Genèse et développement du mondialisme[1]
Les mondialistes (récupérés en fait par la Haute Finance) prétendent assurer la paix définitive et universelle par l’instauration d’un gouvernement mondial. Cette idée n’est pas récente, car ils ont eu des précurseurs déjà au XVIIIe siècle. Nous avons déjà mentionné dans cet ordre d’idées la franc-maçonnerie et l’illuminisme, mais on pourrait citer en outre l’abbé de Saint-Pierre, auteur d’un « Projet de Paix perpétuelle » (1712) et l’inévitable J.-J. Rousseau, avec son « Essai sur la Fédération de l’Europe » (1761). La Révolution française devait prendre le relais avec ses prétentions à l’universalisme par l’extension des « idéaux de 1789 » ce qui, en fait de paix, se traduisit par des guerres ininterrompues de 1792 à 1815. Cette prétention à l’universalisme fut, en particulier, rappelée par un membre du sanglant Tribunal révolutionnaire lors de la séance du 30 octobre 1793, où 21 députés dits « girondins » furent condamnés à mort : « Paris, qui aura un jour la gloire d’avoir enfanté la République universelle. » Mentionnons en outre un curieux personnage, Anacharsis Kloots, sujet prussien fixé à Paris et qui publia un livre intitulé « La République universelle », à la suite duquel l’assemblée législative lui reconnut en 1792 le titre de citoyen français. Sa doctrine peut se résumer en une phrase : « Le genre humain vivra en paix lorsqu’il ne formera qu’un seul corps, la Nation unique. »
- XIXᵉ siècle, Après les guerres de la Révolution et de l’Empire, la recherche de la paix amena dès 1815 à Londres et à New York l’éclosion de mouvements organisés prônant l’instauration de la paix mondiale, cela sous la direction des loges maçonniques. Par la suite, on assista à la floraison de divers mouvements internationalistes, à la création des diverses « internationales », tandis que d’autre part le mouvement « pacifiste-mondialiste » se développait aux États-Unis, en Angleterre, en France et sur tout le continent européen (deuxième moitié du siècle)[2]. Il serait trop long d’énumérer ici toutes ces associations, mais nous mentionnerons dès maintenant, étant donné son importance dans l’évolution de « l’internationalisme vrai basé sur une théorie de gouvernement mondial », la « Fabian Society » (Angleterre, 1884) et que nous étudierons plus loin, ainsi que la « Round Table », société secrète fondée par des francs-maçons. On retrouve également des francs-maçons dans la campagne du pacifisme universel lancée en 1888 dans les loges européennes par de très hauts dignitaires francs-maçons. Et à la fin du XIXᵉ siècle, le mouvement pour la paix et l’internationalisme fondé sur un gouvernement mondial englobait plus de 400 organisations distinctes.
- XXᵉ siècle, Mais déjà on voit apparaître certaines grandes fortunes de l’époque, qui ont soutenu diverses entreprises mondialistes, et, à partir de 1900, les associations et centres divers vont se multiplier un peu partout dans le monde, sous la haute direction de la finance internationale (dont, si on peut dire, elles sont devenues « le bras séculier »), et de diverses sociétés plus ou moins secrètes.
En 1902 on voit ainsi apparaître la « Pilgrim Society » (voir plus loin) anglo-américaine fondée par des financiers et dont le premier président de la branche anglaise n’était autre que le premier « Grand Surveillant de la Grande Loge unie d’Angleterre », le comte de Roberts. Sa filiale américaine fut également fondée par deux grands financiers. Dans l’article précédent, nous avons déjà mentionné l’un de ces deux personnages, et signalé sa déclaration, faite en 1937, sur la création d’un gouvernement mondial grâce au communisme : il s’agit de Nicolas Murray Butler, par ailleurs dirigeant de la « Fondation Carnegie pour la paix », qui n’a cessé de financer diverses organisations pacifistes et mondialistes. On ne peut donc nier la collusion entre la haute-finance, le mondialisme et le socialo-communisme.
