émane pas de n’importe quel fretin épiscopal : elle est de Paul VI lui-même, l’Évêque des évêques, celui qui a présidé le Concile, et cette déclaration a été faite dans le discours de clôture du Concile, le 7 décembre 1965…
Cette déclaration terrifie Maurice Clavel. Eh bien : il a raison et il n’est pas le seul. Est-ce cela qu’on appelle l’esprit et l’orientation du Concile ? Dix ans après ce Concile, il nous est permis de juger l’arbre à ses fruits et le Concile à ses résultats dans l’Église catholique. Clavel le fait sans être le moins du monde gêné aux entournures avec la liberté d’esprit qu’ont les enfants de Dieu – « Elle (l’Église) ne s’est pas rendu compte du danger de la nouvelle culture. Elle s’est dit : aller au monde … Elle n’a pas eu la position suffisamment agressive pour dire : aller au monde pour le casser ! (ça, c’est mai 68). Elle a dit : aller au monde pour sympathiser, l’enrichir et nous enrichir. ELLE ÉTAIT DUPE? »
En d’autres termes, les Pères du Concile ont pris le Saint-Esprit pour un pigeon. Mais c’est eux qui furent les pigeons d’une culture anti-chrétienne qu’ils ne connaissaient pas, dont ils n’ont pas su mesurer le danger, et pour le culte dû au vrai Dieu, et pour le salut de l’homme. Quand on sait à quel point l’éducation ecclésiastique fabrique en série les gogos, qui s’en étonnera[8] ? »
Mais tous les théologiens, Dieu merci, ne sont pas de ces gogos. Le professeur Vittorio Subilia, doyen de la Faculté vaudoise de théologie de Rome, éclaire les racines des problèmes consécutifs à Vatican II dans son remarquable ouvrage « Le nouveau visage du catholicisme. Une appréciation réformée du Concile Vatican II »[9]. Analysant la constitution dogmatique du concile Vatican II sur l’Église, « De Ecclesie », le professeur Subilia écrit :
« … le dogme fondamental du catholicisme dans son incessante évolution historique est le dogme de l’Église – prolongement de l’Incarnation. Nous pourrions dire : le dogme de la conservation de l’Incarnation, de la conservation de Dieu.
Le mystère de l’unité du divin et de l’humain ne se réalise pas seulement en Christ, le Chef. Il continue à se manifester en l’Église qui est son corps dans l’histoire et qui forme avec Lui le totus Christus (le Christ total). Puisque le divin et l’humain appartiennent au Christ, l’Église a compétence sur le divin et sur l’humain .. : Personne ne peut et ne doit échapper à la totalité et à l’unité du totus Christus, grâce à l’addition incessante et l’agrégation constante de tous les éléments, de toutes les valeurs, institutions et collectivités qui sont encore étrangères à la sphère. Cette addition et cette agrégation n’ont ni frontière, ni limite. L’essentiel n’est pas la « pureté » mais la « plénitude » ; on ne craint pas la falsification, on en à vu l’accroissement à l’infini. L’Église toute seule synthèse de catholicité, est juge et critère du bien et du mal, du licite et de l’illicite : la question du vrai et du faux Évangile, l’alternative entre l’obéissance de la foi et l’opposition de l’incrédulité ne se pose plus qu’en termes de soumission plus où moins grande à l’autorité de l’Église[10]. Plus cette soumission se réalise et s’étend, plus le dualisme Église-monde paraît dépassé, plus le péché et l’incrédulité semblent minimisés ou en voie d’épuisement et plus l’ombre de la croix paraît lointaine : ce qui importe est l’harmonie, la concorde, la pacification universelle débarrassée de problèmes, de « discussions stériles » ou de « scission regrettables » (Ecclesiam suam I). C’est cette « Pacem in terris » (Jean. XXIII) en laquelle Calvin suivant la trace de l’Évangile (Jérémie 10 :14 Mathieu 10 :34 !) voyait une conséquence du silence de la Parole de Dieu et une marque de la domination des « doctrines mensongères » qui « sont vécues volontairement de tous et viennent à gré à tout le monde » (Épître, Institution Chrétienne)…
Le dogme que nous avons défini comme dogme central du catholicisme & été l’objet d’expressions successives dans l’histoire. Exemples : le quatrième Concile de Latran (1215) où, contre les Vaudois, l’Église de Rome a revendiqué la compétence exclusive et l’autorité de prêcher pour ses représentants autorisés et où elle a décrété que la présence du Seigneur est contenue (continetur) dans les éléments du pain et du vin en vertu de l’onction sacramentelle du prêtre ; la bulle Unam sanctam (1302) qui affirme que l’Église catholique représente l’unique corps mystique et que la soumission à la non humane, sed potius divina potestas (non humaine mais supérieure et divine puissance) de la tête – le Pontife romain – est la condition du salut : ceux qui comme les Grecs, refusent de se soumettre à lui, confessant par lui-même qu’ils ne font pas partie du troupeau du Christ parce qu’il y a un seul troupeau et un seul pasteur ; le concile de Trente (1545-1562), qui, contre la Réforme, à décrété la nécessité de la médiation et de l’autorité de l’Église pour juger de l’interprétation et du vrai sens des Écritures, pour remettre ou retenir les péchés par les sentences sans appel de ses prêtres, vicarii (vicaires) de Christ, en vertu du pouvoir des chefs : le Concile Vatican I (1870) qui a proclamé l’Église custos et magistra verbi revelati (gardienne et maîtresse enseignante du verbe révélé), a déclaré le Pape verum Christi vicarium totisque Écclesise ceput et omnium christianarum patrem ac doctorem (véritable vicaire du Christ et chef de toute l’Église, père et docteur de tous les chrétiens) en possession de la pleine potestas (pouvoir) de juridiction sur l’Église universelle et porteur de l’infaillibilité du magistère.
