Les fondements de la loi ébranlés (II)

par | Résister et Construire - numéro 7

Erreurs morales

Nous en venons à la deuxième cause de la faiblesse des Églises Protestantes depuis la fin du XVII siècle. Avec le Concile Vatican II l’Église Catholique a rejoint le grand courant d’idéalisme protestant que nous examinons ici. Le renouveau évangélique de piété personnelle des XVIIIe et XIX siècles, dont nous avons parlé, qui était une réaction contre la sclérose d’une religion devenue essentiellement formaliste et rationaliste, n’a pas su briser le schéma philosophique idéaliste du temps où il fut né. En fait le piétisme adopte en gros la distinction kantienne typique de l’idéalisme, distinction entre ce que Kant appelle le nouménal – ce qui concerne Dieu – et le phénoménal – ce qui concerne le monde directement observable. Seul le « phénoménal » est connaissable rationnellement. Le piétisme a simplement transposé le nouménal dans le spirituel et le phénoménal dans le domaine du matériel, du social, du politique, etc. Il s’agit d’une erreur bien plus ancienne, erreur revenue à la vie avec l’époque moderne. C’est l’erreur du platonisme valorisant les idées au dépens de la matière. Ainsi un courant gnostique dans l’Église de Dieu a œuvré à dévaloriser la doctrine biblique de la bonté de la création de Dieu, de la bonté de tout ce que Dieu avait fait, nos corps et la matière elle-même. Ce courant, avec le piétisme, a inventé une religion de type angélique uniquement centrée sur le domaine « céleste », oubliant que le Royaume des cieux a quelque chose de très réel à faire déjà aujourd’hui avec la terre. Dans une telle perspective, le Royaume de Dieu, où la volonté divine doit s’accomplir maintenant déjà sur la terre comme au ciel, est oublié en faveur d’une vision amoindrie de l’unique nécessaire, le salut personnel du chrétien. Celui-ci se retire du monde dans son Église, travaillant essentiellement à y attirer le plus d’hommes possibles en attendant avec impatience l’ « enlèvement de l’Église » et un règne de Dieu qui serait uniquement à venir. C’est tout le côté combatif et conquérant du Christianisme qui est évacué.

Cet esprit chrétien combatif animait au plus haut point un Jean Calvin. Dans son traité « Contre la secte fantastique et furieuse des libertins qui se nomment spirituels[1] », texte d’une actualité étonnante et qui aurait pu être écrit pour notre époque permissive et illuministe, Calvin définissait ainsi la tâche du pasteur face aux semeurs d’erreurs dans l’Église :

« Quand quelque méchante secte et pernicieuse commence à pulluler et principalement quand elle croît, l’office de ceux que notre Seigneur a établis pour l’édification de son Église, est d’aller au-devant et de la repousser vivement avant qu’elle ne se fortifie pour gâter et corrompre davantage. Et, de fait, puisqu’ils sont pasteurs de l’Église, il ne suffit pas qu’ils proposent et administrent la bonne pâture au troupeau de Jésus-Christ s’ils ne font aussi le guet sur les loups et les larrons afin de crier contre eux et les chasser arrière du troupeau s’ils en voulaient s’approcher. Combien qu’à proprement parler les hérétiques ne sont pas seulement comme larrons ou loups mais beaucoup pires, d’autant plus qu’ils corrompent la sainte Parole de Dieu ils sont comme empoisonneurs, meurtrissant les pauvres âmes, sous ombre de les paître et leur présenter bonne viande[2]. »

Ces libertins du XVIᵉ siècle que Calvin attaquait si rudement étaient les ancêtres des erreurs que nous essayons de combattre ici. Calvin écrivait de ces libertins :

« Car ils font croire que l’homme se tourmente en vain s’il fait scrupule de rien mais que chacun se doit laisser muer par son esprit. Ainsi ils confondent tout ordre, se moquant tant de la crainte de Dieu qu’ont les fidèles et du regard de son jugement, que de toute considération d’honnêteté humaine. Et c’est la liberté qu’ils promettent, qu’un homme soit tellement adonné à tout ce que son cœur désire et convoite, qu’il ne fasse difficulté aucune, comme s’il n’était sujet à loi ni à raison[3]. »

C’est cette volonté de se libérer des limites objectives, c’est-à-dire extérieures à nous-mêmes, de la « loi et de la raison » qui a caractérisé la pensée philosophique idéaliste qui a exercé une influence si néfaste sur la théologie protestante moderne et sur le cadre dans lequel se sont moulés la plupart des réveils évangéliques des derniers siècles.