Autre fait important du début du siècle : l’écrivain anglais H. G. Wells, membre de la Fabian Society depuis 1903, écrit un livre intitulé « Le Nouvel Ordre du Monde », où l’on peut lire : « Notre véritable État (…) doit être dès maintenant l’État fédéral mondial. Notre vraie nationalité est le genre humain. » En 1939 parut un volume intitulé « Union ou Chaos », avec, comme sous-titre « Proposition américaine en vue de réaliser une fédération des grandes démocraties », et qui visait à la constitution d’un gouvernement mondial. Très rapidement, ce livre devint une sorte de bible du mondialisme. Son auteur était l’Américain Clarence Streit qui, comme par hasard, était membre de la Fabian Society, de la Round Table, et du « Council on Foreign Relations », (dont nous parlerons plus loin). En même temps, il fondait une union qui en 1940 devait devenir la « Federal Union », en liaison avec des Anglais de la Fabian Society.
Durant la Deuxième Guerre mondiale et pendant les années d’après-guerre, on assista au développement des organisations mondialistes et des mouvements pour la paix à vocation mondialiste. Après 1945, tous les peuples aspiraient légitimement à la paix, sans comprendre exactement quelle sorte de paix leur offraient les « meneurs du jeu », et il fut donc facile à ceux-ci de détourner cette aspiration vers leurs objectifs à eux. Nous épargnerons au lecteur l’énumération de ces organisations et mouvements, mais nous exposerons la pensée qui leur sert de dénominateur commun, ainsi que la méthode préconisée, ce qui pourra servir de fil conducteur pour la suite de cette étude.
Pour ce faire, nous retournerons à H. G. Wells, qui dès 1928 a exposé tout cela dans son ouvrage « The Open Conspiracy » (la conspiration au grand jour). « La stratégie mondialiste consiste, selon lui, à affaiblir, effacer, incorporer ou remplacer les gouvernements existant en les soumettant à une autorité supranationale. » Le gouvernement mondial laissera aux États la gestion et l’arbitrage interne du pays, et prendra à son compte les domaines essentiels : politique monétaire et financière, diplomatie, armées et armements, les transports internationaux, et même la justice, tout citoyen du monde pouvant faire appel au tribunal mondial.
La méthode préconisée est la suivante : il s’agit de créer et de « noyauter » un maximum d’organisations indépendantes où seront diffusées les idées mondialistes, de façon, nous dit H. G. Wells, à « réunir une certaine proportion de chacune des classes sociales… et de se servir des hommes ainsi sélectionnés pour préparer les débuts d’une communauté mondiale ». Le consensus sera obtenu avec le temps par une imprégnation progressive de l’opinion publique, sans même que celle-ci en prenne connaissance, donc sans violence. Les initiés chargés de diffuser ces idées devront naturellement s’affilier à divers groupes, la diffusion sera facilitée par la ramification de ces groupes, leurs connections et le parallélisme de leurs actions. « Ainsi la Conspiration au grand jour deviendra un grand mouvement mondial… une religion mondiale. »
- G. Wells prône l’antimilitarisme et l’antipatriotisme : « Pour servir la Conspiration au grand jour, il faut combattre et détruire les armées, qui font obstacle à son avènement. » Hélas, la réalisation de ce projet est en bonne voie, grâce à l’action néfaste de tous les mouvements dits « pacifistes », dont le but est de saper l’esprit de défense… en Occident. Un des fondements de la pensée de Wells, c’est son mépris du principe de nationalité, car « on ne saurait tolérer des gouvernements nuisibles ou réfractaires, sous prétexte qu’ils sont maîtres de tel ou tel lopin du territoire humain ».
Deux « sociétés mères »
- G. Wells codifiait ainsi en quelque sorte un processus déjà en cours de réalisation et qu’il s’agissait de perfectionner. Après avoir exposé (article précédent) quelles sont les forces agissant dans la coulisse, nous devons maintenant étudier deux sociétés qui œuvrent au profit de ces forces, sociétés qui sont en quelque sorte les piliers du mondialisme, les « sociétés mères » d’où sont issues de nombreuses organisations destinées à réaliser cette « imprégnation de l’opinion publique » dont parle Wells.