Le Concile Vatican II de 1962-1965 est la suite logique de cette ligne dogmatique qui ne connaît pas de solution de continuité et dont chaque étape successive est une amplification et un complément de la précédente. Dans ce crescendo de complexité et de gravité, la Constitution dogmatique De Ecclesia représente un moment de synthèse où l’Église catholique, consciente de son évolution séculaire, a voulu s’arrêter, prendre conscience d’elle-même, se contempler, en une attitude de narcissisme ecclésiastique sans précédent dans l’histoire. Les formulations précédentes du dogme ecclésiologique, y compris celle de 1870 qui avait soulevé l’indignation de la société religieuse et laïque de l’époque, avaient en effet porté sur quelques aspects particuliers. La Constitution de 1964 étend à toute l’Église – du Pape au laïcat en passant par l’épiscopat – la fonction, l’autorité de représenter et d’incarner le Seigneur avec la pleine faculté d’être la vicaria Christi (remplaçante du Christ) qui reproduit « l’image du Christ selon sa substantielle structure divino-humaine… »[11]
Les actes du Concile Vatican II de 1964 sont le document d’un Chalcédoine ecclésiologique auquel les théologiens de l’avenir devront, selon toute probabilité, se référer comme nous nous référons au Chalcédoine christologique de 451. L’exaltation de l’Église y atteint une ampleur inconnue jusqu’à présent…
La question qui se pose – d’une gravité qu’on ne peut pas trouver exagérée est de savoir si nous ne sommes pas en face d’une modification, apparemment imperceptible mais en réalité irrémédiable, de l’antique formule de la confession de foi chrétienne. Il semble que la formule credo sanctam Ecclesiam catholicam (je crois la sainte Église catholique) soit désormais remplacée par celle-ci : credo in sanctam Ecclesiam catholicam (je crois en la sainte Église catholique). Ceci n’est ni une exagération ni une erreur. C’est une conséquence éminemment logique qui a été tirée, et qui ne pouvait pas ne pas l’être, des prémisses placées à la base de tout le système catholique : l’Église comme continuation de l’Incarnation, comme Christus praesens (Christ visible). Durant tout le Moyen-Age on n’en était pas arrivé là. Wessel Gaus-fort, Magister contradictianum (maître en controverse) – environ 1420-1489 – déclarait : « Confiteor ergo in hac fidei regula debere me pendere ex ecclesiae autoritate, cum qua credo, non in quam… cum ecclesia sancta credo, non in ecclesiam, quia credere actus latriae est, virtutis theologicæe sacrificium, soli Deo offerendum. » (Je confesse donc devoir m’attacher à cette règle de foi de par l’autorité de l’Église, avec laquelle je crois, et non en laquelle je crois… je crois avec la sainte Église, et non en l’Église, parce que croire est un acte d’adoration, un sacrifice de vertu théologale qui doit être offert uniquement à Dieu)[12].
Même à l’époque du Concile de Trente, le catholicisme hésitait encore à franchir ce pas. Le catéchisme publié sur l’ordre de Pie V, exposant le neuvième article du symbole des Apôtres, prend soin de préciser : « Nous confessons que nous croyons la sainte Église et non en la sainte Église, afin que par cette façon différente de parler, on voie bien la distinction qui existe entre Dieu et les choses qui ont été créées par Lui. »
Aujourd’hui, il semble que l’hésitation ait disparu. Paul VI, dans l’encyclique Ecclesiam suam, a cité Saint-Augustin : « Nous sommes devenus le Christ. Si, en effet, il est devenu la tête, nous sommes les membres ; un seul homme (l’homme total), Lui et nous… La plénitude du Christ par conséquent, la tête et les membres. Qu’est-ce que la Tête et les membres ? Le Christ et l’Église. »
Il a cité également l’encyclique Mystici corporis, de Jean XXIII, selon laquelle « Nous devons nous habituer à voir dans l’Église le Christ lui-même[13]. »
Et la conséquence d’une pareille hybris, d’un pareil orgueil ecclésiastique ; orgueil où l’Église, c’est-à-dire des créatures, se prend pour Jésus-Christ, Dieu lui-même ?
Le 7 février 1971 voici l’hymne à la gloire de l’homme qu’entonna Paul VI en honneur d’un voyage de la terre à la lune :
« Honneur à l’Homme ;
Honneur à la pensée ; honneur à la science ;
Honneur à la technique ; honneur au travail ;
Honneur à la hardiesse humaine ;
Honneur à la synthèse de l’activité scientifique et du sens de l’organisation de l’homme qui, à la différence des autres animaux, sait donner à son esprit et à son habileté manuelle des instruments de conquêtes :
HONNEUR À L’HOMME ROI DE LA TERRE ET AUJOURD’HUI PRINCE DU CIEL. Honneur à l’être vivant que nous sommes, dans lequel se reflète l’image de Dieu et qui, en dominant les choses, obéit à l’ordre biblique : croissez et dominez. » (Documentation catholique 1971, 156)
Le pasteur américain Guy Duty relève la même apostasie chez le pape Paul VI quand il évoque son discours devant les Nations Unies :
« Au moment où les hommes diront : Paix et sûreté : c’est alors qu’une ruine « soudaine les surprendra… et ils n’échapperont point » (I Thessaloniciens 5 :3). La « paix et la prospérité »est le texte d’or d’une théologie trompeuse. Enseigner que la paix peut venir à un monde qui rejette le Christ n’est rien d’autre qu’un mensonge. Jésus à dit qu’il n’était pas venu apporter la paix. Alors comment son église peut-elle le promouvoir ? Ce plan de paix est contraire à la Parole révélée de Dieu ; elle s’oppose aux prophéties concernant la fin…
Le pape Paul dans l’été de 1965 vint à New York et fit un discours en faveur de la paix mondiale devant les Nations Unies. Son message était axé sur deux points : la paix et la prospérité… L’appel du pape fut acclamé par de moins de 107 nations et les religions principales donnèrent des promesses de coopération. Immédiatement après le discours du Pape, un évêque Catholique Romain éminent a lu une déclaration à la presse affirmant que le but de l’Église Catholique Romaine était d’amener les différentes religions du monde dans une bergerie – L’Église unique.[14] »
Voici ce qu’affirmait le pape Paul VI devant L’ONU :
« Les peuples se tournent vers les Nations-Unies comme vers l’ultime espoir de la concorde et de la paix. Nous osons apporter ici, avec le Nôtre, leur tribut d’honneur et d’espérance…
Ici s’instaure un système de solidarité, qui fait que de hautes finalités dans l’ordre de la civilisation reçoivent l’unanimité des peuples, pour le bien de tous et de chacun.
