L’infiltration des Sociétés secrètes à l’intérieur des Églises chrétiennes

par | Documentation Chrétienne - numéro 2

L’essence même de toute Société secrète est de constituer une puissance par suite de la cohésion qu’elle établit entre un certain nombre d’initiés supérieurs et de dupes savamment choisis.

De toute évidence, cette puissance est limitée quand elle agit dans un État où il existe d’autres forces capables de s’opposer à la réalisation de ses desseins[1].

Par contre, la société secrète devient absolument prépondérante et peu aisément imposer ses volontés quand elle opère dans une société désorganisée et dans laquelle il n’existe aucune force capable de lui faire contrepoids et de lui résister.

Toute société secrète est par suite entraînée à devenir tôt ou tard un agent de désorganisation sociale parce que, pour imposer ses volontés – ce qui est la raison-même de son existence – la société secrète a besoin d’écarter ce qui lui fait obstacle[2], les grands cadres sociaux et les forces sociales, pour ne laisser derrière elle qu’une poussière d’individus que leur faibles se livre sans défense à la tyrannie des maîtres occultes des sociétés secrètes ayant acquis le monopole de la puissance[3].

Pour acquérir ce monopole de la puissance, les sociétés secrètes ne doivent pas seulement propager en dehors d’elles l’individualisme, détruire la famille, encourager l’immoralité, saper les hiérarchies, renverser les trônes, rendre les gouvernements instables, abattre les aristocraties, fomenter des guerres de classe, développer dans les masses et dans les élites le goût du luxe et de la dépense, et ruiner les citoyens à qui une fortune grande ou même moyenne aurait pu assurer l’indépendance vis-à-vis des « forces occulte»[4].

Pour que la « société secrète» soit assurée de dominer L’État, il lui faut encore détruire ou asservir ces forces sociales supérieures que sont les religions[5].

Laisser debout et indépendante une religion serait pour la société secrète courir le risque de voir se former autour de cette religion un groupe de fidèles qui, par leur cohésion naturelle à leur haute valeur morale, seraient susceptibles de constituer une force capable de contrebalancer celle de la société secrète.

Par suite, alors même qu’à l’origine elle avait été créée sous l’apparence de défendre une religion et alors même qu’elle se prétendrait inféodée à une Église, toute société secrète doit seulement en venir à combattre toutes les religions, sans exception, y compris celle dont elle se prétendrait le défenseur.

A l’heure actuelle, l’assaut des diverse sociétés secrètes apparaît dirigé uniquement contre les religions chrétiennes et en premier lieu contre l’Église catholique. Le tour des autres religions viendra, car la société secrète ne peut supporter devant elle qu’une poussière d’individus n’ayant entre eux aucun lien qui ne soit entre les mains de la société secrète.

Pour détruire une Église, les sociétés secrètes peuvent agir de deux manières : elles peuvent la détruire par une attaque directe en lui enlevant ses fidèles au moyen d’une propagande nettement antireligieuse[6], ou bien introduire à l’intérieur de l’Église, dont elles méditent la perte, des agents ayant mission de s’emparer de sa direction tout en laissant subsister son apparence extérieure ancienne[7], de telle sorte que cette Église, minée par en dessous, en arrive avec le temps à devenir une succursale de la société secrète ennemie.

Le plus souvent les deux modes d’attaque sont employés simultanément. L’attaque directe est effectuée au nom de la liberté de pensée, de la science et du progrès. L’attaque occulte est effectuée sous prétexte de « réforme», de retour à la pureté de la religion primitive ou d’adaptation aux nécessités du siècle. Attaque infiniment plus dangereuse que l’attaque directe, l’attaque occulte est malheureusement assez facile à mener à bien.

