Positions Créationnistes – numéro 23 | L’évolution – est-ce un dogme ?

par | Positions Créationnistes

Préliminaires[1]

Avant que vous lisiez ce qui suit, je désire tout d’abord expliquer les circonstances dans lesquelles a été donné cet exposé. Pour cela il convient de me présenter : je suis étudiant de troisième année à l’Université de Lausanne (Suisse) en biologie. Dans le courant de cette troisième année, nous avions comme tâche de présenter un séminaire sur un sujet de notre choix, dans le but de nous exercer à parler devant un auditoire.

Chrétien, racheté par le sacrifice de Jésus-Christ à la croix, ma position sur la question de l’origine est, depuis déjà quelques années, entièrement basée sur l’interprétation littérale du texte de la Genèse. Au fil des années, et ceci particulièrement depuis que j’ai commencé mes études universitaires, le Seigneur a mis devant moi beaucoup d’écrits sur la question, m’a fait connaître par le moyen d’un cher frère en Christ l’Association Création Bible et Science et d’autres sources précieuses d’enseignement sur les origines. En lisant cette littérature et ces revues scientifiques, j’étais émerveillé de voir à quel point Dieu veillait sur sa Parole et quels moyens Il employait encore pour répandre la vérité et la bonne nouvelle du salut. C’est pourquoi, moi-même vivement intéressé par la biologie, je me fixai, comme credo de mes études, le but avoué d’approfondir cette question des origines, non par curiosité mais par désir de travailler pour Dieu dans ce domaine. J’ai pu me rendre compte à quel point ce sujet était un merveilleux point de départ pour prêcher l’évangile. Ainsi ce sujet m’est tout de suite venu à l’esprit. Néanmoins je n’osai pas me lancer directement dans cette direction sans avoir auparavant tâté le terrain auprès des futurs auditeurs.

À mon grand étonnement, la réaction fut très positive, mes camarades désiraient sincèrement connaître un point de vue différent de celui qu’ils avaient toujours entendu ; j’ai également posé la question à l’un de mes professeurs, qui m’a donné « carte blanche » non sans me demander de ne pas me perdre dans des considérations métaphysiques ou religieuses. Encouragé par de telles dispositions, je me suis mis à la tâche. J’ai alors choisi l’orientation suivante : il ne fallait pas faire une réunion d’évangélisation, cela va sans dire ; mes connaissances sur le sujet étant bien faibles, je ne désirais pas parler de points trop difficiles ou trop discutables. Tenant compte de cela, mon but a alors simplement été d’informer les auditeurs de l’avis d’éminents scientifiques sur la question. Comme vous le verrez, ma position n’était pas cachée, mais je désirais à tout prix éviter les questions ou remarques litigieuses qui auraient engendré des polémiques que je ne désirais pas affronter sans l’aide d’autres créationnistes plus compétents. En effet, comme cela était en quelque sorte un travail de pionnier auprès de mes camarades, il était impératif de ne pas ridiculiser la thèse créationniste comme l’avaient fait malheureusement les chrétiens du temps de Darwin. Nous nous souvenons que, voulant faire face à la science de toute manière, ils gardaient les explications fixistes (qui jusqu’alors étaient admises par la plupart des chrétiens) malgré les évidences des adaptations et modifications qu’il pouvait exister au sein d’une espèce. Cette prise de position a entre autres fortement contribué à discréditer la Parole de Dieu aux yeux des hommes. Aujourd’hui, il nous faut être très prudents lorsque l’on désire défendre la thèse créationniste. On tombe très vite dans cette malheureuse attitude de vouloir absolument tout prouver. Très vite les évolutionnistes prennent la question comme un simple caprice de chrétiens voulant réhabiliter un livre qu’ils appellent la Parole du Dieu Créateur.

Cela devient pour eux encore une hypothèse de personnes non qualifiées, s’ajoutant aux nombreuses légendes qui existent déjà sur la terre à ce sujet. Alors très vite ils ferment l’oreille à ces théories et restent fermement attachés à leurs maîtres à penser, les « tout-puissants scientifiques », à leur religion « la Science »…

C’est pourquoi dans mon séminaire, j’ai voulu principalement informer les auditeurs de l’état actuel de la question des origines ; rappeler les grandes étapes historiques qui ont hissé cette hypothèse au rang de dogme ; montrer par beaucoup de citations et d’exemples que le problème est toujours aussi grand pour ceux qui refusent d’admettre le Créateur ; montrer que d’éminents scientifiques peuvent remettre sérieusement en question l’hypothèse évolutionniste et que loin d’être des “rigolos”, ils sont dignes du respect des milieux scientifiques. J’ai aussi désiré aborder brièvement la question des raisons qui poussent les scientifiques évolutionnistes à refuser d’admettre les problèmes que soulève leur théorie. Ces raisons qui montrent que, lorsque quelqu’un est sous l’emprise de Satan, il est incapable de discerner les signes qui, au travers de la création, révèlent l’existence de Dieu (Rom. 1:20). Enfin, j’ai souhaité donner quelques exemples naturels inexplicables par les évolutionnistes.

Une désinformation incroyable règne à ce sujet, en Suisse en tous les cas. Une camarade me disait par exemple : « C’est fou ! Je pensais que cette question des origines était définitivement réglée, du moins en tous cas parmi les scientifiques. Je pensais que cette théorie créationniste n’était qu’une théorie moyenâgeuse qui avait été définitivement laissée de côté… » De telles déclarations paraissent impensables.

Pourtant c’est la preuve évidente que l’œuvre de Satan, celle de faire croire aux hommes que le Dieu Créateur n’est qu’une invention et que la science résout toutes les questions grâce… au hasard béni, a eu un effet désastreux. Les hommes sont sous l’emprise du roi des menteurs, prince de ce monde !

Mais grâce à Dieu, Satan faisant toujours une œuvre qui le trompe, la science est aujourd’hui un domaine dans lequel le travail pour Dieu en apologétique est un champ de mission fantastique.

Après le séminaire, ce sujet a préoccupé les esprits tout au long de l’année. En effet, dès qu’un phénomène suscitait des interrogations par manque d’explication satisfaisante dans le cadre darwinien, des clins d’œil m’étaient adressés… La réaction de mes camarades fut très surprenante et réjouissante d’une certaine manière. Pas de propos moqueurs, mais plutôt des interrogations sur les faits. Cependant, d’une manière générale, j’ai remarqué non pas une indifférence, mais une tolérance sur la question. En effet, ne trouvant parfois pas de réponses satisfaisantes, l’attitude était plutôt de dire : « Restons campés sur nos positions jusqu’à ce qu’une réponse claire soit donnée ! » En d’autres termes, ne voulant pas trop se mouiller devant les problèmes, cependant ils acceptaient quand même de les considérer.