La « Fabian Society »[3]
A la fin du XIXᵉ siècle eurent lieu en Angleterre, à l’intérieur des divers courants marxistes, des rencontres et colloques qui aboutirent en 1884 à la création de la « Fabian Society » qui, au lieu de la révolution, préconisait l’établissement du socialisme par une méthode d’action lente et progressive, donc du socialisme sans douleur. C’est pour cette raison que ses promoteurs choisirent le qualificatif de « Fabien », en référence à la tactique employée contre Hannibal par le général romain Fabius Cunctator, c’est-à-dire le Temporisateur. En 1889, G. B. Shaw publia un des premiers livres sur cette question. Autour de lui gravitaient Sydney et Béatrice Webb (qui en 1936 furent de fervents apologistes de l’URSS) ainsi qu’Annie Besant et une des filles de Karl Marx, Eleanor, laquelle partit pour les États-Unis afin d’y implanter des noyaux fabiens. D’autre fabiens essaimèrent en Europe, Allemagne, France, Belgique, Italie, pour y apporter la bonne parole. Divers groupes de recherche et d’organisations constitués après la guerre 1914-18 ont en fait été les vecteurs des objectifs fabiens, et la majorité des mouvements à vocation mondialiste et socialiste nés à cette époque, et surtout après 1945, ont été totalement pénétrés et influencés par les Fabiens, et parfois même créés par eux. Rappelons à ce sujet que H. G. Wells était membre de la Fabian Society depuis 1903.
En 1968, le fabien américain Harry Laidler rappelait que, selon le socialisme fabien, « la transition (inéluctable) vers le socialisme doit s’effectuer graduellement ». D’autre part, le professeur anglais G. D. H. Cole (qui en 1941 devint président de la Fabian Society) considère qu’il faut certes utiliser toutes les formes du socialisme vers des objectifs prévus mondialement, mais, à côté des partis sociaux-démocrates, travaillistes et autres, il n’hésite pas à mentionner le communisme en Russie, « puisqu’il n’y a entre eux aucune différence d’objectifs, mais seulement de méthodes. » Voilà une pensée lourde de conséquences et qui explique bien des compromissions.
La pensée fabienne a pu se répandre lentement et patiemment, et ainsi noyauter tous les mouvements socialistes et nombre de cadres politiques. Pour ce faire les fabiens ont implanté et multiplié des noyaux dans les écoles et universités qui formaient les futurs cadres des États et des organismes internationaux, ce qui fut fait avec un grand succès en Angleterre et aux États-Unis, pays dans lesquels la pensée fabienne, socialiste et mondialiste, s’étend comme une véritable toile d’araignée.
Précisant la tactique de noyautage des fabiens, Annie Besant, qui fut membre de la Fabian Society, de la Round Table (voir ci-dessous), de la franc-maçonnerie et dirigeante de la Société théosophique, a écrit en 1930 : « Si vous voyez l’un d’entre nous travailler pour un mouvement particulier dans le monde, vous saurez que c’est une partie du plan mondial… un nouveau ciel et une nouvelle terre, bâtis sur les ruines de l’ancienne civilisation[4]. » Cette expression « sur les ruines de l’ancienne civilisation » n’est pas anodine, car on la retrouve, sous une forme ou sous une autre, dans divers textes élaborés par d’autres promoteurs de l’idée mondialiste.
La « Round Table » (Table ronde)[5].
Main dans la main avec les fabiens, cette société a joué un rôle essentiel dans la mise sur pied de diverses organisations destinées à manipuler l’Occident. À son origine se trouve une société secrète fondée en 1891 par le richissime Cécil Rhodes et un célèbre journaliste, William T. Stead, en liaison avec divers intellectuels d’Oxford et de Cambridge, sur la base d’un projet qui s’inspirait notamment des idées de John Ruskin, professeur à Oxford, et des idées fabiennes. Il s’agissait, au début, de la promotion de l’impérialisme britannique en vue d’un gouvernement mondial, avec l’appui de la haute finance. En particulier avec des subventions de certains de ses fondateurs : Cecil Rhodes, lord Milner (qui était à la tête de plusieurs banques en Angleterre), Lord Rothschild, et un groupe de banquiers internationaux ayant pour chefs de file Lazard Brothers et coopérant avec la Banque Morgan de New York. Bref, les fondateurs et les participants de la société Rhodes-Stead appartenaient tous à la haute finance internationale.
