Deux espérances incompatibles

par | Résister et Construire - numéro 7

Quel règne de justice et de paix ?

La crise mondiale

Ce qui semble aujourd’hui le plus inquiéter les hommes, ce sont la détérioration de notre environnement par la pollution de l’air, de la terre et des eaux, la pauvreté, la faim et les injustices dont souffre une bonne partie de l’humanité ainsi que la menace d’une destruction du monde par les armes nucléaires. Nous vivons une crise globale prolongée dont l’issue paraît incertaine, ce qui donne lieu à des pronostics discordants. Aussi cherche-t-on à remédier à cette situation par divers voies et moyens. On multiplie les efforts et les manifestations en faveur de la paix, la justice et la sauvegarde de la création, thèmes dont se sont emparés autant les partis politiques que les églises « officielles » à la suite des écologistes – les verts – qui sont souvent plus rouges que verts !

Loin de nous la pensée de nier la réalité et la gravité de ces dangers, même si certains opportunistes les exploitent idéologiquement et commercialement. Les chrétiens sont tout autant concernés par ces risques que les autres habitants de la Terre, car nous sommes sur le même bateau !

Mais ce qui nous préoccupe encore plus que la sauvegarde de la nature et la survie de l’homme sur cette Terre, c’est le Salut éternel de cet homme, car que servirait-il à un homme de gagner le monde entier (et d’en faire même une sorte de paradis), s’il perdait son âme ? (Matthieu 16:26). Le matérialisme ambiant, la recherche d’un bonheur terre à terre et la méconnaissance des valeurs spirituelles éclipsent un autre aspect du problème. Les hommes ont préféré les ténèbres à la Lumière (Jean 3:19), l’esclavage du péché à la libération en Christ. Même la chrétienté a été pénétrée et envahie par la mondanité, l’immoralité et l’incrédulité, tout en restant en partie attachée à des formes extérieures de religiosité, gardant une apparence de piété, mais reniant ce qui en fait la force (II Timothée 3:5). Cette pollution des cœurs et des esprits est bien plus grave devant Dieu que la pollution de l’air et de l’eau. Mais qui s’en inquiète vraiment ?

Un nouvel âge ?

Il en est qui pensent que cette crise mondiale engendrera une nouvelle ère de paix, de justice et de bien-être général, si tous les hommes parviennent à s’unir pour conjurer les menaces de dévastation de notre Terre. On parle de la nécessité de créer une nouvelle conscience mondiale. Selon Marlyn Ferguson, l’une des autorités du mouvement New Age (Nouvel-âge)[1], une nouvelle et exaltante conception du monde serait née[2]. C’est aussi l’avis d’Aurelio Peccei, président du Club de Rome, qui préconise une nouvelle façon de penser pour sauver l’homme, un nouvel humanisme, une nouvelle échelle des valeurs[3]. Pour lui, les confessions de foi, principes et postulats, tabous, normes et valeurs qui façonnent notre pensée actuelle, sont absolument inaptes pour nous permettre de faire face aux exigences de notre temps. On cherche surtout à gagner les jeunes à ces nouvelles conceptions, car, dit A. Peccei, ils sont davantage prêts à se rencontrer par-dessus les différences (barrières) racistes, culturelles, sociales et sexuelles… La jeunesse possède encore un cœur pur…(!). Pour toutes ces raisons, elle peut devenir porteuse d’une nouvelle civilisation. Il s’agit de créer un nouvel ordre mondial par et pour une humanité unie. L’humanité se trouverait au seuil d’une mutation, à la veille de faire un saut dans son évolution vers un grandiose achèvement[4]. Remarquons que l’ONU nourrit la même espérance. Dès sa fondation elle prit comme devise Novus ordo secueorum (Nouvel ordre mondial). La Franc-maçonnerie, la Trilatérale[5] et autres institutions internationales politiques athées, religieuses ou occultes poursuivent, dans leur diversité, le même but. La révolution technologique que nous vivons actuellement offre de plus en plus la possibilité de réaliser au niveau mondial ce qui jusqu’à récemment se situait encore dans le domaine de la science-fiction. L’informatique généralisée semble pouvoir apporter les meilleures solutions à tous les problèmes sociaux, économiques, politiques et écologiques, mais au prix du conditionnement de toute l’humanité.