Persévérons dans ce travail sous la direction Divine et je suis sûr que les fruits suivront. Prenons garde à la nouvelle forme d’évolutionnisme qui se montre dans la littérature, celle soutenue par la pensée du Nouvel Âge, à savoir : « La force vitale qui est au sein de la matière a guidé l’évolution. » Plus besoin de faire confiance au hasard qui décidément devenait un peu gênant, et toujours libre de la contrainte du Créateur. Comment définir cette force vitale ? Personne ne peut y répondre. Nous, peut-être : n’est-ce pas tout simplement la puissance Divine en création… ? Le séminaire vous est donné sans autres modifications et s’adresse donc à un auditoire d’étudiants.

Avant-Propos

Je désire m’entretenir avec vous aujourd’hui de ce sujet de l’évolution. C’est un sujet qui m’intéresse beaucoup, car comme plusieurs le savent, il touche mes convictions les plus profondes ; convictions qui me font pencher plutôt du côté d’une création que d’une évolution guidée par le seul hasard. Cependant rassurez-vous, mon but n’est pas de vous parler de mes convictions personnelles, mais de me pencher avec vous de la manière la plus impartiale et objective possible (cet effort doit venir également de vous, cela va sans dire…) sur quelques aspects de la théorie ou de l’hypothèse évolutionniste. Bien sûr, une présentation aussi courte ne peut malheureusement pas donner un aperçu global de la question. C’est en effet un sujet extrêmement vaste qui touche beaucoup de domaines de la science tels l’astronomie, la cosmologie, la chimie et la biochimie, la génétique et la biologie moléculaire, la zoologie et la botanique, la géologie et bien sûr la paléontologie, etc., j’en oublie c’est certain ; et ce ne sont que d’infimes parties du sujet qui vont être abordées ; d’autre part, mes connaissances sont si limitées que je ne pourrais moi-même répondre à toutes les questions que vous pourriez vous poser. Néanmoins, j’ai désiré aborder le sujet afin que vous puissiez vous aussi être conscients de ces problèmes et y réfléchir le moment venu ; dans ce but, j’ai récolté dans plusieurs livres et coupures de journaux quelques points qui peuvent être déjà la source de bien des interrogations et remises en questions. Je vais donc vous présenter la chose comme suit :

Introduction

Tout d’abord, pour bien entrer dans le sujet et capter votre attention, posez-vous cette question : Pourquoi croyez-vous à l’évolution ? Réfléchissez bien !

  • Peut-être y croyez-vous parce qu’on vous l’a toujours enseignée comme seule réponse à la question de nos origines ? Est-ce une raison suffisante et scientifique pour y croire ? Certainement pas !
  • Peut-être y croyez-vous à cause d’une certaine philosophie ou idée que vous vous faites de la vie ? C’est déjà, à mon avis, une meilleure raison que la précédente, mais elle est aussi peu scientifique puisqu’elle touche à ce qui est de l’ordre métaphysique ou même religieux donc indémontrable scientifiquement. En d’autres termes, si vous êtes de cet avis, vous vous dites qu’il n’y a pas d’intelligence surnaturelle qui a conçu l’univers et donc que l’évolution est la théorie qui vous convient le mieux. Comme vous le voyez, cet avis se fonde sur un présupposé métaphysique, voire religieux.
  • Ou alors peut-être y croyez-vous parce que la science présente l’évolution comme étant un fait prouvé et démontré qui ne souffre plus aucun doute ? c’est-à-dire qu’elle l’élève au rang de dogme dont la définition est, je le rappelle : un point de doctrine établi ou regardé comme une vérité fondamentale, incontestable. Or une théorie scientifique, pour être admise comme telle, ne supporte aucune réfutation. S’il en existe, alors on ne peut plus qualifier cette théorie de « théorie scientifique », et encore moins de dogme. Elle entre dans le domaine des sciences humaines, de la philosophie ou de la religion. Ainsi si l’on croit à une telle théorie, c’est plus à cause d’opinions philosophiques que de raisons véritablement scientifiques.

Maintenant, pour étudier un tel sujet, nous devons nous assurer d’être tous d’accord sur un point précis, à savoir l’attitude que doit avoir un scientifique devant n’importe quel problème (cela nous a été rappelé au début de l’année par notre professeur Monsieur Clémençon). Cette attitude, c’est l’honnêteté !

En tant que scientifiques, nous devons examiner toutes les évidences et les faits avant d’arriver à une quelconque conclusion et ceci quel que soit le sujet étudié ; et si nous n’avons pas de réponse à donner, soyons honnêtes et disons-le. (Lorsque l’on est étudiant on nous propose parfois des problèmes que la science n’a pas résolus. On nous dit que les scientifiques ne sont pas unanimes quant à la solution à donner à telle ou telle question. Alors tout naturellement le professeur nous donne son avis personnel, tout en soulignant qu’il n’est pas encore prouvé rigoureusement et que la question reste ouverte.,)

Pourtant un sujet, l’évolution, semble très souvent échapper à toute remise en question alors que tant de scientifiques renommés, et cela par de nombreuses expériences sont devenus conscients des problèmes que soulève cette théorie et l’ont abandonnée. Ces scientifiques qualifient alors l’évolution de « conte de fée pour adultes[2]», de « théorie qui n’est plus soutenable[3]», et en parlant d’un problème plus précis, un chercheur italien, le Professeur Roberto Fondi, a dit, je cite : « Cela ne relève même pas de la science-fiction mais du délire intellectuel[4]» ; Paul Lemoine, Directeur du Muséum, s’avançait même jusqu’à dire il y a plus de cinquante ans déjà : « La théorie de l’évolution est impossible. Au fond, malgré les apparences, personne n’y croit plus, et l’on dit sans y attacher d’importance “évolution” pour signifier “enchaînement”, ou « plus évolué », « moins évolué », au sens de « plus perfectionné », « moins perfectionné », parce que c’est un langage conventionnel admis et presque obligatoire dans le monde scientifique. L’évolution est une espèce de dogme auquel ses prêtres ne croient plus, mais qu’ils maintiennent pour le peuple. Cela, il faut avoir le courage de le dire, pour que les hommes de la génération future orientent leurs recherches d’une autre façon[5]». Le professeur Louis Bounoure dit : « Le plus bel exemple de système a priori pseudo-scientifique est fourni par la théorie évolutionniste. L’évolution biologique n’est qu’un mythe entièrement illusoire[6]». Et pour appuyer ce que je disais plus haut le Professeur Yves Delage disait au début du siècle : « Je suis absolument convaincu qu’on est ou qu’on n’est pas transformiste non pour des raisons tirées de l’histoire naturelle, mais en raison de ses opinions philosophiques[7]».