C’est ce qu’il y a de plus beau dans l’organisation des Nations-Unies, c’est son visage humain le plus authentique. C’est l’idéal dont rêve 1’humanité. dans son pèlerinage à travers le temps ; c’est le plus grand espoir du monde. Nous osons dire : c’est le reflet du dessein de Dieu – dessein transcendant et plein d’amour – pour le progrès de la société humaine sur la terre, reflet où Nous voyons le message évangélique, de céleste, se faire terrestre. » (Discours pp. 323-330)
Face à pareille démagogie, qui, dans le bouche d’un chef chrétien, ne peut être que le signe de l’apostasie car il a remplacé l’espoir en Dieu, en Christ, le seul par lequel l’homme peut être sauvé, par l’espoir en l’homme, par l’espoir en l’organisation mondiale des hommes, que doit être donc l’attitude du chrétien fidèle ? Doit-elle être celle d’un Dr. Karl Barth demandant audience auprès du suprême pontife et se faisant précéder par un huissier portant l’édition de luxe de sa Dogmatique[15]? Doit-elle être celle d’un David du Plessis se vantant urbi et orbi d’avoir l’approbation charismatique d’un pareil pontifex maximus ? Doit-elle être celle d’une Kathryn Kuhlmann recevant bénédiction de pareilles mains ?
Le problème que pose le pape Paul VI aux milieux protestants et évangéliques est en effet assez délicat. C’est celui de la néo-orthodoxie barthienne qui utilise le langage évangélique détaché du contenu conceptuel spécifique de la Bible pour séduire des chrétiens moralement et doctrinalement mal affermis. C’est ce qui se passe avec Paul VI. En général ses discours ne manifestent pas si ouvertement que les textes que nous avons cités son apostasie humaniste mais témoignent plutôt de son refus d’utiliser le langage traditionnel de la pensée catholique romaine. Ce langage, dans l’optique œcuménique de Paul VI, avait le tort fondamental de hérisser protestants et évangéliques. Paul VI, à la suite de Jean XXIII, a remplacé les formulations essentiellement thomistes du magistère romain traditionnel par un vague langage bibliciste et évangélique d’où le contenu conceptuel des Saintes Écritures est absent. Comme nous l’avons montré, ce masque évangélique cache le plus terrible des humanismes. Par contre ce-que nous trouvons chez Mgr. Lefebvre et chez de nombreux catholiques qui suivent le magistère traditionnel de l’Église romaine, c’est des formulations doctrinales archi-catholiques – qui hérissent violemment beaucoup de protestants et d’évangéliques – mais qui ont le bonheur d’avoir, en dépit des déviations romaines évidentes, un contenu conceptuel bien plus véritablement biblique que ce que l’on trouve chez Paul VI et chez les modernistes biblicistes romains. Le pseudo-évangélisme, le pseudo-biblicisme catholique, par son irrationalisme critique[16] et par son incapacité de formulation doctrinale précise, est beaucoup plus éloigné de la foi chrétienne véritable que ne l’est le traditionalisme conceptuellement rigide et apparemment de Mgr. Lefèvre.
En 1950, sous le pontificat tout à fait traditionnel de Pie XII, le pasteur A. Antomarchi, dans une des critiques protestantes les plus fortes du catholicisme romain, écrivait ces lignes qui nous font comprendre pourquoi les traditionalistes catholiques à l’heure actuelle sont les véritables défenseurs de la foi chrétienne dans l’Église romaine.
« En terminant, rendons à l’Église romaine[17] cette justice : son histoire sans doute, est entachée d’erreurs, d’abus, de crimes, mais qui oserait dire qu’elle n’est faite que de cela ? Cette Église a tout de même maintenu, à travers les siècles, les dogmes principaux de la foi : Divinité du Christ, Trinité, Sacrifice expiatoire de la Croix. Que ces dogmes elle les ait paganisés, judaïsés, par des inventions, de funestes pratiques, cela vient d’être démontré. Mais ils ne subsistent pas moins dans ses catéchismes[18]. Rome a interdit la lecture de la Bible. C’est certain. Mais elle à inlassablement copié celle-ci au travers du Moyen-Age, et c’est dans cette Église que les Réformateurs l’ont trouvée. Quel mérite Rome a-t-elle en tout cela ? C’est à Dieu qu’il appartient de juger.
Il faut donc loyalement reconnaître qu’à côté de nombreux et mortels mensonges, il y a dans cette Église des éléments de vérité conservés, ce qui explique, ce qui rend possible, naturelle, la présence dans son giron de chrétiens d’une incontestable piété[19]. »
Ces « éléments de vérité » ne sont malheureusement plus conservés par l’enseignement moderniste, qu’il soit franchement libéral ou qu’il se revête de sa forme néo-orthodoxe pour mieux séduire. Il est fort curieux que ce soit ces modernistes qui en fait sont conséquents avec l’enseignement traditionnel de l’Église romaine sur la discipline ecclésiastique (l’appareil de l’Église étant entre leurs mains), tandis que les catholiques traditionalistes, par fidélité au symbole de Nicée et au Concile de Trente, sont obligés d’être inconséquents avec l’enseignement romain traditionnel sur l’Église et se discipline afin de demeurer croyants malgré la « discipline » et malgré « la seule Église » !