Et l’évolutionnisme ?

Tout cela se retrouve étrangement dans la perspective de l’évolutionnisme biologique qui se veut scientifique, et qui est à la base d’une idéologie ou d’une philosophie selon laquelle l’espèce humaine continuerait sa progression vers ce que Teilhard de Chardin appelait le point Oméga[6]. Ce savant jésuite pensait que rien dans l’univers ne résisterait à l’ardeur convergente d’un nombre suffisamment grand d’esprits suffisamment groupés et organisés. Il voyait partout des signes de mutation vers une grande unité entre les hommes et entrevoyait le sommet de l’unification mondiale par l’avènement de l’unanimité des consciences humaines. Les maux, souffrances, injustices et guerres ne seraient que des échecs provisoires dans un arrangement progressif qui devrait conduire au p61e ultime vers lequel tend toute l’évolution. Et quand les choses ne semblent pas aller assez vite par elles-mêmes, on a recours à la sélection dirigée que les nazis, de triste mémoire, ont appliquée à la vie humaine en exterminant les juifs, les ennemis du régime, les dégénérés physiques et mentaux, en empêchant les insuffisants de se reproduire et en favorisant la propagation de la race aryenne supposée pure et destinée à dominer le monde entier ! C’est là une autre voie pour essayer de parvenir à un ordre mondial nouveau. On voit à quelles aberrations peut conduire l’hypothèse évolutionniste, si elle n’est pas reconnue et dénoncée comme dangereuse[7]. Sans parler ici des manipulations génétiques, ou des interventions sur le patrimoine chromosomique, qui auraient pour but d’éliminer les tares héréditaires pour produire une génération d’hommes sains, voire de surhommes !

Et les “grandes” églises ?

Cet esprit Nouvel-Âge se manifeste aussi au sein de la chrétienté et des Églises. Depuis de nombreuses années déjà, le Conseil Œcuménique des Églises (COE) s’est exprimé à ce sujet. Pour lui le monde entier doit être transformé en peuple de Dieu[8]. A Uppsal (1973), Philip Potter, alors secrétaire général du COE, disait : dans un monde où tous les hommes tendent à réaliser leur humanité et dans lequel tous partagent leur désespoir et leur espoir, l’église chrétienne doit s’identifier avec la communauté de tous les hommes, si elle veut remplir sa mission de témoignage et de service[9]. L’actuel secrétaire général du COE, Emilio Castro, lorsqu’il était encore directeur de la commission œcuménique pour la mission, avait aussi déclaré que les chrétiens devraient travailler à la réalisation d’une communauté mondiale débarrassée de toute discrimination de races, de classes, de religions et de systèmes politiques et dirigée par un gouvernement mondial unique. Pour le professeur Jürgen Moltmann (Congrès mondial eucharistique de Melbourne, 1973), un gouvernement universel pourrait être réalisé à travers une église universelle[10].

Le magazine Terre Nouvelle édité en commun par le département missionnaire romand (DMR), l’Entraide protestante (EPER) et Pain pour le prochain (PPP) a, dès la sortie de son premier numéro (1979), fait paraître une déclaration signée par Philip Potter. Il y est dit, entre autres, que nous devons nous joindre à l’entreprise de Dieu en vue de créer une nouvelle terre où prévaudront la vérité, la justice et la plénitude de la vie. La foi conçue dans ce sens n’est plus un opium, mais bien plutôt un ferment puissant agissant conformément au dessein de Dieu de transformer le monde qu’il a créé en un royaume d’amour, de joie et de paix… C’est là notre vocation d’Église et de Chrétien[11].