Un exemple particulièrement frappant de ce phénomène se trouve dans les écrits d’Agénor de Gasparin. De Gasparin fut un remarquable apologète du réveil évangélique qui marqua la première moitié du XIX siècle en Suisse romande et en France. Il a, en outre, entrepris une défense vigoureuse de l’inspiration des Écritures contre les attaques des libéraux de son temps[4]. Par ailleurs il a écrit de nombreux ouvrages de morale pratique, particulièrement sur la famille, qui sont d’un intérêt toujours actuel. Mais nous pouvons déceler dans ces ouvrages une faiblesse doctrinale et intellectuelle due à une méconnaissance de la manière dont des Calvin ou des Viret appliquaient de façon pratique les enseignements précis de la Parole de Dieu aux questions éthiques. Ce défaut devient flagrant dans son ouvrage d’éthique générale où l’absence de fondement précis de sa réflexion éthique dans la loi de Dieu fausse complètement sa perspective. Dans cet ouvrage monumental – près de mille pages – la loi de Dieu n’apparaît quasiment pas[5]. Elle n’est presque jamais citée ni même mentionnée. Dans l’esprit du XIX siècle la « liberté » devient le fondement et le but de la morale chrétienne. La morale est entièrement fondée sur des normes subjectives : la conscience, le sentiment du devoir, le sens inné du bien et du mal. Des critères subjectifs sont ainsi érigés en absolus. L’impératif catégorique subjectif de Kant remplace les normes objectives définies par la loi de Dieu. Dans la partie de son ouvrage consacrée aux fondements de l’éthique chrétienne intitulée « les causes de la liberté » de Gasparin ne mentionne même pas la loi de Dieu. Les sujets abordés dans cette section de son ouvrage sont particulièrement éloquents. Il s’agit de : Dieu (8 pages) ; le devoir ; la conviction ; la lutte intérieure ; le respect de soi ; les séductions de la défaite ; la famille ; les affections éternelles ; la bonté ; le travail ; le recueillement ; la liberté dans l’éducation. Il faut rappeler qu’Agénor de Gasparin n’était aucunement un « libéral », mais plutôt l’un des champions les plus intrépides de ce que l’on appellerait aujourd’hui une ligne fondamentaliste dure et du maintien des Églises hors de toute ingérence de l’État. Il était, en plus, un philanthrope éclairé, fondateur de l’hôpital de « La Source » à Lausanne. Mais sa « Bible infaillible » lui était d’une piètre utilité sur le plan pratique, moral et politique. Ayant évacué la doctrine biblique de la loi de Dieu, il ne savait plus comment utiliser la Parole de Dieu comme lumière sur son chemin. S’il en était ainsi des meilleurs chefs du Réveil, que devait-il en être des autres ? Même des hommes plus strictement calvinistes – et bien injustement tombés dans l’oubli – tels César Malan, J. Merle d’Aubigné ou Louis Gaussen ne savaient pas comment utiliser la loi biblique comme source divine de la morale et du droit. La Parole de Dieu si vaillamment défendue par ces chrétiens courageux ne semblait plus pouvoir servir comme lumière du monde et sel de la terre.