Introduire des agents d’une société secrète ennemie à l’intérieur d’une Église chrétienne est besogne on ne peut plus aisée[8], les confessions chrétiennes étant, à l’inverse du Brahmanisme et du culte des ancêtres du Japon, largement ouvertes à tous, quelle que soit la race (et les antécédents) du prosélyte qui se présente. Un nègre, sectateur du Vaudou, un Asiate adorateur de l’esprit du mal, un Chinois bouddhiste, un Juif talmudiste ou cabaliste, un Aryen élevé dans l’athéisme, un franc-maçon notoire se présente-t-il, on l’accueille avec joie du moment où le postulant fait extérieurement acte de foi. Certes, pour ces prosélytes, le plus grand nombre sont des convertis sincères. Mais, dans leur foule, les sociétés secrètes ennemies peuvent aisément – et elles ne s’en privent pas – glisser des agents chargés d’exécuter une sinistre besogne[9]

Pour un chrétien, l’acte ainsi accompli est un épouvantable sacrilège, mais pour qui ne croit pas et est un ennemi de la religion chrétienne, l’acte accompli apparaît comme une simple ruse de guerre. Une fois établi dans la place, l’agent d’une société secrète agira comme agit tout agent d’une société secrète ayant réussi à se glisser chez l’adversaire. Pour arriver à ses fins et pour accomplir sa mission, cet agent ennemi se soumettra à toutes les disciplines, il professera toutes les doctrines que l’on voudra et il édifiera les fidèles par l’apparence mensongère de son zèle pieux[10]. Pour lui le fin du fin sera de prendre le masque d’un écrivain chrétien et d’un défenseur de la foi ou de s’astreindre à jouer la comédie en devenant prêtre de la religion qu’il déteste. Par étapes, le travail souterrain s’accomplira. Des agents ennemis pourront pénétrer les uns après les autres. Petit à petit, sans que l’on s’en doute, il se formera à l’intérieur de l’Église catholique et des Églises protestantes, tout un réseau d’agents de l’ennemi, prêtres et laïcs, qui, formant groupe compact, pousseront certains d’entre eux aux plus hautes dignités et aux postes qui constituent en quelque sorte les leviers de commande[11]. Tel est le plan diabolique que les sociétés secrètes ont dès longtemps dressé.

Quand les agents des sociétés secrètes ennemies auront acquis une situation suffisante, la bataille prendra une forme nouvelle. Tirant parti de l’autorité résultant des positions acquises par certains des conspirateurs, on commencera par lancer des « idées nouvelles» dont les effets dissolvants auront été au préalable soigneusement étudiés dans les conseils des sociétés secrètes[12]. L’histoire fournirait au besoin plus d’un exemple de ces infiltrations dissolvantes. Alors de braves gens se laisseront duper[13] et « très innocemment» apporteront leur concours aux agents des sociétés secrètes ennemies de leur Église.

À l’abri derrière la bonne foi et l’honorabilité de ces malheureuses dupes, les agents des sociétés secrètes opéreront en toute sécurité. Ils écarteront ou briseront les hommes de foi dont la clairvoyance et l’indépendance d’esprit feraient obstacle à la réalisation des plans de la société secrète. Si machiavélique que puissent paraître de semblables manœuvres, elles sont du domaine des réalités.

Dans les sociétés modernes, démocratiques et individualistes à outrance, où la cohésion n’existe plus que sous la forme d’un syndicalisme aisément pénétrable par les sociétés secrètes, celles-ci ne cachent pas leur volonté de détruire les religions chrétiennes et, en tout premier lieu, la religion catholique.

Les attaques directes sont avouées. On s’en fait même gloire. Ne serait-ce pas là une feinte, les sociétés secrètes ayant infiniment plus à gagner avec l’asservissement des Églises qu’avec leur destruction ?

Au lieu de concentrer toute leur attention sur des attaques directes plus tapageuses que vraiment dangereuses, les hommes de foi feraient bien de se méfier des subtiles attaques indirectes, susceptibles d’être menées par ces agents des sociétés secrètes à qui un masque religieux avait permis de s’introduire parmi les véritables chrétiens, à l’effet de les duper et de les entraîner dans une voie menant à leur asservissement aux « forces occultes».

On voit déjà aux États-Unis des pasteurs protestants professer des doctrines bolchevistes et, chez nous, des personnages qui se disent catholiques, ne pas reculer devant d’étranges compromissions avec des agitateurs démagogues. N’est-il pas temps, et plus que temps, de se méfier des infiltrations des sociétés secrètes parmi les chrétiens, et dé se garder contre les périls qui résulteraient de ces infiltrations si la manœuvre avait plein succès ?