Mais pour toucher à une question bien plus difficile, quelle doit donc être l’attitude du catholique fidèle au Christ, face aux exigences de soumission et d’obéissance absolue réclamées par un suprême pontife pareil ? Car l’exemple typique de cette exigence d’obéissance inconditionnelle que nous retrouvons dans tous les régimes totalitaires est celle traditionnellement exigée de ses clercs et de ses fidèles par l’Église catholique romaine[20]. C’est cette obéissance inconditionnelle que le pape Paul VI réclame de Mgr. Lefebvre et du Séminaire traditionaliste d’Ecône fondé par lui, et eu travers d’eux de tout catholique. Pour le chrétien le pouvoir suprême est Dieu et sa Parole divinement inspirée, révélatrice de la pensée même de Dieu, et en conséquence INFAILLIBLE, l’Écriture Sainte, Pour le catholique romain conséquent, le pouvoir suprême est Dieu qui s’est en premier lieu révélé à l’Église romaine (la seule Église) et à laquelle il a délégué un pouvoir infailliblement la révélation écrite la Bible.
Pour le chrétien fidèle, l’Église faillible (voyez Apocalypse II et III) est soumise à l’Écriture infaillible. Pour le catholique romain conséquent, l’Église infaillible interprète l’Écriture, est au-dessus de l’Écriture. En fin de compte, cela veut dire que l’Église romaine se place au-dessus de Dieu. C’est ce qui ressort de ces remarques du professeur Subilisa :
« La possibilité d’une tension quelconque entre l’obéissance due à Dieu et celle qui est due à ses représentants officiels n’est même pas envisagée. Par leur profession d’obéissance, les religieux font “l’offrande totale de leur propre volonté… à l’exemple du Christ qui est venu faire la volonté au Père… sous le motion du Saint-Esprit (ils) se soumettent dans la foi à leurs supérieurs, représentants de Dieu.[21] »
C’est cette exigence de soumission totale à l’Église qui provoque le conflit tragique (mais à la longue salutaire, car poussant à l’inconséquence !) entre la hiérarchie de l’Église en place et les chrétiens traditionnels dans l’Église romaine qui résistent aux innovations modernistes et anti-chrétiennes promulguées officiellement depuis Vatican II. L’Église romaine, comme le Sanhédrin du temps de la première Église, s’approprie le pouvoir infaillible de Dieu et les catholiques fidèles (et ils sont loin d’être les seuls !) devront apprendre à obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, et à chercher la volonté de Dieu, non plus premièrement dans une Église et dans une tradition maintenant manifestement faussée, mais dans l’infaillible révélation, l’Écriture Sainte[22].
Face à cette exigence, de plus en plus inadmissible, qui réclame d’eux qu’ils se soumettent à un enseignement manifestement anti-chrétien, nous louons Dieu de la résistance de ces catholiques romains traditionnels qui, par fidélité à Jésus-Christ, acceptent de ne pas être conséquents avec l’enseignement traditionnel d’obéissance absolue due au « successeur de Pierre » et à une hiérarchie largement dévoyée[23]. Nous nous réjouissons de cette réaction salutaire de Mgr. François Ducaud-Bourget à la suspension « a divinis » de Mgr. Marcel Lefebvre :
« L’Église aujourd’hui (l’officielle), qui se veut œcuménique, accepte toutes les religions, toutes les sectes au nom de la liberté de conscience, de pensée et de culte (exactement comme le fait la franc-maçonnerie). Mais, comme elle, elle excepte de cette compréhension (d’ailleurs hérétique) les Catholiques de la Tradition[24] : ce qui prouve bien qu’ils sont, eux, la véritable Église. Remarquons aussi que le premier article de la maçonnerie est : « La maçonnerie est une société qui cherche la Vérité[25]… », ce que la nouvelle église s’empresse de faire… en inventant le désordre actuel.
Donc, tous les hommes doivent être libres de croire ce qu’ils veulent, de pratiquer leur religion (cf. Helsinki), sauf le catholique romain. Il n’est qu’un seul droit : OBÉIR, contre l’évidence du mal, OBÉIR au mépris de ses engagements passés, de sa parole donnée, de ses serments (le serment anti-moderniste, par exemple).