En mai 1989 aura lieu à Bâle un Concile de la Paix, c’est-à-dire une grande conférence œcuménique sur le thème Paix, Justice et Sauvegarde de la Création. C’est la Conférence d’Églises Européennes (KEK) qui en est l’organisatrice (118 églises officielles et libres y sont affiliées) conjointement avec le Conseil des conférences épiscopales européennes[12]. Pour 1990 le COE prévoit de tenir une assemblée mondiale de toutes les églises chrétiennes, toujours sur le même sujet. L’Église catholique romaine a déjà accepté d’y participer. Cette assemblée se tiendra probablement à Séoul. Puis suivra, en 1991, l’Assemblée de Canberra (Australie) dont le thème sera : Viens, Esprit Saint, renouvelle toute la création. L’Église catholique romaine suit de près ce mouvement. Le pape Jean-Paul Il a déclaré : Notre avenir sur cette planète, menacée de destruction, dépend d’un seul facteur : l’humanité doit opérer un revirement moral. Aussi la pressante requête du Vatican est-elle d’unir tous les hommes, de toutes les nations, races et cultures dans un même esprit[13]. C’est dans cet esprit que le pape avait convoqué les représentants de toutes les religions du monde à une journée de prière pour la paix (Assise 1986). L’évêque du lieu déclara qu’à cette occasion la cité de Saint-François sera pour une journée l’autel du monde… pour donner voix à l’humanité croyante, en ajoutant : le monde, vraie Église vivante de Dieu, aura là son tabernacle visible[14]. Ainsi le monde devient la vraie Église de Dieu. De l’unité des Églises on passera à l’unité des religions mondiales et à la fraternité universelle !

Et les évangéliques ?

Par le dialogue, la collaboration ou les actions communes et autres rapprochements avec les grandes églises, bien des églises et assemblées évangéliques ont subi l’influence de cet esprit nouveau sans vraiment réaliser le danger qu’il représente. Le discernement semble souvent faire défaut. Au nom d’une certaine charité on n’ose plus signaler les égarements, ou plutôt on met en garde contre ceux qui se permettent encore de se distinguer en ne suivant pas la voie de tout le monde ! Les sentinelles ne sonnent plus de la trompette (Ézéchiel 33:2-6), ou bien on ne se laisse plus avertir, ou bien la trompette ne donne plus qu’un son confus (1 Cor. 14:8). On entend maintenant chez certains évangéliques les mêmes propos que ceux tenus par les grandes Églises. Voici, par exemple, ce que disait Billy Graham interviewé à l’occasion de son 60 anniversaire :

D’étonnants progrès scientifiques et une nouvelle conscience religieuse vont faire de la prochaine décennie une des plus exaltantes périodes de tous les temps. La visite du pape Jean-Paul Il en Amérique, qui a soulevé nos cœurs à tous, fut un des événements les plus importants sur le chemin du réveil religieux. La façon dont les gens ont accueilli le pape dans leur cœur me prouve que nous avons besoin d’une nouvelle ère de morale et de vie familiale stable. Les liens familiaux vont de nouveau se renforcer. En outre, je crois possible de grands progrès dans les efforts qui visent à produire un ralentissement du vieillissement, dès que les scientifiques auront trouvé une solution dans le domaine de la régénération des cellules. De nouvelles technologies dans l’industrie du bâtiment donneront à chaque famille la possibilité d’acheter la maison de son désir. Par ailleurs, on arrivera à trouver des moyens pour influer sur les conditions atmosphériques de toute la terre en vue d’obtenir une augmentation de la production alimentaire. Il y aura assez à manger pour chacun. Pour entrer dans ce nouvel âge d’or, l’homme devra se tourner vers Dieu. Quand cela aura lieu, Dieu exaucera nos prières pour la paix dans le monde des années 80. Alors pointera un temps nouveau de tolérance et de compréhension entre toutes les nations[15].

N’est-il pas troublant d’entendre Billy Graham dire que la visite du pape fut un des plus importants événements sur le chemin du réveil, alors que beaucoup d’évangéliques américains et autres considèrent ce genre de manifestations de masses plutôt comme une sorte de mystification ? Et que penser de cet âge d’or de prospérité, où chacun aura sa maison et vivra plus longtemps grâce à la régénération des cellules ? Nous sommes d’ailleurs parvenus à la fin des années 80 sans que la pauvreté, les injustices, la faim, la guerre et les tortures aient été supprimées et que nous ayons vu paraître cet âge d’or ! Paix, Paix, disent-ils ; et il n’y a point de paix. (Jérémie 6:14) Citons encore ce que proclamait l’Action Vie Nouvelle (Suisse romande 1985) : Dieu veut créer un monde et des hommes de qualité nouvelle… relations justes et réconciliées entre l’ensemble de la création, les hommes et Dieu[16].