Cecil Rhodes mourut en 1902, mais le flambeau fut repris par Alfred Milner, qui, avec un groupe de jeunes gens frais émoulus d’Oxford, fonda en 1909 une association semi-secrète, la Table ronde, qui constituait un « cercle extérieur » de la société secrète Rhodes-Stead, et qui créa des groupes Table ronde dans sept pays (Angleterre, Dominions, États-Unis), lesquels reçurent des subventions de la haute finance internationale.
Tous les membres de la Table ronde à cette époque admiraient l’œuvre de Marx, et un des premiers membres américains, le « colonel » House, a écrit que ses amis et lui-même instaureraient dans le monde le « socialisme tel que Marx en a rêvé », mais en l’imposant « par en haut ». Les groupes de la Table ronde s’étaient fixé comme objectif l’instauration d’une Fédération mondiale, en commençant par le monde américain, avec l’appui de la haute finance, et le support d’importants groupes de presse en Angleterre et aux États-Unis. Pour assurer la pénétration de leurs idées dans les élites, le groupe d’Angleterre continua de bénéficier de l’emprise que la société Rhodes-Stead exerçait déjà sur les universités d’Oxford et de Londres, tandis que le groupe des États-Unis travailla à s’imposer dans diverses universités américaines. Par ailleurs, des membres de la Table ronde et de la Fabian Society avaient fondé en 1894 en Angleterre la London School of Economics, qui joue un rôle de premier plan dans la subversion socialo-mondialiste et qui est considérée comme une des grandes écoles les plus marxisantes de ce pays, tandis que le groupe Table ronde des États-Unis créait un « Institute for Advanced Study » (Institut d’études supérieures).
Le “colonel” House
Il est temps de parler maintenant d’un personnage qui joua un rôle capital dans la politique américaine et internationale avant, pendant et après la Première Guerre mondiale, le « colonel » Edward Mandel House. Mort en 1938 à l’âge de 80 ans, celui-ci a en effet mis sur pied aux États-Unis une puissante organisation, le « Council on Foreign Relations » (CFR), c’est-à-dire « Conseil des relations étrangères », qui en fait dirige toute la politique intérieure et extérieure de ce pays et pèse sur le destin du monde entier.
Ce « colonel », qui en fait n’avait aucun grade militaire réel, appartenait à l’ordre illuministe des « Masters of Wisdom » (Maîtres de la Sagesse) et à la Table ronde, et il était de tendance socialiste. Par ailleurs, il avait de puissantes relations parmi les banquiers internationaux de New York (notamment les Warburg, Morgan et les frères Schiff) et également parmi les banquiers et hommes politiques d’Europe. La haute finance américaine, qui avait fait élire Wilson d’abord comme gouverneur du New Jersey (1910), avec l’appui de la franc-maçonnerie, puis président des États-Unis en 1912, avait fait de lui son instrument en le confiant à la surveillance de « conseillers », dont Ed. House, qui organisa en fait la politique intérieure et prit en sous-main la direction effective du Département d’État (affaires étrangères). C’est lui qui « suggéra » à Wilson la création de la Société des Nations, ce qui correspondait aux vues de la Table ronde et des banquiers américains, et devait constituer, selon tous ces gens, une importante étape vers l’instauration d’un gouvernement socialiste mondial, sous l’autorité de la haute finance.
Deux produits de la Table ronde : RIIA et CFR
Le 19 mai 1919, le « colonel » House, qui se trouvait à Paris pour la Conférence de la Paix, invita à un dîner un certain nombre de délégués anglais et américains à cette conférence, lesquels appartenaient tous à la Table ronde. Après cette prise de contact, il organisa le 30 mai un dîner-conférence au cours duquel furent jetées les bases d’un « Institut des affaires internationales » rattaché à la Table ronde, et dont la section américaine prit le nom de « Council on Foreign Relations » (CFR). Cette initiative de House concrétisait en fait l’idée des dirigeants de la Table ronde de constituer un « cercle extérieur » devant permettre à cette organisation d’étendre son influence, « en facilitant les études scientifiques et l’étude des questions internationales ».