Ces citations, même si elles sont assez anciennes, sont répétées de plus en plus souvent (en d’autres termes, bien sûr) de nos jours par un nombre croissant de scientifiques. À côté de tant de contradictions, certains gardent inlassablement une position conservatrice et prêchent l’évolution comme à ses premiers jours en disant, je cite : « L’évolution du règne animal et végétal est considérée par tous ceux qui ont qualité d’en juger, comme un fait acquis sans qu’il soit besoin d’autre preuve[8]». Cette affirmation élevant, soit dit en passant, l’évolution au rang de dogme. Sol Tax, présidant à Chicago en 1959 la célébration du centenaire de la publication de l’Évolution des espèces de Darwin, devait dire à cette occasion : « Mais peut-être la plupart de nos écoles enseignent encore l’évolution, non comme une certitude, mais comme une alternative parmi les explications proposées pour comprendre comment le monde est devenu ce qu’il est. Quelle que soit la mise en pratique de notre croyance religieuse, cette curieuse indécision doit maintenant cesser. Nous ne pouvons pas résoudre les problèmes difficiles de notre monde si notre culture ne prend pas en considération des faits démontrés empiriquement[9]». Force est de le constater, il y a comme un petit problème ! Aujourd’hui plus que jamais la question de l’évolution engendre énormément de controverses et de discussions, je cite : « Dans les symposiums internationaux les plus prestigieux, dans les pages des plus grands journaux scientifiques et jusque dans les galeries feutrées du British Museum, les moindres aspects de l’évolution sont débattus avec une intensité que l’on a rarement rencontrée ces derniers temps dans la science[10]. »

Mais pourquoi un tel regain d’intérêt pour ces questions ? Pour en avoir la réponse, il nous faut nous replacer dans le contexte historique.

Rappel du contexte historique

L’idée d’évolution a influé sur toute la pensée moderne, et aucune autre théorie récente n’a autant contribué à modeler la façon dont nous envisageons notre propre espèce et sa relation au monde environnant.

Il y a un siècle, l’acceptation de cette idée déclencha une révolution intellectuelle dont la signification et la portée dépassaient de beaucoup celles des révolutions coperniciennes et newtoniennes des 16ᵉ et 17ᵉ siècles. Le triomphe de l’évolution sonna le glas de la vision téléologique traditionnelle (monde envisagé comme un ordre créé à dessein) qui dominait la pensée occidentale depuis deux millénaires. Avant Darwin, l’homme croyait (en général) qu’une intelligence providentielle avait imposé son plan mystérieux à la nature ; dès lors le hasard gouverna en maître absolu. La volonté de Dieu fut remplacée par les caprices d’un immense jeu de roulette. La rupture avec le passé était nette et brutale.

En raison de l’influence qu’ils exercent bien au-delà de la biologie, les problèmes de l’évolution bénéficient d’une large médiatisation. La moindre hypothèse suggérant une faille dans la théorie darwinienne excite l’attention du public. Si les biologistes étaient incapables de soutenir plus longtemps le bien-fondé de ce pilier de la pensée moderne, les retombées philosophiques seraient innombrables. Il n’est donc pas étonnant que le tumulte qui règne en biologie éveille un aussi vaste intérêt[11]. Pourtant ce tumulte sur la question des origines de la vie a toujours plus ou moins existé. L’idée d’évolution n’a d’ailleurs pas commencé avec Darwin. Plusieurs scientifiques et philosophes y croyaient bien avant lui. Il y eut tout d’abord les Grecs anciens ; Anaximandre (en 600 avant J.-C.) pensait que l’homme avait évolué à partir du poisson, et Empédocle (5ᵉ siècle avant J.-C.) disait que les animaux avaient dérivé des plantes. Ces points de vue n’étaient cependant pas acceptés. Puis vint la théorie de la génération spontanée qui disait que les créatures pouvaient surgir soudainement de la vase et de la boue. Aristote et d’autres furent ceux qui, avant la naissance du Christ, avançaient cette théorie. Grégoire (pape en 400 après J.-C.) disait alors que si la vase était l’origine de toute chose, il n’y avait alors plus besoin de croire en un Dieu créateur. Longtemps on a cru à la théorie de la génération spontanée, chose incroyable ! Pourtant, 200 ans avant Pasteur, William Harvey avait déjà essayé de convaincre les scientifiques que c’était une erreur, mais sans succès. Plus tard, au 17ᵉ siècle, Redi a également remis en cause la théorie de la génération spontanée, mais il a encore fallu attendre Pasteur qui enfin démontra au 19ᵉ siècle qu’il fallait abandonner cette vision des choses. Ce n’est en fait pas étonnant de voir que cette théorie fut infirmée ; comment a-t-il été possible qu’une théorie aussi fausse ait été défendue avec tant de passion pendant si longtemps contre les avis mêmes d’éminents scientifiques et de leurs expériences prouvant tout le contraire ? Je pense que les raisons sont exactement les mêmes que celles pour lesquelles la théorie de l’évolution est crue aujourd’hui. Haeckel l’avait dit : « La génération spontanée devait être vraie parce qu’autrement il serait nécessaire de croire en un Créateur. » Je pense que l’évolution n’a pas résolu les problèmes que renfermait la théorie de la génération spontanée, et que, en quelque sorte, l’évolution n’est rien d’autre qu’une manière bien plus sophistiquée, bien plus subtile et il faut le reconnaître magnifiquement construite, d’expliquer cette vieille superstition. Après tout, même si elle se cache derrière cette sorte de mur protecteur que sont les milliards d’années, l’évolution n’enseigne-t-elle pas que la matière vivante est issue de la matière non-vivante ?

Aux environs de la fin du 18ᵉ siècle, des hommes qui vont grandement influencer Darwin vont parler d’évolution. Ce sont Erasme Darwin (le père) et Lamarck. Ce dernier, grand évolutionniste, n’a pas pu apporter beaucoup d’évidences pour appuyer sa théorie, car un homme, Cuvier, s’y opposait de manière très efficace. Georges Cuvier fut l’un des plus grands paléontologues et jouissait d’une réputation internationale. Pour lui les fossiles ne racontaient nullement l’histoire d’une évolution, mais comme pour la majorité des premiers paléontologues, les fossiles parlaient d’une catastrophe terrible dans l’histoire de la terre qui aurait exterminé tous les animaux, à savoir le déluge universel. Mais Cuvier fit une grande erreur : en voulant s’opposer à l’évolution, il l’a en fait aidée à s’imposer en faisant dire à la Bible ce qu’elle ne disait pas. Et pendant que Cuvier attaquait les idées évolutionnistes dans le monde de la paléontologie, leur influence commençait à se faire sentir dans le monde de la géologie. James Hutton, appelé par certains « le père de la géologie », proposa en 1795 sa théorie de l’uniformitarisme, comme quoi les processus géologiques ont toujours été ce qu’ils sont maintenant et que la terre actuelle n’a pas été modelée par de grandes catastrophes telles que des déluges universels. Lyell reprit les idées de Hutton en les complétant dans son œuvre intitulée Principes de géologie. Hutton et Lyell ont ainsi grandement développé la géologie, remettant en lumière les idées de Steno qui, au 17ᵉ siècle, suggéra que les strates représentaient des couches de sédiments déposées horizontalement les unes sur les autres pendant les longues périodes de l’histoire de la terre, la couche inférieure étant ainsi la plus ancienne[12].