On finit, devant ces monstruosités, par comprendre la pensée du « petit père Combe »[26] qui déclarait immoral le vœu désobéissance ! »[27]
Ces paroles qui, dans une bouche progressiste, ne serait que le pire conformisme à l’esprit contestataire du siècle, ont dans la bouche d’un catholique traditionnel un accent héroïque. C’est la persécution ecclésiastique dans l’attente de le véritable persécution qui ne peut qu’être la seule conséquence d’un tel combat avec les puissances des ténèbres. Encore plus réjouissante pour la véritable Église est la déclaration récente du comité international de laïcs catholiques traditionnels formé récemment pour défendre publiquement Mgr. Marcel Lefebvre et son séminaire d’Ecône contre les attaques dont ils sont l’objet de toutes parts. Voici extraits du compte rendu de la première déclaration de ce comité qui a paru dans le journal « 24 Heures » :
« L’autorité qui s’exerce en dehors de la fin pour laquelle elle à été instituée est tyrannique et ne doit pas être obéie, poursuit le comité. L’obéissance inconditionnelle n’est pas catholique. L’autorité comme loi cesse par cessation de fin. Le tradition catholique juge même son Pontife, lorsqu’il trahit la foi de l’Église, alors que sa mission est de « garder le dépôt »… les actes du présent pontificat aboutissent à une nouvelle conception religieuse « ressemblant aux visées maçonniques exposées depuis un siècle par les grands maîtres de la loge en vue de créer une sorte de super-Église, adaptable à tous les sentiments religieux, une religion protestantisée au-delà du protestantisme, dont les protestants eux-mêmes ne veulent pas… »[28]
En conclusion, le comité déclare refuser la « papolâtrie », dont on abuse auprès de l’opinion publique catholique. L’histoire nous enseigne que les papes sont soumis, comme tous les humains, à l’épreuve humaine, et qu’ils peuvent faillir dans leur vie privée et dans leur vie publique : « On reconnaît les mauvais arbres à leurs fruits. »[29]
Et le père R.-L. Bruckberger d’écrire dans sa chronique de l’Aurore à ce propos :
« Le chef suprême de notre Église n’est nul autre que Jésus-Christ. Le pape, quel qu’il soit, en est le vicaire, successeur de Pierre. Le pape n’est pas le Christ, il ne peut pas changer l’Évangile. Il sera lui-même jugé par celui dont il est le vicaire. »[30]
Mais que reproche donc Mgr. Lefebvre au pape Paul VI ? Quelle est donc l’accusation que portent les traditionalistes catholiques face au Concile Vatican II ? S’agit-il uniquement de soutanes, de latin, de chant grégorien et de rites liturgiques ? Si cela était le cas, la portée de cette confrontation ne dépasserait pas l’Église romaine elle-même. Mais s’il s’agissait en fait de défendre la foi chrétienne elle-même en grave péril ? Alors tous seraient concernés, catholiques romains et non-romains, chrétiens et non-chrétiens, car il s’agirait du dépôt de la foi, donc de la lumière du monde, de la saveur du sel de la terre. La lecture de d’homélie prononcée par Mgr. Lefebvre à Lille le dimanche 29 août 1976 nous donne le certitude qu’ici il s’agit d’une œuvre de Dieu, suscitée par Dieu, pour défendre la foi chrétienne contre ceux qui veulent le détruire. Voici des extraits de cette homélie :
« Il me faut retourner aux raisons qui me font prendre une attitude extrêmement grave, je le reconnais. Pour un évêque, s’opposer aux autorités de l’Église, être suspendu sont des choses graves et pénibles.
Il faut pour les supporter avoir des raisons. Et ces raisons, c’est la volonté de défendre notre foi.
Les autorités qui se trouvent à Rome mettraient-elles notre Foi en péril ? Nous devons juger sur des faits. Nous reconnaissons l’arbre à ses fruits.
Eh bien les fruits du Concile Vatican II et des réformes post-conciliaires sont des fruits amers, des fruits qui détruisent l’Église.
Ceux qui ont fait les réformes les ont faites au nom du Concile. Or que s’est-il passé pendant le Concile ?
Nous pouvons le savoir facilement en lisant les livres de ceux qui, précisément, ont été les instruments de ce changement dans l’Église.
Lisez, par exemple, le livre du sénateur du Doubs, M. Prelot, « Le catholicisme libéral » écrit en 1969. Il nous dit ce qu’est le Concile, il le dit dès les premières pages : « Nous avons lutté pendant un siècle et demi pour faire prévaloir nos opinions à l’intérieur de l’Église et nous n’y avions pas réussi. Enfin, est venu Vatican II et nous avons triomphé. Désormais, les thèses du catholicisme libéral sont définitivement et officiellement acceptées par la Sainte Église. »
Vous croyez que ce n’est pas un témoignage, ça ? Ce n’est pas moi qui le die, mais lui ! Il le dit en se félicitant, en triomphant.
Nous, nous le disons en pleurant. Car qu’ont voulu les catholiques libéraux pendant un siècle et demi ?
Ils ont voulu marier l’Église et la Révolution. Marier l’Église et la subversion.
Ce mariage de l’Église, il est inscrit dans le Concile. Prenez le schéma Gaudium et Spes et vous y trouverez : « il faut marier les principes de l’Église avec les conceptions de l’homme moderne ». Qu’est-ce que ça veut dire ça ? £a veut dire qu’il faut marier l’Église, l’Église catholique, l’Église de notre Seigneur Jésus-Christ, avec des principes qui sont contraires à cette Église, qui ont toujours été contre l’Église. Les papes n’ont jamais pu accepter des chose semblables et au nom de cette Révolution, des prêtres sont montés sur l’échafaud, des religieuses ont été persécutées et assassinées. Voici ce qu’a fait la Révolution !
Eh bien, je vous dis mes frères, ce qu’a fait la Révolution, ce n’est rien à côté de ce qu’a fait le Concile Vatican II, rien !…[31]
On ne veut plus faire des martyrs. Ça à été le summum de la victoire du démon de détruire l’Église par l’obéissance…
Cette union adultère de l’Église et de la Révolution, elle se concrétise par le dialogue. L’Église, si elle doit dialoguer, c’est pour convertir. L’erreur et la vérité ne sont pas compatibles ; on doit chercher si on a la charité pour les autres. Ceux qui ont la charité doivent donner Notre Seigneur, doivent donner la richesse qu’ils ont aux autres. Et non pas dialoguer avec eux sur un pied d’égalité. La vérité et l’erreur ne sont pas sur un pied d’égalité. Ce serait mettre Dieu et le Diable sur un même pied. Puisque le Diable est le père du mensonge, le père de l’erreur.
Nous devons par conséquent être missionnaires. Nous devons prêcher l’Évangile, convertir les incroyants et non pas dialoguer avec eux, en essayant de prendre leurs racines. C’est ce qui nous à amené cette messe bâtarde et ces rites bâtards.
On va maintenant dialoguer avec les francs-maçons. Non seulement dialoguer avec eux, mais permettre aux catholiques de faire partie de le franc-maçonnerie[32]. C’est encore un dialogue abominable. Nous savons parfaitement que les personnes qui dirigent la franc-maçonnerie, au moins les responsables, sont foncièrement contre Notre Seigneur Jésus-Christ…
On ne dialogue pas avec le Diable. On ne dialogue pas avec les communistes. On ne dialogue pas avec l’erreur…
La vérité n’appartient pas plus au pape qu’à moi. Nous sommes l’un et l’autre ses serviteurs. Le vérité, ce n’est ni moi, ni le pape : c’est notre Seigneur Jésus-Christ.