La seule exception à cet aveuglement et à cette paralysie éthique évangélique – et exception encore bien partielle – est celle d’Alexandre Vinet qui, lui, renouait, grâce à son immense culture et à sa foi combative, avec la tradition royale de réflexion chrétienne réaliste en morale et en politique. A la fin de sa vie et à la veille de son dernier combat contre les prétentions totalitaires d’un État de Vaud soumis aux influences conjuguées de l’hégélianisme et de la Franc-Maçonnerie laïciste d’un Henri Druey, Vinet écrivait :

« Le droit, même avec son cortège de sanctions pénales, n’est point une arme charnelle : ce n’est que la justice armée, et, pour être armée, en est-elle moins la justice ? Est-ce sa faute si elle est armée ? Et veut-on, pour lui maintenir sa pureté, qu’elle demeure à l’état de simple idée ? Maintenir la loi et retrancher la peine, c’est nier que le gouvernement civil soit une institution divine, car il embrasse indissolublement la loi et la peine[6]. »

Nous retrouvons de pareilles faiblesses éthiques évangéliques dans les publications issues du Réveil de la Drôme du début de ce siècle. Pierre Caron, par exemple, dans une critique fondée du Christianisme social datant de 1931 ne voyait pas comment répondre bibliquement aux questions sociales, politiques et économiques soulevées par ses adversaires libéraux[7]. Ces chrétiens sociaux libéraux, même s’ils avaient tort de traiter ces questions selon l’esprit du temps fortement opposé à la pensée biblique, avaient du moins le mérite de les poser. Là aussi nous voyons chez Caron une défense judicieuse de l’inspiration de la Bible et des doctrines centrales du salut ne servir à rien pour donner un éclairage véritable sur les questions économiques, sociales et politiques combien importantes des années trente. Il n’avait jamais appris comment employer l’épée de l’Esprit, la Parole-Loi de Dieu, comme instrument de discernement entre le vrai et le faux dans tous les domaines de la pensée humaine. Cette épée redoutable, nous dit la Bible, ne saurait être utilisée que par des hommes faits, exercés par la pratique à trancher entre le bien et le mal (Hébreux 4:12 ; 5:11-14).

Il faut en effet insister sur ce point. Depuis le siècle des lumières – et déjà dans une certaine mesure avant – les évangéliques dans leur ensemble ont adopté le schéma fondamental d’Emmanuel Kant. Rappelons brièvement que pour Kant il existe un dualisme radical entre Dieu et sa création, non pas sur le plan Créateur/créature mais sur celui de la connaissance. Pour lui Dieu est inconnaissable, mais accessible à une communion mystique incommunicable rationnellement, incompréhensible intellectuellement et parfaitement irrationnelle. Par contre la création, elle, est du domaine du connaissable. Mais si la raison a prise sur ce monde des phénomènes, la connaissance que l’on en retire ne saura jamais être « vraie », c’est-à-dire se rapporter à la « Vérité » en elle-même inconnaissable du nouménal, de Dieu. Pour employer les termes mêmes de Kant les phénomènes ne révèlent jamais le noumène et le noumène ne peut jamais communiquer quoi que ce soit d’intelligible sur les phénomènes. C’est-à-dire, Dieu ne se révèle jamais et ni la création, ni la Bible, ni le Fils de Dieu fait homme lui-même ne peuvent jamais nous dire quelque chose de vrai, au sens absolu, ni sur Dieu, ni en fait sur quoi que ce soit. Certes les évangéliques issus de nos réveils modernes n’accepteraient pas un système dualiste pareil tel quel. Pour eux la Bible donnait une connaissance vraie de Dieu et de son œuvre rédemptrice. Nous pouvons être sûrs de ce que la Bible nous déclare concernant notre salut éternel. Ces certitudes permettent une réelle assurance quant au salut. Mais cette certitude se limite à ce domaine religieux seul. Les évangéliques ont par contre inconsciemment accepté la séparation kantienne entre le noumène et les phénomènes, séparation qu’ils transposaient sur les plans spirituels et temporels, opposant le religieux au profane, l’Église à tout le monde politique, social, culturel, artistique, scientifique, etc. Le peintre chrétien Eugène Burnand résumait fort bien ce point de vue dans une lettre adressée au pasteur R. Guisan :