C’est dans un tel contexte que Darwin fit irruption. Son nom est à jamais associé à celui d’évolution. Car, même s’il n’a pas vraiment découvert de choses nouvelles, il a rassemblé tout ce que lui avaient laissé ses prédécesseurs et l’a présenté comme jamais personne ne l’avait fait, de manière cohérente et avec beaucoup de témoignages à l’appui.

Permettez-moi de vous faire l’injure de rappeler les principaux points du darwinisme. Il a dit :

  • que les petits étaient toujours différents de leurs parents de manière infime et que ces différences se transmettaient aux générations suivantes.
  • que les animaux possédant des variations bénéfiques allaient être favorisés et s’accroître en nombre, alors que d’autres tendaient à disparaître.
  • en d’autres termes, que les forts survivront et les faibles mourront.
  • en résumé, que par ces processus de nouvelles espèces pouvaient apparaître.

Darwin apporta beaucoup de témoignages pour prouver sa théorie ; mais il le dit lui-même, c’est son voyage aux Galapagos qui l’a conduit à tirer ces conclusions avec tant d’assurance. De retour en Angleterre, il développa ses vues sur l’évolution ; mais il était somme toute peu disposé à les publier. Peut-être était-ce, d’après certaines biographies, parce qu’il était effrayé à l’idée du bouleversement et des controverses que sa théorie allait apporter. Finalement, il publia sa théorie dans son fameux livre intitulé L’origine des espèces en 1859. Son livre fut un succès de librairie, mais c’est surtout grâce à un brillant scientifique et polémiste, T. H. Huxley, qui prit sur lui de combattre en faveur des idées de Darwin, que peu à peu la théorie conquit les foules.

Un événement très important eut lieu en 1860 lors d’une rencontre de l’Association anglaise pour l’avancement de la science. Le sujet allait justement être la discussion des objections apportées à l’ouvrage de Darwin. Cela se passa le 30 juin 1860 et cette date est restée célèbre dans l’histoire du débat entre créationnistes et évolutionnistes. Ce jour-là ce fut l’évêque d’Oxford, Samuel Wilberforce, qui prit sur lui de parler contre la théorie de Darwin. Cet évêque avait déjà paraît-il écrit un article sur la question, que Darwin lui-même avait qualifié d’extraordinairement intelligent et sensé. Cependant, tout ce que l’on sait du débat est que Huxley brilla par sa grande intelligence alors que l’évêque, lui, ne brilla que par son incompétence. Conséquence, tout le monde en parla pour ridiculiser la thèse créationniste et pour prôner l’évolution. En dix ans, l’opinion générale scientifique du monde entier avait changé en faveur de l’évolution.

Ce succès ne fut pas seulement dû à l’éloquence de Huxley mais aussi à :

    1. La présentation de Darwin qui amena beaucoup de preuves qui semblaient appuyer sa théorie.
    2. Au fait que, comme de nos jours, les hommes sont surtout dérangés par le fait d’être contraints de croire à quelque chose que l’on pourrait appeler un Créateur. Une théorie qui dit être scientifique et qui peut être utilisée comme une excuse pour rejeter Dieu était (et est toujours) très attrayante. En effet, en grande partie (comme je l’ai dit ci-dessus) on croit ou non à l’évolution d’abord en fonction de ses opinions philosophiques. En plus, cette théorie s’inscrivait à merveille dans le mouvement rationaliste athée du moment, développé dans les ouvrages d’hommes exerçant une grande influence tels Marx, Feuerbach, ou encore plus tard, Freud.
    3. Certains chrétiens, peu affermis dans leurs convictions, furent pris de panique par un tel bouleversement. Au lieu de lutter et de travailler à éprouver la théorie sur le plan proprement scientifique, ils ont immédiatement fait un compromis disant qu’il était tout à fait possible de croire à la fois en l’évolution et au texte de la Genèse. Le mouvement évolutionniste-théiste était né.
    4. D’autres chrétiens ont très mal interprété les textes bibliques en leur faisant dire des choses absurdes que la science avait scientifiquement et rigoureusement réfutées. Ils n’étaient guère préparés à une telle discussion et plutôt que convaincre leurs adversaires, ils se ridiculisèrent par leur manière de défendre la thèse créationniste. Ils étaient par exemple fixistes à l’extrême, ne reconnaissant même pas la possibilité d’une micro-évolution. Ils suivaient ici le célèbre Linné qui pensait que les espèces qu’il décrivait n’avaient jamais changé et étaient restées strictement les mêmes qu’au jour de leur création. Les chrétiens continuaient à croire cela, même après que Darwin, inspiré par ses pinsons, eût démontré le potentiel génétique de chaque espèce. Le problème ici n’était qu’une mauvaise compréhension du terme “espèce”. Ainsi les chrétiens auraient pu sans difficulté concéder que les espèces pouvaient évoluer, mais de manière limitée, de telle sorte qu’un poisson reste toujours un poisson, un singe toujours un singe et que le reptile n’avait jamais vu le hasard le gratifier d’une paire d’ailes !

Ce temps semble pourtant révolu et cela depuis quelques années déjà. Beaucoup de scientifiques ont maintenant une attitude critique vis-à-vis de l’évolution. Ainsi tout le débat entre évolutionnistes et créationnistes reprend vie. D’autre part, des scientifiques sans aucune conviction religieuse reconnaissent les problèmes insurmontables que pose l’évolution. Exemple par excellence : Michael Denton, Directeur du Centre de Recherches en Génétique humaine de Sydney en Australie, qui a écrit un livre paru en 1985, devenu un classique de la controverse de l’évolution. Il dit dans une interview accordée au Figaro en 1989, je cite : « Avant toute chose, j’aimerais affirmer que je ne suis pas créationniste. C’est-à-dire que je ne pense pas que la création a vu le jour dans son état actuel. Je suis persuadé que les êtres vivants sont issus d’une évolution, en forme d’arbre “généalogique”, que les espèces descendent d’ancêtres communs, que la sélection naturelle y joue un rôle, tout comme les mutations. Les découvertes, ces vingt dernières années, de la biologie vont contre, non pas la théorie de l’évolution, mais contre l’explication darwinienne de l’évolution. Ces découvertes ont détruit les explications que nous pensions avoir sur le déroulement de l’évolution. Il faut arrêter de se bercer de l’illusion que nous avons apporté des réponses satisfaisantes aux grandes questions de l’évolution. Le constat est aujourd’hui simple : personne ne sait. Darwin a fait son temps. » Et encore : « La théorie darwinienne s’est érigée en dogme. On ne pouvait plus élever la moindre objection scientifique contre la théorie de l’évolution de Darwin. À tel point que la réflexion, le doute, ont été taris. On a perdu du temps. Il faut maintenant repartir sur d’autres bases, laisser travailler les faits pour reconstruire une théorie. »