Étranges convergences !

Ce qui frappe le plus dans toutes ces déclarations d’origines si variées, c’est leur étrange convergence. Toujours à nouveau il est question de terre nouvelle, de nouvel ordre mondial, de fraternité universelle, de paix, de justice et de sauvegarde ou même de rédemption de la création[17]. On rejoint ainsi ce que les sectes de tous les temps ont espéré et annoncé : un âge d’or. On pourrait citer ici Zoroastre, la littérature apocalyptique juive, le Montanisme, les Taboristes, certains anabaptistes (Thomas Münzer à Münster), les Témoins de Jéhovah, Amstrong (le monde à venir) et beaucoup d’autres faux prophètes. Or, ces mouvements ont généralement jailli en des périodes de crise, où ils répondaient aux aspirations d’hommes frustrés et inquiets qui espéraient trouver dans une ère nouvelle imminente tous les biens matériels et tout le bonheur dont ils ont été privés. Que de telles vues soient aujourd’hui accueillies favorablement dans presque toutes les classes de la société laïque et religieuse constitue un signe des temps à prendre au sérieux.

Mais que dit l’Écriture ?

 Au sujet de la sauvegarde de la création ?

L’homme a été appelé à assujettir la terre (Genèse 1:28), mais par sa désobéissance et sa chute (le péché) la mort est entrée dans le monde (Rom. 5:12) et toute la création en a été atteinte. Depuis ce jour, la création tout entière soupire et souffre en attendant d’être affranchie de la servitude et de la corruption et nous aussi, nous attendons la rédemption de nos corps mortels (Rom. 8:19-23). Mais il n’y aura de terre nouvelle et de corps nouveau que lorsque le Seigneur Jésus-Christ reviendra (Phil. 3:20-21), et avant qu’il ne revienne se produira une détérioration générale de la situation qui s’achèvera par un cataclysme cosmique. L’Apocalypse nous semble bien annoncer ces choses quand elle dit que sur un quart de la terre les hommes périront par l’épée, la famine, la mortalité… (Apoc. 6:8), que le tiers de la terre sera brûlé (Apoc. 8:7), le tiers des eaux pollué (Apoc. 8:11) et que finalement la terre et le ciel s’enfuiront devant la face de celui qui est assis sur le grand trône blanc (Apoc. 20:11). Tout est en voie de dissolution, et la terre, avec tout ce qu’elle renferme, finira dans le feu (II Pierre 3:7-12). Il n’y a donc aucune promesse pour la sauvegarde de la création, mais bien une promesse pour de nouveaux cieux et une nouvelle terre où la justice habitera, après que les cieux et la terre d’à présent auront été consumés (II Pierre 3:13 ; Apoc. 21:1).

Tout ceci ne veut évidemment pas dire que nous devons céder au fatalisme et ne pas nous préoccuper de la protection de l’environnement. Nous vivons sur cette terre et partageons à bien des égards le sort de nos contemporains. Dans une lettre que le prophète Jérémie adressa de la part de l’Éternel à son peuple en captivité à Babylone il disait : Recherchez le bien de la ville où je vous ai amenés en captivité, et priez l’Éternel en sa faveur, parce que votre bonheur dépend du sien (Jérémie 29:7). Aussi longtemps que Dieu nous laisse sur cette terre nous devons la cultiver (Genèse 3:23), l’entretenir et non la détruire. C’est le cadre dans lequel Dieu nous a placés et il nous appartient de le maintenir aussi propre et habitable que possible, sans toutefois nous bercer d’illusions quant à la destinée.