« Permettez-moi de vous le dire, cher ami, ce subjectivisme, cet évolutionnisme religieux qui gagne les esprits, j’ai mille peines à les admettre. Je ne puis concevoir que ce qui a été vrai un jour ne le soit plus deux mille ans après. Cette notion, en me gâtant complètement le passé, ne me donne aucune confiance dans le présent. J’ai besoin de trouver l’absolu dans le domaine religieux, laissant à la science humaine, a la politique, à l’art, les clartés vacillantes du relatif[8]. »

Rien ne saurait être plus « évangélique » ; mais rien ne saurait plus clairement nier l’autorité de Dieu sur toute la création, nier que la vérité biblique nous donne des lumières sûres pour toutes les activités des hommes. En identifiant le sens du mot « cosmos », que l’on traduit par « monde », avec le système mauvais du royaume de Satan, on oublie tout simplement que ce mot souvent indique dans la Bible la notion d’univers, de création de Dieu, de terre, toutes choses qui appartiennent de droit à Dieu leur créateur et qui sont appelées à être sanctifiées en vue de la restauration de toutes choses à la fin des temps.

Dans cette perspective évangélique et fondamentaliste kantienne les domaines « religieux » et « profane » sont imperméables l’un à l’autre. Ce piétisme dualiste des chrétiens du XIX et du XX siècles a été une des causes fondamentales des succès effrayants remportés par les vagues successives, apparemment irrésistibles, d’un humanisme de plus en plus sécularisé, athée, hostile à Dieu et à tous les aspects de l’ordre de sa loi pour la création. Contre des ennemis tels que la Franc-maçonnerie, le socialisme humaniste ou le communisme athée, le Christianisme piétiste n’a guère fait le poids. La force de ces mouvements de plus en plus explicitement anti-chrétiens, provenait surtout du fait que les chrétiens envoûtés par le dualisme kantien leur ont abandonné sans combat tout le terrain d’un monde prétendument mauvais. Le chrétien piétiste se faisait ainsi l’allié objectif du Prince de ce monde, oubliant ces vérités élémentaires : que notre foi est victorieuse du monde et que tout pouvoir a déjà été donné au Christ, sur la terre et au ciel. Il ne faudrait quand même pas oublier que la création appartient doublement à Jésus-Christ : comme Créateur et comme Rédempteur.

Conclusion

Tous ces maux nous viennent de notre attitude à l’égard de la seule base possible à la morale et au droit : La loi de Dieu. Ce n’est pas la « connaissance », même des choses de Dieu, qui nous sauvera. C’est la foi en Jésus-Christ, la foi en la Vérité qu’il est et qu’il nous révèle pour toutes choses, qui nous sauvera, et avec nous, toute la création qui gémit dans les chaînes que lui a forgées l’iniquité de l’homme. Et cette foi est inséparable de la fidélité, de l’obéissance à la pensée, aux paroles, aux ordres de Jésus-Christ, à la loi de notre Dieu. La vraie foi implique toujours l’obéissance, et une obéissance dans tous les domaines où Dieu a parlé. Là où il n’y a pas d’obéissance aux ordres de Dieu – c’est-à-dire, là où manquent les œuvres de la foi conformes à la loi de Dieu – là nous dit Jacques, il n’y a tout simplement pas de foi du tout. La connaissance enfle, nous dit l’Écriture, mais l’amour édifie. Mais qu’est-ce que l’amour sinon d’abord l’obéissance aux commandements de Dieu ? La vraie foi, elle, produit des fruits. Elle produit ce fruit conquérant qu’est notre obéissance fidèle et toujours plus complète à la loi divine dans tous les aspects de notre vie. Cette loi est une lumière à nos pieds. C’est elle qui définit en vérité le chemin étroit qui mène à la vie. Alexandre Vinet le voyait bien quand il reprochait aux réveils de son temps de méconnaître la loi de Dieu. Il voyait bien que la foi pratique, la seule véritable, était celle qui était obéissante à la loi de Dieu. C’est cette foi pratique qui a renversé le paganisme qui dominait l’Empire romain, qui a bouleversé le courant humaniste qui menait le XVI siècle naissant à l’anarchie d’une société permissive. C’est cette même foi exercée dans notre vie de tous les jours que Dieu veut employer aujourd’hui comme levier entre les mains de son Église confessante et combattante pour renverser cette puissance humaniste malfaisante qui règne sur toutes nos nations en usurpateur illégitime nuisible, et pour manifester de manière éclatante les prémices du Royaume de Dieu sur la terre.