Voilà donc, en quelques mots, les grandes lignes de l’histoire de cette théorie qui nous amènent aujourd’hui à considérer de telles remarques de la part de ces personnages illustres. Mais maintenant, arrêtons-nous sur le pourquoi de telles remarques. Qu’est-ce que ces scientifiques, qu’ils soient créationnistes ou non, ont découvert pour remettre de la sorte l’évolution en cause ? Plus encore, ils arrivent à convaincre de plus en plus de monde de laisser l’évolution ou du moins le darwinisme de côté. Voyons donc ensemble une toute petite partie des problèmes soulevés. Je ne désire volontairement pas revenir sur les questions classiques du « chaînon manquant », des grossières erreurs préméditées, ou même fabriquées, telles que celle de l’homme de Java, le Pithecanthropus erectus d’Eugène Dubois, un Hollandais, ou de l’homme de Piltdown, ou de l’Hespero-pithecus haroldcookii soi-disant singe ayant vécu dans le Nebraska. Ces témoignages sont constamment repris et peuvent devenir lassants, quand bien même ils sont dignes du plus grand intérêt pour n’importe quel scientifique. Passons donc maintenant à la théorie proprement dite.

Quelles sont les bases du darwinisme ?

Le darwinisme admet les mutations (triées par la sélection naturelle) comme le ressort de l’évolution. Or, l’animal favori des généticiens, la drosophile, a été retrouvé pratiquement identique à ce qu’il est aujourd’hui, dans l’ambre de la Baltique. L’ambre n’est autre que la résine fossile des pins dans laquelle la mouche s’est engluée, il y aurait 50 millions d’années. Or c’est la même mouche que maintenant, et pourtant elle mute très facilement. Mais il y a mieux. La terre compte un grand nombre d’animaux panchroniques : on nomme ainsi les espèces qui ont échappé au temps, qui sont restées les mêmes depuis des centaines de millions d’années, par exemple le cœlacanthe, ou, mieux encore, de tout petits insectes, les collemboles, qui vivent partout et qui en 150 millions d’années n’ont trouvé le moyen que d’acquérir un article de plus aux antennes. Or eux aussi mutent très facilement !

Rémy Chauvin, biologiste et ethnologue, professeur au laboratoire de sociologie animale de l’université René Descartes à Paris, dit à ce propos : « Je dis et je soutiens que s’il n’existait pas à ce propos une foule d’idées préconçues, tout le monde conviendrait que puisque les animaux qui mutent facilement subsistent tels quels pendant des dizaines de millions d’années, la mutation ne saurait être le moteur de l’évolution. C’est une question de bon sens, mais les préjugés sont, dans les sciences comme ailleurs, bien plus forts que le bon sens[13]. »

Un autre argument très puissant a été émis par Grassé (1973). Une génération humaine dure en moyenne 25 ans, une génération bactérienne une demi-heure, 20 minutes à 37°. La multiplication est donc dans ce dernier cas 400 000 fois plus rapide que chez l’homme. Ainsi les 3 500 000 ans qui séparent l’Australopithecus de l’homme ont vu apparaître des mutations chez les bactéries et les hommes. Or les bactéries en culture mutent à raison d’un mutant pour 109 individus. Il y a donc eu depuis l’Australopithecus un nombre incommensurable de milliards de milliards de mutants bactériens. Or les bactéries n’ont pas changé. Les ancêtres des hommes pendant ce temps-là ont, d’après l’évolution, complètement changé, ont parachevé leur structure verticale et ont acquis leur gros cerveau.

Essayons maintenant de définir un peu mieux ce qu’est vraiment la sélection naturelle. Le darwinisme n’arrive pas à se débarrasser du piège logique, la tautologie. Le darwinisme postule la survivance du plus apte. Mais qui est le plus apte ? Celui qui survit. Le darwinisme postule donc la survivance des survivants. Le fait de ne pas pouvoir définir l’aptitude en dehors de la survie fait de ce postulat une tautologie. Rappelons qu’une tautologie est : 1. La répétition d’une même idée en termes différents. 2. Proposition vraie quelle que soit la valeur de vérité de ses composantes. Les darwiniens ont alors défini l’adaptation comme la propriété de l’organisme adapté de procréer plus de petits que l’organisme non adapté. Qu’est-ce donc que la sélection naturelle ? La force qui fait survivre le mieux adapté, c’est-à-dire le plus fécond. Donc dire d’un animal qu’il est conservé par la sélection naturelle ou qu’il est le plus fécond, c’est dire exactement la même chose. Mais comme le fait remarquer un généticien nommé Waddington : « Quand on dit d’un animal qu’il est le plus apte, on ne veut pas dire nécessairement qu’il est le plus robuste ou qu’il a meilleure santé… Essentiellement, le mot ne dénote rien de plus que la descendance la plus nombreuse. Le principe général de sélection naturelle en fait, équivalant simplement à dire que les individus qui laissent le plus de descendance sont ceux qui laissent le plus de descendance. C’est une tautologie[14]. » Le célèbre paléontologiste américain et spécialiste de l’évolution Gould voit très clairement ces problèmes, mais il ne veut tout de même pas abjurer sa vieille foi. Pour répondre à ce problème, voilà ce qu’il dit : « La variation fortuite est bien la matière première du changement, mais la sélection naturelle parvient à concevoir des organes efficaces en rejetant la plupart des variantes tout en acceptant et en accumulant celles qui améliorent l’adaptation à l’environnement local. » Très bel échantillon de la pensée mythique : ici la sélection naturelle, “conçoit”, “rejette”, “accepte” ou “accumule” ; je rappelle que, comme nous l’avons découvert plus haut, la sélection naturelle est la fécondité différentielle, donc Gould dit en fait : la fécondité différentielle accepte ou accumule les variations qui donnent plus de petits dans un environnement donné !!!. En conséquence, les darwiniens qui conviennent, nous l’avons vu, que la sélection naturelle n’est rien d’autre que la fécondité différentielle, l’invoquent dans le paragraphe suivant comme une force toute-puissante qui trie dans les variations aléatoires ce qui est bien et en rejette ce qui est mal. En résumé, la Divine Providence ! Thompson, anglais pour qui le darwinisme est aussi sacré que le thé de cinq heures, dit : « Il est inutile de prédire que la compétition produira la sélection naturelle puisque la compétition est par définition ce qui produit la sélection naturelle. On ne peut prédire que la nature sélectionnera l’organisme le mieux adapté, puisque le mieux adapté est par définition celui que sélectionne la nature. »