Le RIIA[6]
En Angleterre, cet institut, qui en 1926 devint le « Royal Institut of International Affairs » (RIIA), s’installa à Londres dans le même immeuble que la Table ronde, immeuble connu sous le nom de Chatam House, et la liste des sociétés et banques qui le financent est impressionnante. En 1931 fut fondée une organisation parallèle, le PEP : « Political and Economic Planning » (Planification politique et économique), qui comprenait notamment des membres influents de la Fabian Society et du RIIA. On comprendra facilement ce que devait être l’influence du RIIA et du PEP si on sait qu’au début de la guerre 1939-45 le ministère britannique de l’Information et celui des Affaires étrangères étaient totalement sous leur coupe.
Par la suite furent fondés, certains avant la guerre, d’autres après 1945, des instituts similaires dans les Dominions britanniques et divers pays étrangers, dont en France l’actuel « Institut français des relations internationales » (IFRI).
Le mondialisme du RIIA a encore été souligné en 1977 par son directeur exécutif, David Watt, qui a déclaré alors à un Américain qu’il était « de plus en plus urgent d’en arriver à des solutions radicales », pour surmonter les obstacles dressés contre une Fédération mondiale par « la permanence des racines du nationalisme » dans les divers pays ouest européens.
Le CFR[7]
Ce jumeau américain du RIIA britannique, né en 1919 et dont l’encadrement initial fut assuré par des membres de la Table ronde, n’a vraiment pris corps qu’en 1927, lorsque les Rockefeller comprirent tout le parti qu’ils pouvaient en tirer. Et depuis il ne cesse de propager l’évangile mondialiste tel que le conçoivent ses maîtres de Wall Street. Depuis 1933 il fut le cerveau invisible de la politique extérieure du président Roosevelt, grâce auquel il a investi le « Federal Reserve Board » (Banque centrale) puis les Départements du trésor et du commerce, et ensuite le Département d’État. Entre 1939 et 1945, il a rédigé 682 mémoranda qui prouvent que toutes les décisions du temps de guerre, les positions adoptées lors des conférences de Téhéran, Yalta et Berlin, ainsi que l’Otan, etc., sont en fait ses œuvres.
Depuis sa création, le CFR part du principe que l’on ne peut revenir sur le fait communiste et que, par l’alternance de pressions et d’ouvertures, l’Occident doit finir par convaincre l’URSS de devenir un partenaire acceptable pour un nouvel ordre mondial édifié en commun.
Sa puissance permanente à l’intérieur du Gouvernement américain est illustrée par le fait que, depuis Roosevelt, tous les présidents américains (sauf trois, dont Reagan) sont issus du CFR, de même que tous les secrétaires d’État depuis 1939 (sauf un) tous les secrétaires à la Défense depuis 1958 (sauf un), tous les secrétaires au Trésor et au Commerce· depuis trente ans, tous les directeurs de la CIA (renseignements) de 1947 à 1987 (sauf un). Bref, le CFR n’a cessé de peser sur la politique des États-Unis, et l’on peut même dire que la présence de l’illustre H. Kissinger auprès du président Nixon, présence imposée par le CFR (1973), a eu pour résultat que la politique du CFR est devenue la politique officielle des États-Unis.
En 1983, l’historien américain A. C. Sutton a découvert au sein du CFR l’existence d’un noyau secret, « l’Ordre », dont un nombre d’initiés détiennent des postes de décision dans la haute administration américaine. Au cours de ses recherches il a par ailleurs pu établir que les penseurs et « orienteurs » de « l’Ordre » à la fin du XIXᵉ siècle et au début du XXᵉ étaient les héritiers directs des cellules secrètes des « Illuminés de Bavière », qui avaient essaimé en milieu anglo-saxon entre 1800 et 1855, créant elles-mêmes des cellules dans les milieux universitaires aux États-Unis. Il n’est donc pas inutile de souligner ici le fait que les membres de « l’Ordre » ont une filiation « illiuministe » tout comme Karl Marx (voir article précédent) !