Se plaçant du point de vue des implications de ce dualisme sur le plan de notre attitude à l’égard de l’activité chrétienne dans le domaine scientifique et, plus spécifiquement, de notre attitude envers le cosmos créé par Dieu et promis à une restauration parfaite au retour du Christ, Pierre Marcel écrit :

« Une conception dualiste de la régénération a été et reste la cause d’une rupture entre la vie de la nature et la vie de la grâce. Qui concentre son effort sur la contemplation des choses célestes et de la seule grâce salvatrice, néglige l’attention que requiert le monde de la Création. La surestimation des choses éternelles conduit à une sous-estimation des choses temporelles et de la grâce commune. L’adoration mystique pour le Christ seul aboutit pratiquement à l’exclusion de Dieu le Père tout-puissant, Créateur du Ciel et de la Terre. Bien des sectes s’y sont fourvoyées qui, concevant le Christ exclusivement comme le Sauveur des âmes ou de nos personnes, le dépouillent de toute signification cosmique. La rédemption ne se limite pas au salut des pécheurs individuels : elle vise, en effet, le monde tout entier, la « réunion organique », la récapitulation de toutes choses dans les cieux et sur la terre sous l’autorité de son Chef, le Christ (Éphésiens 1:10), qui a annoncé la régénération du cosmos tout entier, « le renouvellement de toutes choses, lorsque le Fils de l’homme sera assis sur le trône de sa gloire…» (Matthieu 19:28). « C’est avec un ardent désir que la création attend la révélation des enfants de Dieu », déclare l’apôtre Paul (Romains 8:19,21), à la liberté glorieuse desquels elle aspire à prendre part. Dans l’Apocalypse, c’est « Celui qui a créé le ciel et tout ce qu’il contient, la terre et tout ce qu’elle renferme, la mer et les choses qui s’y trouvent » (10:6) qui, avec l’Agneau, reçoit « la louange, l’honneur, la gloire et la force aux siècles des siècles » (5:13). L’Apocalypse retourne ainsi au point de départ de la Genèse : « Au commencement Dieu créa le ciel et la terre… » (Genèse 1:1). La rédemption du Christ telle qu’elle est réalisée et prophétisée dans l’Écriture ne vise pas seulement l’inauguration d’un Royaume spirituel pour y recueillir les âmes sauvées, mais la restauration du cosmos tout entier, quand Dieu sera tout en tous, sous de nouveaux cieux et une nouvelle terre[9]. »

Si l’Agneau est jugé digne d’ouvrir le livre et ses sept sceaux, c’est parce qu’il a été immolé et qu’il a racheté de son sang « des hommes de toute tribu, de tout peuple et de toute nation » afin de les constituer en un royaume et des sacrificateurs pour Dieu avec qui ils régneront ‘sur la terre (Apocalypse 5:9-10). Car au vainqueur, à celui qui garde les œuvres du Christ jusqu’à la fin sera donné l’autorité sur les nations (Apocalypse 2:26). Si les nations se sortissent irritées contre Dieu et qu’elles devront, en conséquence, être jugées par Lui (Apocalypse 11:18), ce n’est aucunement en vue de leur anéantissement total, de leur simple destruction. Il faudra certes, que le Fils de Dieu et ses enfants fassent paître les nations d’une verge de fer (Apocalypse 12:5) car la bête exercera le pouvoir maléfique de Satan sur toute tribu, tout peuple, toute langue et toute nation (Apocalypse 13:7 ; 17:15 ; 20:3 et 8), toutes ayant été séduites par les sortilèges de Babylone, la grande prostituée, dont le destin est de leur faire boire le vin de la fureur de son inconduite (Apocalypse 14:8 ; 18:3 et 23). Cette perversion universelle vaudra aux nations de boire une autre coupe, celle de l’ardente colère de Dieu, mais de même que le jugement de feu par lequel doit passer la création matérielle n’est aucunement sa fin ultime, de même pour les nations – qui, rappelons-le, font partie de la création de Dieu – ce jugement nécessaire n’est nullement la fin de leur histoire. Au travers des rachetés toutes les nations viendront se prosterner devant Dieu, car sa justice aura été manifestée (Apocalypse 15:4). Toutes les nations feront partie des nouveaux cieux et de la nouvelle terre ; et les feuilles de l’arbre de vie qui se trouve dans la nouvelle Jérusalem serviront à la guérison de toutes ces nations (Apocalypse 22 : 2).