Un nouveau point très important qui fait suite au précédent est l’affirmation que la sélection ne peut créer un organe nouveau ! En principe on entend dire que si un animal est porteur d’une mutation et si par ailleurs il est un peu plus fécond que ses congénères, alors la mutation s’imposera peu à peu dans la population. Pour cela nous admettons (et cela tout le monde l’admet) que la mutation initiale est quelconque, qu’elle n’apporte ni avantage ni désavantage à l’organisme (par exemple une des minimes mutations des os de la mâchoire qui aboutirent à la confection de l’oreille interne chez les mammifères). Elle est associée par hasard à une plus grande fécondité. Elle va donc se transmettre un peu plus que la moyenne à la génération suivante : et c’est tout ce qu’on peut admettre, tout ce qu’on a le droit de supposer. Mais le néo-darwinisme suppose beaucoup plus : au cours des millions d’années, les modifications minimes de la mâchoire vont toujours être associées à une plus grande fécondité et cela donnera l’illusion d’une évolution dirigée. Or on se jette ainsi dans des difficultés insurmontables :

    1. Il faut admettre qu’un avantage de fécondité se maintiendra pendant des millions d’années et précisément chez les animaux dont la mâchoire est en train d’évoluer. Or s’il en est bien ainsi, c’est le plus bel exemple de finalisme caché qu’on puisse trouver ! La nature a décidé de faire évoluer la mâchoire, et pour cela elle s’est avisée d’un moyen simple et infaillible en effet : donner une prime de fécondité aux animaux dont les mutations à la mâchoire risquent d’arriver au résultat voulu.
    2. Comme le souligne Devillers, éminent spécialiste de l’évolution, supposer qu’une minuscule mutation dans une pièce osseuse puisse présenter un avantage quelconque pour le sujet révolte la raison. L’association mutation de mâchoire – plus grande fécondité est donc tout à fait arbitraire.
    3. Mais pour que l’oreille interne se constitue, il faut admettre encore que la prime de fécondité caractérise seulement les animaux porteurs d’une mutation (petite et inutile) qui va dans le bon sens et non pas les autres. C’est l’arbitraire absolu.

Toutes ces dernières considérations sont très importantes. Les évolutionnistes, comme nous l’avions vu plus haut, voulaient se débarrasser de cette idée de finalité, de but dans l’existence, en laissant le hasard maître de tout. Or, comme nous venons de le constater, la sélection naturelle ou fécondité différentielle n’est autre qu’un nouveau téléologisme ! L’évolution ne peut pas éviter d’envisager une direction suivie, car le hasard ne permettrait tout simplement pas une réalisation aussi complexe et merveilleuse que celle de la nature !

Mais revenons encore de manière plus précise à ces mutations. Ce qui est certain (à 99,9 % d’après les généticiens), c’est que la plupart des mutations sont non seulement limitées mais en outre récessives. S’il suffit de peu de chose pour bloquer une fonction et obtenir, par exemple, des moutons sans cornes ou des souris blanches (sans pigments), une mutation progressive exige beaucoup plus. C’est ainsi que s’il suffit de modifier un nucléotide pour qu’une souris grise devienne blanche, il faut en créer 27 000, soit 27 gènes, pour l’opération inverse. La mutation progressive demande que la cellule forme de nouvelles substances, tributaires chacune de plusieurs dizaines d’enzymes dont chacun requiert plusieurs trentaines de couples de bases azotées ; au total, il faut qu’apparaissent spontanément dans l’ADN plusieurs milliers de ces couples rangés dans un ordre fonctionnel. C’est déjà beaucoup exiger du hasard. Et il faut imaginer qu’il sera sollicité à chaque opération ! Vraiment, il faut beaucoup de foi pour être évolutionniste !

Même les mutations brusques ne peuvent être la solution aux problèmes transformistes. Hugo de Vries l’espérait, quand il publia en 1901 à Leipzig Die Mutationstheorie. À défaut de transmettre ces « caractères acquis », une évolution aléatoire pourrait, pensa-t-il, faire surgir des caractères nouveaux, d’autant plus que les mutations sont fréquentes : selon Monod, sur les trois milliards d’êtres humains, on compte 100 à 1000 milliers de mutations par génération. Malheureusement, toutes sont régressives : il naît des sourds, des aveugles, des muets, des boiteux… on attend toujours le surhomme ! Et ici je parle des humains ; on pourrait bien sûr transposer cela pour les bactéries qui, comme dit plus haut, mutent plus facilement et ont une succession de générations beaucoup plus rapide. Jean Rostand écrivait : « Les mutations, que l’on veut rendre responsables de l’évolution du monde vivant, sont des privations organiques, des déficiences, des pertes de pigments ou des dédoublements d’organes : elles n’apportent rien de neuf, d’original sur le plan organique et fonctionnel, rien qui soit l’assise ou l’amorce d’un nouvel organe. Non, je ne puis me résoudre à penser que l’œil, l’oreille et le cerveau se soient formés de la sorte. » On connaît les mutations telles que le trèfle à 4 feuilles ou le mouton à 5 pattes. Loin de leur donner un avantage, ces mutations restent le fait d’individus isolés et n’affectent pas le type moyen de l’espèce. Rien qui puisse donc justifier une évolution progressive des êtres vivants. C. P. Martin, lui-même évolutionniste, a déclaré : «[…] toutes les mutations semblent être du domaine des dommages qui affectent dans une certaine mesure la fertilité et la viabilité des organismes concernés[15]. » Il est important de rappeler que l’idée de mutations favorables est la pierre angulaire de la théorie moderne de l’évolution, et ceci contre toutes les observations actuelles !

Avant de passer au point suivant, je tiens à dire qu’autant les archives fossiles que les méthodes de datation, la formation des premiers acides aminés dans la soupe prébiotique, l’homologie et tous les domaines de la science pourraient être abordés et discutés de la même manière ou mieux pour chaque fois arriver à la même conclusion : cela ne prouve en rien l’évolution ni ne la soutient, bien au contraire !

Exemples de mutations observées :

Développement du problème des végétaux : quelques histoires de fou !

Les plantes zoogames

L’histoire des orchidées (Ophrys insectifera ; Gorytes)

Les orchidées ont des étamines trop éloignées du pistil pour que la fécondation soit possible et elles ne fabriquent pas de nectar. Les abeilles, ces enragées pollinisatrices, n’ont donc aucune raison de s’y intéresser. Les fleurs ont donc dû “inventer” un autre dispositif. D’abord, il existe une espèce de guêpe dont les mâles naissent avant les femelles, le mâle ne tardant pas à être tourmenté par un besoin fougueux d’accouplement. Il cherche sans succès une femelle, mais que voit-il sur le calice des orchidées ? Des dessins assez précis qui simulent, tout au moins pour l’œil humain, un insecte posé sur la corolle. Et pour l’œil de la guêpe aussi, d’autant plus que l’on sait que deux plaques de la corolle sécrètent une odeur tout à fait analogue à celle des femelles. Le mâle, dans l’état de privation où il est, n’y regarde sans doute pas de si près et s’accouple avec la fleur. Naturellement, cela n’aura guère de suites pour lui mais il en est autrement pour l’orchidée : car, en se trémoussant, les pièces génitales du mâle ont accroché quelques masses polliniques et les ont collées sur le pistil. Un mois plus tard naissent les femelles de la guêpe ; mais alors toutes les orchidées sont flétries.

