À qui l’encens ? À qui plaire ? À qui être agréable ?
La musique et le culte
Comment convient-il de considérer la place et l’exécution du chant dans l’Église ? Les psaumes contiennent de nombreuses invitations à louer l’Éternel en chantant. Nous les retenons d’autant plus que notre joie se sent à l’aise dans l’expression de la louange par le chant, auquel est donnée son unique direction : « Chantez à l’Éternel », « chantez à la gloire de son Nom » : chantez, pour le célébrer, Le bénir, avec actions de grâces, en son honneur. Cette direction reste la même, lorsque le psalmiste chante la force de l’Éternel, sa fidélité, sa bonté et sa justice. Les psaumes, appelés aussi “cantiques”, étaient accompagnés par les instruments de musique variés (à vent, à cordes ou à percussion) ; et, parmi les fonctions sacerdotales, figuraient celles des chantres ; ce qui montre la place importante accordée au chant dans le culte israélite. Et ces psaumes-cantiques sont parole de Dieu, comme les prières qu’ils renferment.
Qu’en est-il maintenant, dans l’ère de l’Église et de l’Alliance Nouvelle ?
Contrairement à l’Ancien Testament, le Nouveau Testament ne consacre au chant que quelques discrètes mentions, et il se tait quant à la musique instrumentale. Il est certain qu’il faut tenir compte de cette constatation, et ne pas suivre la tradition catholique qui a puisé ses éléments dans l’Ancien Testament, en négligeant les caractères que prend le culte selon le Nouveau Testament (adoration en esprit et en vérité). Le mot « musique » ne figure qu’une seule fois, en Luc 15:25, dans la parabole du fils prodigue. Bien sûr, prenons et mettons en pratique les enseignements qui nous concernent directement. Les voici résumés :
- JÉSUS A CHANTÉ DES CANTIQUES AVEC SES DISCIPLES ; plus d’une fois sans doute, quoique les Évangiles ne mentionnent ce fait qu’à une seule occasion (Mat. 26:30 et Marc 14:26) et qu’aucun relief ne lui soit donné.
- L’ÉGLISE PRIMITIVE UTILISAIT LE CHANT COURAMMENT. Dans la prison de Philippes, Paul et Silas priaient et chantaient les louanges de Dieu (Actes 16:25). D’autre part, dans l’exhortation que l’apôtre Paul adresse aux Romains de glorifier Dieu, Père de Jésus-Christ, il cite le psaume 18 et notamment ce passage : « Je chanterai à la gloire de ton nom » (Rom. 15:5-9). En 1 Cor. 14:15, cet apôtre écrit : « Je prierai par l’esprit, mais je prierai aussi avec l’intelligence ; je chanterai par l’esprit, mais je chanterai aussi avec l’intelligence. » En 1 Cor. 14:26 : « Que faire donc frères ? Lorsque vous vous assemblez, les uns ou les autres parmi vous ont-ils un cantique, une instruction, une révélation, une langue, une interprétation, que tout se fasse pour l’édification. » Notons, en passant, la grande liberté laissée à l’Église dans le culte, ou plutôt au Saint-Esprit en ses membres.
L’Épître de Jacques fait aussi mention du chant : « Quelqu’un est-il dans la joie, qu’il chante des cantiques. » (Jacq.5:13).
- INSTRUCTIONS AUX MEMBRES DE L’ÉGLISE. D’abord, Eph. 5:19 : « Entretenez-vous par des psaumes, par des hymnes, et par des cantiques spirituels, chantant et célébrant de tout votre cœur les louanges du Seigneur puis, Col. 3:16 : ((Que la parole de Christ habite parmi vous abondamment ; instruisez-vous et exhortez-vous les uns les autres en toute sagesse, par des psaumes, par des hymnes, par des cantiques spirituels, chantant à Dieu dans vos cœurs sous l’inspiration de la grâce.)) Ces trois désignations, psaumes, hymnes, cantiques spirituels, indiquent que toute forme de chant devait procurer à l’Église une voie d’adoration de Dieu en esprit et en vérité, et participer aussi à l’entretien de la foi et de l’amour.
Ainsi le chant a été pratiqué dans l’Église dès son origine. Pline écrivait à l’empereur Trajan au sujet des chrétiens : « Ils chantent entre eux des cantiques à Christ comme à leur Dieu. » Les termes de la parole, psaumes, hymnes et cantiques spirituels, circonscrivent la nature des chants de l’Église à un domaine auquel s’attache particulièrement le qualificatif “spirituel”, et en lequel les suggestions de la chair n’entrent pas. Ce domaine reste celui de l’Esprit. Le texte biblique dit : « Célébrant de tout votre cœur les louanges du Seigneur », ce qui exclut la banalité, la répétition par habitude, l’exécution du chant sans penser au sens des paroles, ou pour le seul agrément qu’on y trouve. Chanter, c’est célébrer ; on parvient à cette célébration quand, intérieurement saisis d’un saint élan d’amour, l’esprit, l’âme et le corps (la voix) s’associent dans un mouvement vers Dieu devenu nécessaire et vrai. Portons également attention au rôle de la sagesse, que le texte des Colossiens mentionne. C’est elle qui distinguera ce qui est saint de ce qui est profane, et qui établira la mesure ainsi que l’équilibre de l’utilisation du chant. Les termes : ((sous l’inspiration de la grâce)) indiquent la seule bonne origine de toute expression par le chant, ainsi qu’il en est de la prière ou de la prédication.