Il faut -donc nous reporter à ce que Notre Seigneur Jésus-Christ nous à enseigné pour savoir où est la vérité. Ce n’est pas moi qui juge le Saint-Père, c’est la tradition[33]. »
Que de Vérité exprimée ici en cette heure dangereuse et confuse : Que de Vérité qui devrait être entendue par ceux qui se perdent parce que l’Église, les chrétiens n’émettent plus qu’un son confus, contradictoire, incompréhensible, absurde. Bien sûr que pour nous c’est l’Écriture Sainte qui juge l’Église et non la tradition de l’Église qui se fait juge et partie du même procès. Mais nous ne pouvons que le constater : tant de vérités en si peu de mots ne peuvent être que l’effet de la grâce de Dieu. Et constatons-le aussi, quel chemin fait par Mgr. Lefebvre vers. la doctrine scripturaire du Sola Scriptura, du Soli deo gloria des réformateurs. Mais par ailleurs, combien ne devons-nous pas constater avec repentance notre ignorance, notre inconscience, notre coupable négligence, même peut-être notre coupable collaboration évangélique et réformée avec ces puissances destructrices de la foi chrétienne, de l’obéissance à la loi de Dieu.
Sur la question politique, Mgr. Lefebvre eut ces paroles exemplaires à Bezençon le dimanche 5 septembre 1976
« On nous dit : « Vous faites de la politique ». Je réponds : si parier de Jésus-Christ est faire de la politique, alors oui, nous en faisons, car nous voulons trouver des hommes qui croient en Dieu et des gouvernants qui se soumettent à la loi divine. Car la civilisation occidentale n’est pas meilleure que les autres dès lors que ceux qui ont reçu le message ne donnent plus l’exemple parce qu’ils ont perdu le sens du christianisme. Ce n’est plus la loi de Jésus-Christ qui est observée et nous en sommes horrifiés…
Les communistes disent que la religion est une aliénation. C’est vrai en ce sens que nous nous donnons tout entier à Dieu et nous pouvons leur répondre qu’eux-mêmes se sont aliénés à un parti et à des hommes. Mais le peuple ne doit recevoir sa loi que de Dieu[34]. »
De toute l’histoire difficile et complexe du conflit de Mgr. Lefebvre avec la hiérarchie catholique romaine, et plus particulièrement avec le Vatican et le pape Paul VI lui-même, nous retiendrons simplement l’illégalité et l’injustice des procédés dont use le pouvoir romain à l’égard de Mgr. Lefebvre et du séminaire Saint Pie X[35]. Nous signalerons simplement que contrairement à ce qui si passe pour le théologien moderniste suisse, Hans Küng, Mgr. Lefebvre à été condamné sans procès, sans avoir même été entendu, ce qui est entièrement contraire eu droit canon. Même Martin Luther au XVIe siècle fut traité moins illégalement. Il put au moins se faire publiquement entendre devant ses accusateurs avant d’être condamné et excommunié. Les remarques suivantes de Mgr. Lefebvre nous paraissent une appréciation parfaitement correcte et modérée de cet aspect du conflit avec le pouvoir dans l’Église catholique romaine :
« autant les libéraux ont les bras ouvert vers la gauche, vers tous ceux qui acceptent toutes les libertés, autant ils sont franchement opposés et durs avec tous ceux de droite qui, eux, ne veulent pas de toutes les libertés, justement, et qui estiment qu’il doit y avoir une discipline, une loi, une vérité et une morale. Avec ceux-là ils sont terriblement durs, et ils l’ont été tout au cours de l’histoire.
C’est pourquoi je ne suis pas surpris de cette dureté avec laquelle nous sommes traités. Une dureté à mon sens inimaginable, inouïe, parce que nous n’avons eu aucun procès ; on a condamné sans procès ; nous sommes condamnés sans pouvoir nous défendre ; nous avons fait un recours qui a été cassé. J’ai demandé à être reçu par mon juge, le pape ; je ne peux pas être reçu ! Je demande dans mon avant-dernière lettre qu’on nomme deux cardinaux ou un cardinal comme interlocuteurs pour qu’on puisse dialoguer, essayer de retrouver une union, une unité, on n’a fait aucun cas de ma demande ! C’est absolument tyrannique et arbitraire, la manière dont nous sommes traités, C’est pourquoi, d’ailleurs, je ne tiens aucun compte de cette suspension, de toutes ces peines qui nous sont infligées. L’autorité a agi d’une manière absolument contraire à tous droits, à toute la tradition de l’Église[36]. »
De tels procédés illégitimes et injustes nous font penser (toutes proportions gardées) aux paroles ce l’Évangile selon saint Jean relative aux procédés iniques et illégitimes utilisés par les chefs des prêtres et les pharisiens contre notre Seigneur Jésus-Christ :
« Les agents retournèrent donc vers les chefs des prêtres et les pharisiens ; et ceux-ci leur dirent : « Pourquoi ne l’avez-vous pas amené ? » Les agents répondirent : « Jamais homme n’a parlé comme cet homme ! » Les pharisiens leur dirent : « Avez-vous été séduits, vous aussi ? Y-a-t-il un seul des chefs et des pharisiens qui ait cru en lui ? Mais cette populace, qui ne connaît est exécrable ! » Nicodème, l’un d’entre eux, celui qui était allé une fois trouver Jésus, leur dit : « Notre loi juge-t-elle un homme sans qu’on l’ait entendu d’abord, et sans qu’on ait pris connaissance de ce qu’il qu’il a fait ? » Ils lui répondirent : « Es-tu Galiléen, toi aussi ? Informe-toi, et tu verras qu’il ne sort pas de prophète de la Galilée. » Chacun se retira dans sa maison. » Jean 7 : 45-53
Voici la justice ecclésiastique dévoyée de tous les temps.