Mais si la guêpe est absente, l’orchidée n’est pas sans ressources ; elle peut faire appel à une certaine abeille solitaire dont les mâles ont bien besoin de ses bons offices. En effet, les femelles ne veulent pas les accepter s’ils ne sont point parfumés. Mais par eux-mêmes ils n’ont aucun parfum. Ils peuvent cependant recourir à l’orchidée, car ils savent (comment ?) qu’au fond de sa corolle se trouve une sécrétion huileuse que les femelles apprécient fort.

Ils s’enfoncent donc dans la corolle et commencent à racler le parenchyme parfumé dont les gouttes s’amassent dans deux gouttières de leurs tibias postérieurs que l’évolution ou une intelligence supérieure ou autre chose (à vous de choisir), a placées là justement pour s’emplir de la liqueur odorante. Quand les gouttières sont pleines, les mâles vont les vider devant les femelles qui leur accordent aussitôt leurs faveurs. On a deviné qu’au cours de leurs évolutions dans la corolle de l’orchidée, les mâles ont bien entendu détaché des masses polliniques dont l’une au moins a bien dû rencontrer le pistil de la fleur.

En passant, remarquons que dans la prairie même où fleurissent les orchidées, les pins et les noisetiers ont déjà fleuri. Ils ont émis en masse cette poussière jaune qu’est leur pollen et que le vent disperse très largement. Il atteindra sans faute les parties femelles qu’il doit féconder. Et qui peut dire que les pins ou les noisetiers sont en voie d’extinction ? Ils réussissent aussi bien que les orchidées avec un dispositif beaucoup plus simple. N’aurait-il pas été plus facile pour l’évolution de rallonger les étamines de l’orchidée, ou d’utiliser comme tant d’autres plantes la dispersion anémophile ?

Naturellement les théories évolutionnistes classiques n’ont pour ce phénomène précis que des explications verbales. Et Rémy Chauvin dit à ce propos, je cite : « Comment veut-on, même en allumant un buisson de cierges devant l’autel du dieu Hasard, que se soit réalisé par la sélection naturelle le dispositif le plus follement compliqué, impliquant en outre une “collaboration” entre deux êtres vivants qui se sont séparés de la souche commune il y aurait des centaines de millions d’années ? Qu’on prenne le fait comme on voudra, il est incompréhensible, dans l’état actuel de nos connaissances tout au moins[16]. »

La fiancée du yucca (Pronuba yuccasella)

Le Pronuba yuccasella est un petit papillon (Lépidoptère du groupe des Tinéidés) d’environ un centimètre. Il est inféodé aux fleurs du yucca, liliacée ligneuse de la partie occidentale de l’Amérique du Nord. Si bien que, sans lui, la plante ne peut former de graines : en effet son pollen gluant est trop éloigné du pistil et de plus, le yucca ne sécrète aucun nectar capable d’attirer les abeilles. Sans le concours de l’insecte, la plante est donc condamnée à la stérilité et réduite à se multiplier par la voie végétative. Inversement, l’insecte ne peut survivre sans avoir recours à la liliacée qui lui offre abri et nourriture. Par exemple si le climat est trop froid, le Pronuba ne peut vivre et le yucca ne donne pas de graines.

La fleur, grande, blanche et pendante, répond au plan structural habituel des liliacées et ne se distingue guère que par la conformation du stigmate profondément trilobé et creusé en entonnoir. Quant à l’insecte, il est remarquablement outillé pour effectuer la pollinisation croisée de ces plantes. De taille réduite, 13 millimètres de long, les femelles du Pronuba se distinguent de tous les autres lépidoptères par la présence d’un appareil permettant le ramassage du pollen : sur l’article basal du palpe maxillaire se développe un long appendice courbé, indistinctement annelé, le tentacule maxillaire ; garni sur sa face interne de courtes épines, il sert à collecter le pollen et à le transporter sur le stigmate.

Durant la journée, les insectes se cachent au fond de la fleur du Yucca ; ils en sortent au crépuscule pour voltiger aux alentours, les mâles recherchant les femelles pour les féconder. Après s’être fait féconder, la femelle de Pronuba se pose sur les anthères déhiscentes, et commence à collecter une boule de pollen. Cette boule est aussi grosse que sa tête et le papillon qui n’est pas très doué pour les manipulations aurait du mal à la maintenir sans cette sorte de pince courbe, qui l’aide à maintenir le pollen mais l’empêche de se nourrir. Elle va alors s’envoler avec la boule de pollen vers une autre fleur pour pondre ; dans la fleur elle enfonce alors son oviscapte dans la paroi ovarienne encore molle et dépose un œuf dans la cavité. La ponte effectuée, la femelle remonte la colonne stylaire et grâce à des mouvements précipités de la tête, elle introduit une fraction de sa provision pollinique dans un des trois sillons stigmatiques et dans le canal stylaire. Après un repos de 4 à 5 minutes, elle redescend au niveau de l’ovaire, y pond un deuxième œuf, puis remonte pour pourvoir le deuxième sillon stigmatique de pollen et la même opération se répète une troisième fois. Les larves éclosent dans la cavité ovarienne et se nourrissent aux dépens des ovules en voie de maturation. Comme chaque larve ne consomme en moyenne qu’une vingtaine d’ovules sur les deux cents que comporte un ovaire de Yucca et que le nombre de larves par ovaire dépasse rarement la demi-douzaine, un nombre suffisant d’ovules arrivent à se transformer en graines, assurant ainsi la conservation de l’espèce.

Lors des cours, nous avons encore vu l’exemple du gouet maculé, ou pied-de-veau, qui emprisonne des petits moustiques qui ne trouvent leur salut que lorsque la fleur fécondée est parvenue à maturité. Alors les portes de leur cachot s’ouvrent lorsque les poils flétrissent. Les moustiques, non contents d’avoir recouvré la liberté, se font piéger par la fleur voisine, et le cycle recommence ! Comment tout cela est-il apparu ? Une seule réponse honnête : cela est hors de portée du hasard ! Cette fichue question de la poule ou de l’œuf revient sans cesse… et pour cause ! De telles collaborations entre des êtres vivants séparés par des millions d’années, selon l’arbre généalogique habituel, sont incompréhensibles dans l’état actuel des connaissances scientifiques !