Au sujet d’une fraternité universelle dans la paix et la justice

Nous sommes aussi pour la paix et pour la justice. Mais voici que l’Écriture nous dit qu’on entendra encore parler de guerres et de bruits de guerres (Matthieu 24:6) et quand les hommes diront : paix et sécurité ! une ruine soudaine les surprendra (1 Thess. 5:3). Or, ne parle-t-on pas plus que jamais de paix et de sécurité de nos jours ? Nous devons, certes, faire œuvre de paix (Matt. 5:9) et, s’il est possible, être en paix avec tous les hommes, autant que cela dépende de nous (Rom. 12:18). Nous devons aussi pratiquer la justice (Michée 6:8) en aimant notre prochain comme nous-mêmes (Jacques 2:8). Mais tout cela ne peut se réaliser que dans la mesure où nous avons fait premièrement la paix avec Dieu par le sang de la croix (Col. 1:20), et où par la grâce divine nous avons appris à vivre dans le siècle présent selon la sagesse, la justice et la piété, en attendant la bienheureuse espérance, et la manifestation de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ (Tite 2:11-13). Mais la paix que Dieu nous donne n’est pas celle que le monde recherche. A ce propos Jésus a bien dit : Je vous donne ma paix. Je ne vous donne pas comme le monde donne. Que votre cœur ne se trouble point et ne s’alarme point (Jean 14:27)… mon Royaume n’est pas de ce monde (Jean 18:36). N’oublions jamais que le royaume de Dieu n’est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie par le Saint-Esprit (Rom. 14:17), et qu’il ne vient pas de manière à frapper les regards. On ne dira pas : il est ici, ou il est là. Car voici, il est au milieu de vous (ou en vous) (Luc 17:21).

Ce royaume s’est, certes, étendu jusqu’aux extrémités de la terre en gagnant individuellement des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple et de toute nation (Apoc. 5:9) pour en faire un peuple de rachetés, mais cela ne conduira pas à la transformation du monde en un royaume d’amour, de joie et de paix dont rêvent beaucoup. L’Écriture prévoit, au contraire, que l’iniquité s’accroîtra et que l’amour se refroidira (Matt. 24:12). Dans les derniers jours, il y aura des temps difficiles. Car les hommes seront égoïstes, amis de l’argent, ingrats, irréligieux, insensibles, déloyaux, calomniateurs, intempérants, cruels, ennemis des gens de bien, traîtres, emportés, enflés d’orgueil, aimant le plaisir plus que Dieu, ayant l’apparence de la piété, mais reniant ce qui en fait la force. Éloigne-toi de ces hommes-là ! (II Timothée 3:1-5) Et Paul ajoute que les hommes ne supporteront plus la sainte doctrine et se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs en détournant l’oreille de la vérité (II Tim. 4:3-4). Ce sera l’apostasie (l’abandon, le rejet) qui précédera l’arrivée de l’homme impie, de l’antéchrist (II Thess. 2:3-10). On comprend pourquoi Jésus a dit un jour : Mais quand le Fils de l’homme paraîtra trouvera-t-il la foi sur la terre ? (Luc 18:8). L’âge d’or annoncé et espéré par bon nombre de nos contemporains est donc une utopie. Ce sera plutôt le règne de l’antéchrist qui marquera la fin des temps avec la bête que tous les habitants de la terre adoreront, ceux dont le nom n’est pas écrit dans le Livre de Vie (Apoc. 13:8). Cette puissance mondiale, cette fraternité universelle se situera dans le cadre de Babylone, la grande, dont la chute est décrite dans Apocalypse 18. Puissions-nous entendre la voix du ciel nous dire : Sortez du milieu d’elle, mon peuple, afin que vous ne participiez pas à ses péchés, et que vous n’ayez point part à ses fléaux (Apoc. 18:4).

Conclusion

Il y a donc manifestement deux optiques incompatibles. L’une, utopique, voit l’avenir en rose, culminant en un âge d’or de prospérité et de bonheur. Certaines réalisations humaines semblent, par moment, confirmer cette vue. L’autre, biblique, discerne une dégradation générale de la société humaine qui s’achèvera par une déflagration universelle.