Pour étendre son influence, le CFR commença en 1938 à créer, avec l’aide financière de la « Carnegie Corporation » de New York, des « commitees » (groupes d’études) dans quelques villes américaines : actuellement, ils sont au nombre de trente. Mais en plus il créa des organisations satellites qui présentent des caractères communs :
- même objectif : instauration du socialisme mondial,
- mêmes sources de financement : les « Fondations » (Ford, Carnegie, Rockefeller, etc.),
- chevauchement des membres entre ces organisations, avec présence de nombreux membres du CFR parmi leurs adhérents, et surtout présence à leur tête de dirigeants du CFR.
Il s’agit là d’une véritable toile d’araignée tendue sur les États-Unis pour couvrir toutes les classes de la société, et pour manipuler, voire intoxiquer une partie du public américain, ce qui permet au CFR de faire pression sur le gouvernement et le Congrès, avec bien entendu des répercussions sur le monde entier. Nous nous bornerons à mentionner ici les trois principales de ces organisations satellites :
- « Foreign Policy Association » (FPA). association de politique étrangère, qui à son tour a créé des « World Affairs Councils »,(Comités des affaires mondiales). Deux membres de la Table ronde ont présidé à la fondation de la FPA : Felix Frankfurter et Paul Warburg, pour favoriser l’institution aux États-Unis d’une économie planifiée et l’intégration du système américain dans un système socialiste mondial.
- « Business Advisory Council » (BAC). Comité consultatif sur les affaires créé en 1933 et qui groupe d’importants hommes d’affaires comme conseillers officieux du gouvernement. Dans ses rangs figurent 160 des plus puissants hommes d’affaires du pays, qui se réunissent plusieurs fois par an avec des personnalités du gouvernement pour discuter de questions économiques. Le tiers de ses membres appartiennent au CFR de sorte que le BAC est en fait un des intermédiaires par lequel le CFR impose ses vues au gouvernement fédéral.
- « Institute for Policy Studies » (lPS) Institut d’études politiques, qui est depuis 1963 l’émanation de la gauche du CFR. C’est une organisation ultra-gauchiste, une avant-garde utile du KGB soviétique. Il a pour objectif d’influencer l’opinion pour aboutir à un nouvel Ordre mondial concerté avec l’URSS.
- Les Fondations (Carnegie, Rockefeller, Ford, etc.a) ne sont pas uniquement des organisations philanthropiques, car elles ont cédé à la tentation de s’immiscer dans la politique, et leurs énormes moyens financiers ont été utilisés sans vergogne pour agir sur les élections.
Du rapport établi en 1954 par une commission d’enquête qui a poursuivi ses travaux contre vents et marées, il ressort que, par leur argent, ces fondations ont « propagé l’internationalisme » dans le sens particulier d’une tendance « vers un gouvernement mondial » et d’une « atteinte au nationalisme américain ». Leur action s’est fait particulièrement sentir au sein du Département d’État, de sorte qu’elles ont participé pour beaucoup à la conception de la politique étrangère dans son principe et son détail. Le CFR a d’ailleurs pris en main les plus importantes fondations, puisque plus de la moitié de leurs membres dirigeants sont des affiliés de ce Conseil.
Frédéric Goguel
[1] Pour une étude plus complète de la genèse et du développement du mondialisme, on peut se reporter à deux ouvrages essentiels de Yann Moncomble : « L’Irrésistible Expansion du Mondialisme » (notamment pp. 1 à 117) ; « La Trilatérale et les Secrets du Mondialisme » (notamment pp. 39 à 49).
[2] Aux États-Unis, création en 1869 de l’ « Alliance républicaine universelle », ayant pour but de « réunir tous les États du monde en une seule république ». En France : « Ligue du bien public » (1860), les « Amis de la paix » (1872), « La Paix par le Droit » (1887).
[3] « Fabian Society » – Moncomble : « Irrésistible Expansion… », pp. 30-31 ; P. de Villemarest « Nomenklatura mondialiste ».
[4] Annie Besant – citée par « La Trilatérale et les Secrets… », p.235.
[5] « Round table », notamment « La Trilatérale et les secrets… » pp. 51-59.
[6] RIIA. Notamment « La Trilatérale et les Secrets… » pp. 61-76.
[7] CFR. Voir J. Bordiot « Une main cachée dirige… », pp. 134-150.