Conclusion

Le Professeur Michael Denton écrit :

« La thèse darwinienne selon laquelle le projet adaptatif de la nature tout entier est le résultat d’une recherche aléatoire est une des plus osées de l’histoire de la science. Mais c’est aussi une des moins bien fondées. Aucun évolutionniste n’a jamais produit la moindre preuve quantitative que les formes conçues par la nature sont à la portée du hasard.

Aucun biologiste n’a calculé la probabilité de découvrir par la recherche aléatoire, dans le temps limité imparti, les types de systèmes complexes omniprésents dans la nature. Même aujourd’hui, nous n’avons aucun moyen d’estimer de manière rigoureuse la probabilité ou le degré d’isolement ne serait-ce que d’une seule protéine fonctionnelle. Il est certainement un peu prématuré de prétendre que les moustiques et les éléphants ont été engendrés par des processus dus au hasard alors qu’on ne connaît pas encore les chances de découvrir fortuitement une seule molécule de protéine fonctionnelle !

En substance, il y a deux approches philosophiques du problème. D’une part, on peut adopter une position conservatrice et envisager les obstacles comme essentiellement mineurs, comme de simples anomalies énigmatiques, qui, d’une manière ou d’une autre, pourront être conciliées avec la théorie traditionnelle. D’autre part, on peut adopter une position plus radicale et envisager les problèmes non pas comme des énigmes, mais comme des contre-exemples ou des paradoxes qui ne seront jamais expliqués de manière satisfaisante dans le cadre darwinien ; on peut considérer ces problèmes comme les indices révélateurs d’un vice fondamental qui entache la théorie de l’évolution actuellement en vigueur[17]. »

La plupart des biologistes qui ont récemment écrit sur l’évolution reconnaissent la gravité de ces problèmes. La question reste donc largement ouverte. L’évolution n’est pas un dogme mais une hypothèse aujourd’hui en crise.

Je suis loin de prétendre avoir ébranlé vos convictions sur l’évolution. J’espère cependant avoir éveillé en vous un esprit dorénavant plus critique à l’égard de cette théorie, afin que si, un jour ou l’autre, vous êtes appelés à vous en occuper, vous ne retombiez pas dans les erreurs propagées, et qu’honnêtement, en vrai scientifique, vous puissiez dire ce qui est et non pas ce que vous désireriez croire. Donner son avis n’est pas faux, mais soutenir à tout prix et affirmer une théorie, en la portant au rang de dogme alors que contre-exemples sur contre-exemples voient le jour, est dommageable et malhonnête. Au lieu de faire avancer la science, cela ne fait que l’égarer toujours plus loin de la vérité.

Christian Glardon

Illustrations

  • Généalogie évolutionniste, p.2 de la couverture, «The revised QUOTE BOOK» (Creation Science Foundation Ltd 1990)
  • Portratis, p. 11, Sylvia Baker, «Bone of Contention. Is Evolution true ?» (Creation Science Foundation Ltd 1990), encyclopédie Larousse.
  • Coelacanthe, p.14. Michael Denton, « Evolution : Une théorie en crise », (Flammarion, 1985).
  • Collembole, p.14. A. Beaumont, P. Cassier, « Biologie Animale, des Protozoaires aux Métazoaires épithélioneuriens », Tome 2, (Dunod Université, 1983).
  • Mutations, p.18. Philip Stott, « Le mythe de l’évolution » (Éditions Empreinte, Mission Kwasizabantu, Poissy 1992)
  • Orchidée, p.19 (g.). Rémy Chauvin, « La biologie de l’esprit » (Éditions du Rocher, 1985).
  • Orchidée, p.19 (dr.). Traité de Zoologie, Tome VIII, P.-P. Grassé, (Masson, 1976).
  • La fiancée du Yucca, p. 21 (g.). Traité de Zoologie, Tome VIII, P.-P. Grassé, (Masson, 1976).
  • La fiancée du Yucca, p. 21 (dr.). Rémy Chauvin, « La biologie de l’esprit » (op. cit.).

Remerciements

Je suis particulièrement redevable :

  • à Sylvia Baker, une biologiste de l’université de Sussex, pour la partie historique de mon travail dont plusieurs éléments sont tirés d’une brochure, Bone of Contention. Is Evolution True ?, éditée par la Christian Science Foundation d’Australie ;
  • à Rémy Chauvin pour les points III et IV développés à partir de son livre La biologie de l’esprit. (Éditions du Rocher) ;
  • à Daniel Raffard de Brienne pour le passage consacré à la génétique tiré de sa brochure Evolution, mythe ou réalité ?, publiée dans Lecture et Tradition (jan.-fév. 1989, nº 143-144) ;
  • à Dominique Tassot pour le passage parlant de Hugo de Vries et pour quelques citations tirées de son livre, A l’Image de Dieu, (Éditions Saint-Albert, 1991).

[1]      Travail présenté à l’Institut de Botanique systématique et de Géobotanique de l’Université de Lausanne, au printemps 1995

[2]      Jean Rostand, L’évolution, Delphine, 1960. Louis Bounoure, The Advocate, Thursday 8 March 1984, p.17. Louis Bounoure était le président de la Société de Biologie de Strasbourg et directeur du Musée de Zoologie de Strasbourg, puis directeur de recherche au Centre National Français de Recherche Scientifique.

[3]      Michael Denton, Evolution : Une théorie en crise, Flammarion, 1985

[4]      Giuseppe Sermonti et Roberto Fondi, Dopo Darwin (Après Darwin), Rusconi, Milan, 1980.

[5]      Paul Lemoine dans L’Encyclopédie Française (1938).

[6]      Louis Bounoure, Recherche d’une doctrine de la vie chez les savants contemporains, Laffont 1964.

[7]      Yves Delage : L’hérédité est le grand problème de la biologie générale, 1903.

[8]      R. B. Goldschmidt, American Scientist, Vol. 40, Jan. 1952, p. 84.

[9]      Sol Tax : Issues in Evolution, Chicago, Chicago University Press, 1960.

[10]    Michael Denton, Évolution : Une théorie en crise, Flammarion, Paris, 1985.

[11]    Michael Denton, Évolution : Une théorie en crise, Flammarion, Paris, 1985.

[12]    Voyez à ce sujet les travaux de Guy Berthault sur la sédimentation expérimentale publiés dans Positions créationnistes, Nos 7 et 9, qui démontrent le caractère erroné de cette hypothèse.

[13]    Rémy Chauvin, La biologie de l’esprit, Éditions du Rocher, Monaco, 1985.

[14]    Waddington, The strategy of the genes, London, 1957

[15]    C. P. Martin, American Scientist, Vol. 41, Jan. 1954, p. 100.

[16]    Rémy Chauvin, La biologie de l’esprit, Éditions du Rocher, Monaco, 1985.

[17]    Michael Denton, Evolution : Une théorie en crise, Flammarion, 1985.