Là il n’y aura plus d’anathème (Apocalypse 22:3), car il n’entrera dans la ville sainte où se trouvera le trône de Dieu et de l’Agneau rien de souillé, ni personne qui se livre à l’abomination et au mensonge mais seuls ceux qui sont inscrits dans le livre de vie (Apocalypse 21:27).

« La ville n’a besoin ni du soleil ni de la lune pour y briller, car la gloire de Dieu l’éclaire, et l’Agneau est son flambeau. Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre y apporteront leur gloire. Ses portes ne se fermeront point pendant le jour, car là il n’y aura point de nuit. On y apportera la gloire et l’honneur des nations ». Apocalypse 21:23-26

Ainsi s’accomplira la restauration de toutes choses et les nations elles-mêmes participeront à cette récapitulation finale ! Le Christ sera alors effectivement tout en tous et la création rétablie toute entière proclamera la gloire de son Créateur et Sauveur, Père, Fils et Saint-Esprit auquel sont la puissance, l’honneur et la gloire aux siècles des siècles, Amen.

Jean-Marc Berthoud

[1]      Jean Girard (Genève) 1545

[2]      Jean Calvin : Opera omnia Volume VII, colonne 150

[3]      J. Calvin : op. cit. colonnes 155-156

[4]      . de Gasparin : Les écoles du doute et l’école de la foi Michel Lévy (Paris) 1855,431 p. A. de Gasparin : La Bible. Calmann Lévy (Paris) 1880, 2 vol.

[5]      A. de Gasparin : La liberté morale, Michel Lévy (Paris), 1875,2 vol. Nous retrouvons des erreurs très semblables à notre époque. Voyez E. Fuchs : La morale selon Calvin, Cerf (Paris), 1986. C. Spicq : Théologie morale du Nouveau Testament Gabalda, Paris, 1970 (2 voL). C. Spicq : Connaissance et morale dans la Bible Cerf, Paris, 1985, ainsi que ceux du pasteur évangélique. F. Lacueva : Bien vivre sa vie Grâce et Vérité, Mulhouse, 1983. Jacques Ellul : L’éthique de la liberté. Labor et Fides, Genève, 1973-1984, 3 vol. Tous parviennent à une « éthique » chrétienne (catholique, évangélique ou réformée) en évacuant la loi de Dieu

[6]      A. Vinet : La persécution et le droit (1844) in : Nouvelles études évangéliques, Paris, 1851, p. 393.

[7]      Pierre Caron : La Prophétie devant l’Église et la société. in : Le Prophétisme du Réveil. Le Matin Vient (Dieu le fit) 1931.

[8]      René Burnand : Eugène Burnand – L’homme, l’artiste et son œuvre. Berger Levrault (Paris), 1926, p. 81.

[9]      Pierre Marcel : Calvin et Copernic. La légende et les faits. La science et l’astronomie chez Calvin. La Revue Réformée, N° 121, 1980/1 p. 47-48. Voyez aussi les travaux de Pierre Courthial un des meilleurs éthiciens de notre époque. Pierre Courthial : Fondements pour l’avenir. Editions Kerygma, Aix-en-Provence, 1981.