Pas de fatalisme

Contrairement à ce que l’on pourrait supposer ou craindre, cette dernière perspective ne devrait pas plonger les chrétiens avertis dans le désespoir et l’inertie. L’apôtre Pierre écrivait à ce sujet : Puisque tout cela est en voie de dissolution, combien votre conduite et votre piété doivent être saintes ! (II Pierre 3:11) Et Jésus lui-même, après avoir annoncé les graves événements de la fin des temps, disait : Lorsque ces choses commenceront à arriver, redressez-vous et levez vos têtes, parce que votre délivrance approche (Luc 21:28). Ne cédons donc pas à la panique, Dieu est souverain et toutes choses lui sont soumises, même si nous ne le voyons pas encore maintenant (Hébreux 2:8). C’est son dessein qui s’accomplira (Prov. 19:21), même si la bête semble pour un moment triompher des saints (Apoc. 13 : 7), c’est finalement l’Agneau qui vaincra, et ses fidèles avec lui (Apoc. 17:14).

Nos responsabilités

N’oublions toutefois pas qu’en attendant cette délivrance et ce triomphe final, nous demeurons le sel de la terre et la lumière du monde (Matt. 5 : 13-14), et que nous avons en tant que tels à assumer nos responsabilités dans la société humaine. Il en est comme de notre corps. Tout en sachant qu’il est exposé à la décrépitude et qu’il devra un jour mourir, nous faisons tout en notre pouvoir pour le maintenir en vie et en santé. Il est le temple du Saint-Esprit (1 Cor. 6:19), ou le temple de Dieu, et si quelqu’un détruit ce temple, Dieu le détruira (1 Cor. 3 : 17). Tout en réalisant que nos biens matériels se dégradent au fil des jours, nous en prenons soin, afin de pouvoir en user aussi longtemps que possible. De même, quoique la terre qui nous porte soit vouée au feu, nous en sommes les habitants, les gérants et les bénéficiaires qui devons veiller à sa préservation, et non hâter sa destruction par nos négligences et notre égoïsme. C’est à ce niveau que se situent pour nous tous les problèmes écologiques, sociaux, éthiques et même politiques[18] de ce monde. Et si le Seigneur nous ordonne de sortir de Babylone (II Cor. 6:14-18), il ne veut pas pour autant nous faire sortir du mondé (Jean 17:15). Au milieu d’une génération perverse et corrompue il nous faut plutôt briller comme des flambeaux portant la Parole de vie (Phil. 2 : 15-16). C’est là notre véritable et noble vocation chrétienne. Ayons soin de l’honorer en tout temps ![19]

Jean Hoffmann[20]

[1]      Voir « Le Nouvel Age » de Paul Ranc dans la B.N.5/1987.

[2]      Voir « Die sanfte Umdeutung » de Horst Afflerbach, R. Brockhaus Verlag, Wuppertal.

[3]      « Die Zukunft in unserer Hand »

[4]      Comme sous (2)

[5]      Voir « Les véritables maîtres du monde » (Sociétés occultes, technocrates internationaux, oligarchies financières, nomenklaturas totalitaires). La Trilatérale est formée de personnes très importantes, placées aux rouages des États et qui entendent établir un Ordre mondialiste par le consentement ou par la force

[6]      Pierre Teilhard de Chardin, jésuite, géologue et paléontologiste.

[7]      Voir « Il faut beaucoup de foi pour être athée » (Ralph Shallis) p. 103

[8]      Déclaration de « Mission d’évangélisation » dans IDEA-Spektrum No 3/1988.

[9]      Comme sous (2)

[10]    Voir « La Bonne Nouvelle » 1/1974 sous « Le Salut aujourd’hui ».

[11]    La B.N. 5/1979 sous « Quelle terre nouvelle ? ».

[12]    IDEA-Schweiz No 3/1988.

[13]    « Appell an alle » I.A.B.C., Wuppertal p. 54.

[14]    La B.N. 2/1987 sous « Œcuménisme planétaire à Assise ».

[15]    « Welt am Sonntag » du 4-11-1979 (Cité dans (2)).

[16]    Info-AVN No 5, septembre, 1985

[17]    « La Vie Protestante » du 26 août 1988, sous « Comité central du COE, Hanovre ».

[18]    Politique dans le sens le plus large du grec politikos, de poli = cité, tout ce que concerne la vie publique.

[19]    Reproduit avec autorisation de la « La Bonne Nouvelle » No 1 Janvier-Février 1989

[20]    Jean Hoffmann est pasteur de l’Église évangélique baptiste de Tramelan et rédacteur de « La Bonne Nouvelle ».