Imaginez la scène : un froid matin de janvier, la cour d’une prison de Floride… un corbillard sort lentement de la cour de la prison et les spectateurs massés au bord de la route applaudissent frénétiquement poussant des cris de joie. Ted Bundy vient d’être exécuté sur la chaise électrique. Son crime ? Il a confessé avoir enlevé, violé, torturé et tué au moins 28 jeunes femmes et jeunes filles. Même les adversaires de la peine de mort ne se manifestent pas à cette occasion, la situation est trop horrible pour s’opposer à l’exécution d’un criminel aussi vil et répugnant. La scène des applaudissements se répète un peu partout au travers des États-Unis ce soir-là, au moment des nouvelles nationales télévisées, lorsque le corbillard apparaît sur les écrans. Justice a été faite, dans la mesure du possible. La population est inquiète et irritée de cette violence sadique qui défraie les chroniques criminelles journellement. Il y a comme un soulagement dans l’air que l’homme ait finalement payé de sa vie pour ses nombreux crimes. Mais voici que les nouvelles continuent et que l’on assiste à une interview de Ted Bundy quelques heures avant son exécution. L’homme qui conduit l’interview s’appelle James Dobson, psychologue chrétien, dont le programme à la radio Focus on the Family (la famille au centre de l’attention) est écouté sur des centaines d’émetteurs nationaux aussi bien qu’à l’étranger (en Suisse, Radio 74 à Genève, FM 103.6 MHz, du lundi au vendredi à 9 h 30 et à 21 h 30, dimanche à 9 h 10). Une des révélations de Bundy qui va soulever une tempête de protestations contre James Dobson : Bundy dénonce la pornographie comme une des influences profondes qui l’ont amené à faire ce qu’il a fait. Or il se trouve que Dobson est l’un des chefs de file acharnés et efficaces dans la lutte contre la pornographie. Immédiatement, les commentateurs de différentes chaînes de télévision accusent Bundy de mentir effrontément afin de se disculper et Dobson d’avoir essayé de se faire une petite fortune en commercialisant les aveux de Bundy. Les crimes de Bundy passent au deuxième plan. Dobson est subitement devenu le grand coupable pour avoir osé rendre publics des aveux qui incriminent la pornographie. Que s’était-il donc passé pour amener pareille attaque contre Dobson ?
Pendant les onze ans qui se sont écoulés entre son arrestation en 1978 et son exécution, Ted Bundy a eu l’occasion de réfléchir en prison et aussi de parler avec un homme chrétien du nom de John Tanner. Au cours de ses entretiens, il est venu à croire en Jésus-Christ et à confesser ses péchés. En fait John Tanner s’est fait persécuter pour avoir eu l’audace de parler de Jésus-Christ à un criminel aussi vil. Toujours est-il que Ted Bundy a décidé de confesser publiquement son problème avec la pornographie, et comment il en est venu personnellement à faire violence à des femmes et à des jeunes filles, mais il n’a pas voulu faire confiance aux reporters de la TV commerciale. Il a donc demandé à James Dobson de l’interviewer exclusivement avant son exécution, ce qui a été fait. Il a même signé un contrat afin que tout profit financier découlant de la vente des cassettes de son interview soit utilisé pour la lutte contre la pornographie violente.
Les tabous
Quels sont donc les « crimes » de James Dobson ? Les chaînes de la TV américaine sont très soucieuses de ne pas perdre leur liberté d’expression face à une nouvelle forme de censure, ce qui est bien compréhensible. Mais en fait, ce qui se cache derrière ces protestations légitimes, c’est que ces mêmes chaînes font des profits énormes avec la pornographie qu’elles incluent dans leurs programmes. Qui plus est, une bonne partie des programmes est devenue ouvertement antichrétienne de manière virulente.
Dobson est donc un ennemi à double titre : premièrement, il présente des principes chrétiens dont le monde ne veut pas entendre parler. Aux yeux du monde, un homme comme Ted Bundy est impardonnable à jamais. Il est vrai que ses crimes sont extrêmement odieux et méritent punition. Les victimes sont bien plus nombreuses que les jeunes femmes et jeunes filles qu’il a tuées, il faut aussi penser aux familles des victimes et à leurs souffrances indicibles. Mais il est aussi vrai que le sang de Jésus-Christ, versé dans des circonstances violentes elles aussi, peut purifier le plus vil pécheur de ses offenses. Humainement, Ted Bundy a été puni pour ses crimes avec le châtiment suprême. Il lui faudra encore comparaître devant le tribunal de Dieu, ainsi que tout homme, et c’est Dieu qui rendra le jugement final. Deuxièmement, il a présenté une réalité redoutable, mettant en lumière la relation de la pornographie avec la violence faite aux femmes et aux enfants. Or cette relation est constamment niée par les médias. Pour eux, la pornographie, de quelque sorte qu’elle soit, est simplement inoffensive et ne conduit personne à un comportement violent ou à une vie de crime. C’est la société qui doit être blâmée pour le crime, pas les publications qui insultent la personne de la femme et de l’enfant et qui suggèrent un comportement violent et sadique à leur égard.
La réaction contre l’interview de Bundy n’est pas encore terminée. Dans sa lettre circulaire d’avril, Dobson mentionne que des magazines comme Playboy, Hustler et Penthouse cherchent à discréditer ce qu’il a fait, à le ridiculiser (en publiant une photo de lui attachée au corps d’un âne) et même à prétendre que ses opinions conduisent… à des abus physiques sur la personne de jeunes enfants. Il mentionne aussi les paroles assez prophétiques d’un sénateur du Colorado, Bill Armstrong, qui a dit, lors d’un banquet en janvier 1989 : « J’aimerais faire une remarque au sujet de Jim Dobson et de ceux qui poursuivent cette lutte. Il nous faut prier pour eux. Je ne peux pas le prouver, mais je suis absolument convaincu que lorsque quelqu’un confronte un sujet comme la pornographie ou la drogue, comme Jim Dobson l’a fait, il devient la cible des puissances maléfiques. Je crois personnellement que parce que le diable est lié (il ne peut pas être partout en même temps), il choisit délibérément ceux qui lui causent le plus de difficultés. Que vous croyiez que c’est Satan ou la mafia, je l’ai vu se produire à maintes reprises. Lorsque quelqu’un commence à gagner du terrain sur quelque chose comme la pornographie ou la drogue, il voit se dresser devant lui de terribles obstacles. »
Ces paroles ont trouvé confirmation dans les mois qui suivirent. Et la lutte continue de plus belle. Notre vrai espoir, c’est qu’aucune force au monde ne peut prévaloir contre Dieu et contre son Royaume, en dépit de toutes les apparences. Notre mission, c’est de demeurer fidèles jusqu’au bout comme témoins de celui qui a dit : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. »
Charles Winkler[1]
[1] Charles Winkler, ingénieur diplômé de l’E. P. F. L. en informatique, est pasteur d’une Église réformée en Pennsylvanie, aux États-Unis.