Prions pour que notre Dieu trois fois saint, qui Lui connaît et fera reconnaître les siens, donne à ces catholiques traditionalistes persécutés par leur Église la force d’obéir intégralement au Christ et à sa Parole. Et apprenons de leur combat contre le monde que la vie chrétienne est un combat à livrer sans cesse avec la force victorieuse de Jésus-Christ contre le mal et le mensonge. Dans une lettre circulaire datée du 1er mai 1976, le pasteur réformé Rousas John Rushdoony (directeur de l’institut de recherche chrétiennes Chalcedon à Vallecito en Californie) exhorte les chrétiens à livrer ce combat :
« Il est manifeste qu’un combat se prépare dans notre pays entre le Christianisme et l’Humanisme. Il est également clair que l’Humanisme s’apprête à détruire le Christianisme et à persécuter les chrétiens. (Dans l’état d’Ohio des parents chrétiens dont les enfants se trouvent dans un groupe d’écoles chrétiennes sont sous la menace de l’enlèvement de leurs enfants. Ils sont accusés d’être des parents indignes en conséquence de leur prise de position chrétienne).
Détrompez-vous : une bataille est devant nous. Elle sera dure, laide et intense. Pour finir nous triompherons mais pas avant que nous ne devenions aptes à combattre[37]. »
Ce qui est vrai pour les États-Unis, ce qui l’a été depuis maintenant plus de cinquante ans pour les pays sous domination communiste, le devient de plus en plus pour les chrétiens du monde entier. Quand donc les chrétiens se réveilleront-ils de leur torpeur intellectuelle et morale et comprendront-ils que nous sommes à l’heure où les ténèbres viennent sur toute la terre et qu’il nous faut COMBATTRE ? Il faut que les chrétiens apprennent à lutter avec les armes de Dieu contre les puissances du Malin, s’attendent avec foi que Jésus-Christ lui-même manifeste sa victoire parfaite à la croix au travers de leurs combats.
Jean-Marc Berthoud
[1]Discours de Paul VI pp. 247-248. Souligné par nous (réd.)
[2]Abbé Georges de Nantes : Liber Accusationis in Paulum Sex. pp. 19-20. Ce texte, indispensable à la compréhension du combat chrétien que nous vivons.Voyez aussi de Jean MADIRAN : Réclamation au Saint-Père. Paris (N.E.L.) 1974 et son Hérésie du XX siècle. Paris (N.E.L.) 1966. Nous recommandons tout particulièrement l’étude fondamentale du père N. BARBARA : La crise et Paul VI parue dans les Nos 45, 46, 47 de la revue Forts dans la Foi.
[3]Paul VI à la clôture du Concile le 7 décembre 1965.
[4]Ce n’est pas notre substance et notre nature que nous retrouvons, mais, par la nouvelle naissance, la nature de Dieu (II Pierre l : 4) (Réd.)
[5]Débat télévisé du 16 mai 1976 sur le livre de M. CLAVEL Dieu est Dieu…! Grasset, (Paris), 1976.
[6]Du 11 juin 1976
[7]vid. citation complète page 4 (cf. note 11)
[8]R.-L. BRUCKBERGER : Les pigeons et le Saint-Esprit in L’Aurore du 15 juillet 1976.
[9]Labor et Fides (Genève) 1968.
[10]Nous soulignons (réd.)
[11]F. HOLBOECK : Das Mysterium der Kirche in dogmatischer Sicht (Salzburg) 1962. p. 232 ,Une telle « divinisation » de l’Église actuelle n’a pas suscité d’indignation dans le monde laïc car elle rejoignait parfaitement la tendance du monde laïc de se diviniser lui-même dans le culte de l’homme ou humanisme (réd.).
[12]Farrago revum theologicarum uberrima (Bâle) 1522 f. 111 R.
[13]Vittorio SUBILIA : Le nouveau visage du catholicisme. Une appréciation réformée du Concile Vatican II (Genève Labor et Fides 1968. pp. 82-91. Nous recommandons aussi très vivement pour l’intelligence de cette question la lecture de l’ouvrage de Vittorio SUBILIA : Le problème du catholicisme (Paris) Les Bergers et les Mages 1964.
[14]Guy DUTY : Christ’s Coming and the World Church (Bethany Fellowship) Minneapolis, 1971. p 130.
[15]Le fait que Paul VI ait si longtemps refusé audience à Mgr. Lefebvre ne serait-il pas un signe en faveur de ce dernier ? L’impureté peut-elle s’associer à ce qui est pur ? (II Corinthiens 6 : 14-18) (réd.)
[16]La critique biblique moderne manifeste un illogisme et un irrationalisme tout-à-fait extravagant.
[17]i.e. traditionnelle – 1950 (réd.)
[18]évidemment les ANCIENS catéchismes (réd.)
[19]A. ANTOMARCHI : Rome face à l’Évangile (Paris) 1950. p 201.
[20]Notons le serment d’obéissance prêté par le jésuite : d’obéir à ses supérieurs, au général de son ordre et au pape « exactement comme un cadavre », perinde ac cadaver.
[21]V. SUBILIA : Le nouveau visage du catholicisme p. 138. citation de : De accomodata de renovatione vitae religiosae par. 14 (D.C. 1459).
[22]La question de la lecture correcte du texte sacré est une autre question. Mais nous pouvons déjà affirmer que si l’on ne peut laisser l’individu seul maître de la lecture de la Bible – ce qui serait faire de chaque individu son propre pape – il n’est pas possible non plus d’abandonner ce problème entre les mains d’une quelconque Église, car les églises peuvent devenir entièrement infidèles, et n’étant pas le Christ, ni un prolongement infaillible du Christ, elles demeurent toujours faillibles et pécheresses, ayant toujours besoins du sang purificateur du Sauveur, Jésus-Christ.