A. S. du Mesnil-Thoret

 « Intérêt français» 25 octobre 1928

Repris par Auguste CAVALIER « Les Rouges chrétiens» Paris 1929

Les citations bibliques ont été ajoutées par l’éditeur actuel de ce texte.

[1]« …il n’y a pas d’autorité qi ne vienne de Dieu, et celles qui existent ont été instituées par Dieu… le magistrat est ministre de Dieu pour ton bien… pour exercer la justice et pour punir tout qui fait le mal ». Romains 13 : 1-5. « Par moi. les rois règnent et les princes ordonnent ce qui est juste. Par moi dominent les puissants, et les grands, tous ceux qui jugent la terre. »  Proverbes 8 : 15

[2]« Et maintenant vous savez bien ce qui lui fait obstacle, pour qu0il ne soit manifesté qu’en son temps. Car déjà le mystère de l’iniquité est à l’œuvre, seulement il faut que celui qui lui fait encore obstacle soit écarté» II Thessaloniciens 2 : 6-7

[3]« On se mit à adorer le dragon, parce qu’il avait donné le pouvoir à la bête, et l’on adora la bête elle-même, en disant : Qui est semblable à la bête, et qui peut combattre contre elle ?» Apocalypse 13 : 4

[4]« Il proférera des paroles contre le Très-haut, il opprimera les saints du Très-haut et formera le dessein de changer les temps et la loi, et les saints seront livrés en son pouvoir pendant un temps, des temps et la moitié d’un temps » Daniel 7 : 25.

[5]« Car il faut qu’auparavant l’apostasie soit arrivée. et qu’on ait vu paraître l’homme de l’iniquité, le fils de la perdition, l’adversaire qui, s’élevant au-dessus de tout ce qu’on appelle Dieu et qu’on adore…» 2 Thessaloniciens 2 : 3-4.

[6]    « On lui donna une bouche qui proférait des paroles orgueilleuses et des blasphèmes…La bête ouvrit donc la bouche pour proférer des blasphèmes contre Dieu, pour blasphémer son nom, son tabernacle et ceux qui habitent dans le ciel ». Apocalypse 13 : 5-6

[7]« …va jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, se fait passer lui-même pour Dieu» II Thessaloniciens 2 : 4

[8]« Prenez garde à vous-mêmes, et à tout Le troupeau au milieu duquel le Saint-Esprit vous a établis évêques, pour paître l’Église de Dieu qu’il s’est acquise par son propre Sang…Veillez donc, vous souvenant que, durant trois ans, je n’ai cessé nuit et jour d’avertir chacun de vous avec larmes » Actes 20 : 28-31

[9]« Gardez-vous des faux prophètes, qui viennent à vous déguisés en brebis, mais qui au dedans, sont des loups ravisseurs. Vous les reconnaîtrez à leurs fruits » Matthieu 7 : 15-16.  « Pour moi, je sais qu’après mon départ il s’introduira parmi vous des loups cruels, qui n’épargneront point le troupeau… » Actes 20, 29 « Gardant l’apparence de la piété mais ayant renié ce qui en fait la force », | II Timothée 3 : 5.

[10]« Ce n’est pas quiconque me dit Seigneur, Seigneur, qui entrera dans le royaume des cieux, mais seulement celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux. »  Matthieu 7 : 21-23

[11]« Quand vous verrez établie dans le lieu saint l’abomination de la désolation, dont a parlé le prophète Daniel – lecteur prends-y garde… » Matthieu 24, 15

[12]« Car il viendra un temps où les hommes ne souffriront point la saine doctrine ; mais ayant la démangeaison d’entendre des choses agréables, ils rassembleront autour d’eux des docteurs selon leurs propres désirs, et ils fermeront l’oreille à la vérité pour se tourner vers des fables », II Tim.4 : 3-4

[13]« Car de faux Christs et de faux prophètes s’élèveront et feront de grands signes et des prodiges, jusqu’à séduire s’il était possible, les élus-mêmes. » Matthieu 24 : 24 « Il lui fuit donné de faire la guerre aux saints et de les vaincre… Que celui qui a des oreilles entende !» Apocalypse 13 : 7-9, « Plusieurs faux prophètes s’élèveront et séduiront beaucoup de gens… Mais celui qui persévérera jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. » Matthieu 24 : 11-13