[23]Le fait qu’actuellement ce sont les éléments progressistes qui défendent l’infaillibilité du pape et l’autorité de la hiérarchie établie serait assez cocasse, si ce n’était pas le signe que les forces révolutionnaires se sont saisies du pouvoir dans l’Église et l’utilisent pour leurs fins. La tyrannie religieuse s’alliant à la tyrannie politique produira une Inquisition telle que le monde n’en a jamais vu.
[24]L’Humanisme universellement tolérant rejette tout Christianisme véritable. Pierre COURTHIAL le montre fort bien dans ces lignes que nous tirons de son article Actualité de Chalcédoine publié dans le No l (Janvier-février 1976) de la revue Foi et Vie consacrée à la Faculté de Théologie Réformée d’Aix-en-Provence.
« Toutes les formes diverses de l’humanisme (je désigne par ce terme la religion de l’Homme, avec son idée de salut de l’homme par l’homme) sont disposées, dans leur refus, leur rejet, leur négation, du Dieu Créateur et Sauveur dont parle l’Écriture Sainte et qui parle par l’Écriture Sainte qu’Il a inspirée, à absolutiser n’importe quel relatif, à diviniser n’importe quoi ou n’importe qui. Notre époque n’est pas irréligieuse ; elle est, au contraire, pour toute religion, pour toute relation, avec tout prétendu absolu, le seul « irrecevable » pour elle étant la religion chrétienne, la relation au seul vrai Absolu. Notre époque a tous les cultes possibles et imaginables, des plus terre-à-terre aux plus idéologiques et sophistiqués, sauf le culte du vrai Dieu. » (p. 62)
De son côté, Alphonse MOREL (président du Synode de l’Église évangélique réformée du Canton de Vaud) déclare fort justement que le mal qui détruit les Églises et menace toutes les civilisations est beaucoup plus profond qu’une simple conspiration Franc-maçonne ou communiste. Le mal, écrit-il,
« … réside dans la perte de la foi en la vérité révélée et dans l’idée n’existe pas de vérité politique. Ne croyant plus à la vérité, l’homme croit en lui-même. La foi en Dieu est remplacée par la foi en l’Homme, reconnu capable de créer la vérité religieuse, purement intérieure et personnelle, et libre de choisir, sans égard aux réalités, le régime politique par la voie de la volonté démocratique du peuple souverain. » La Nation, Lausanne. 23 octobre 1976. No 1013.
[25]Le chrétien croit qu’en Christ et Sa divine Parole il a reçu de Dieu la Vérité. Le chrétien ne recherche pas ce qu’il ne connaît pas. Il découvre, par l’Esprit qui le conduit dans toute la Vérité, les richesses infinies du con qu’il a reçu, Christ la Vérité révélé par l’Écriture Sainte. (réd.)
[26]Le chrétien croit qu’en Christ et Sa divine Parole il a reçu de Dieu la Vérité. Le chrétien ne recherche pas ce qu’il ne connaît pas. Il découvre, par l’Esprit qui le conduit dans toute la Vérité, les richesses infinies du con qu’il a reçu, Christ la Vérité révélé par l’Écriture Sainte. (réd.)
[27]Mgr. F. DUCAUD-BOURGET : L’Église résistante (Minute No 746, 28 juillet 1976). Nous soulignons (réd.)
[28]Sur les origines et l’histoire de ces visées maçonniques lire : J. PLONCARD d’ASSAC L’Église occupée, 1975 (Diffusion de la pensée française)
[29]24 Heures (Lausanne), samedi-dimanche 17-18 juillet 1976. Nous soulignons (réd)
[30]Dans le quotidien parisien L’Aurore du 29 juillet 1976. Nous profitons de cette citation pour recommander à nos lecteurs qui désirent être renseignés sur ce qui se passe actuellement dans l’Église Catholique Romaine de lire chaque jeudi la chronique du père Bruckberger dans ce journal. Le père Bruckberger vient de publier un recueil de ses chroniques sous le titre : L’âne et le bœuf (Plon) 1976.
[31]Voyez Mgr. LEFEBVRE : J’accuse le Concile (Éditions Saint-Gabriel) CH – 1920 Martigny , 1976
[32]Sur l’incompatibilité absolue du naturalisme franc-maçon et du Christianisme voyez : LEON XIII : Encyclique Humanum Genus sur la secte des Francs-Maçons (Éditions Saint-Michel) Léon de PONCINS : Christianisme et Francs-Maçons, Jacques PLONCARD d’ASSAC : Les Francs-Maçons (La Lettre Politique No 77/78). Une remarquable analyse de la Franc-Maçonnerie du point de vue anglican : W. HANNAH : Darkness visible (Britons Publ. Co. 1968) W. HANNAH : Christian by Degrees. Masonic Religion revealed in the Light of Faith (Britons, 1964)
[33]Minute No 751, 1er septembre 1976 p. 12
[34]L’Impartial (La Chaux-de-Fonds), 6 septembre 1976
[35]Les textes fondamentaux de ce conflit peuvent se lire dans : La condamnation sauvage de Mgr. Lefebvre in Itinéraires No 196 ter, octobre 1975 et dans les appendices de l’abbé J.ANZEVUI : Le drame d’Ecône (Valprint S.A.) Sion 1976. Voyez aussi de R. GAUCHER : Mgr. Lefebvre. Combat pour l’Église, Albatros. 1976.
[36]Nouvelliste et Feuille d’Avis du Valais (Sion), 4 août 1976. Depuis lors Mgr. Lefebvre à été reçu par Paul VI.
[37]Le bulletin mensuel de Chalcedon (en. anglais). le Chalcedon Report peut s’obtenir gratuitement en ligne.