En conséquence, nous pensons que, de source profane, nous n’obtiendrions que des thèmes musicaux ou des rythmes traduisant les goûts et les aspirations de l’homme naturel (l’homme psychique 1 Cor. 2:14), ou pire, ceux d’hommes névrosés et d’hommes en proie aux passions les plus licencieuses, en honneur dans notre société. Cet apport, nous ne pouvons que le déclarer impropre au service de Dieu. Nous ne saurions regarder comme bonne et utile la musique dont le rythme actionne le psychisme et qui serait empruntée à des milieux dévoyés, pas plus que la musique langoureuse, conçue pour charmer et émouvoir, qui donc touche l’âme et ne peut atteindre l’esprit. L’Église reçoit de l’Esprit tout ce qui convient à sa vocation ; ses sources sont en Dieu et elles lui suffisent. Il y a une musique dans le ciel (Apoc. 5:9, 14:3,15:3) et je suis certain que nous pouvons y participer quand nous devenons participants de la nature divine de Christ.
Pourquoi aurions-nous recours au professionnalisme et à la technique musicale de haute conception ? Le monde a-t-il des ressources mieux adaptées à l’œuvre de Dieu que Dieu lui-même ? Qu’est-ce que l’Évangile prend au monde ? Rien, sinon des hommes pécheurs qu’il arrache aux ténèbres et à la mort ! Jésus lui-même, quoique né de femme, disait : « Vous êtes d’en bas, moi je suis d’en haut » (Jean 8:23). Les ténèbres ne peuvent rien céder de valable à la lumière. Il y a opposition entre les deux. Nous avons tout pleinement en Christ (Col. 2:10). Pierre avait cette conviction inspirée : « Comme sa divine puissance nous a donné tout ce qui contribue à la vie et à la piété, au moyen de la connaissance de celui qui nous a appelés par sa propre gloire et par sa vertu…» (II Pierre 1 : 3). Le chant dans l’Église contribue à la vie de l’esprit et à la piété, et lui aussi se nourrit d’en haut.
De nombreux jeunes, au cœur brûlant de foi et d’amour, comme de nombreux tziganes, eux aussi pleins de ferveur, nous ont fait plus d’une fois une magnifique démonstration qu’on ne peut oublier. Ils nous ont démontré que des dispositions musicales pouvaient naître par l’action de la grâce de Dieu. En certaines circonstances, nous avons entendu des chrétiens élever ensemble, dans des rassemblements, un chant tellement suave et spirituel qu’il nous paraissait céleste. Nous le goûtions du fond du cœur, heureux en pensant au plaisir de Dieu. C’était vraiment la communion entre tous et de tous avec le Maître, au point qu’on aurait pu dire : le Seigneur chante avec nous ! Il en est de la musique et du chant comme de la parole ; ce n’est pas le savoir théologique, ou l’art de parler, qui rendront efficace l’œuvre de Dieu, mais, comme Paul en témoigne, et comme l’expérience le montre, c’est par une démonstration d’esprit et de puissance que l’œuvre s’accomplit.
Enfin, l’objectif à ne jamais perdre de vue réside dans le seul désir d’être agréable à Dieu, en suivant l’exemple de Jésus, qui pouvait dire : « de fait toujours ce qui lui est agréable » (Jean 8:29). En harmonie avec cette parole, l’Écriture nous donne le conseil suivant : « Examinez ce qui est agréable au Seigneur » (Eph. 5:8-11). Nous sommes engagés fermement à être entièrement agréables au Seigneur (Col. 1:10) et à lui rendre un culte qui lui soit agréable, avec piété et avec crainte (Héb. 12:28). Or, pour y réussir, il faudra connaître ce qui plaît à Dieu, ne vouloir que cela, et écarter tout ce qui plaît à la chair en premier. La chose qui nous est agréable à nous-mêmes ne pourra être qu’impropre au service de Dieu, ne pouvant donc entrer dans l’adoration en esprit et en vérité. Il en sera ainsi de tout thème musical que nous aimons parce qu’il flatte nos goûts et répond à notre sensibilité propre au plan humain. Nous ne chanterons pas pour nous-mêmes, pour nous distraire ou nous détendre ; nous chanterons « à Dieu », dans une communication avec Lui, et pour réjouir son cœur de Père. Il y a des airs de musique qui conviennent à la louange, tout en flattant l’oreille, mais il y en a aussi qui, tout d’abord, paraissent ingrats à l’audition, alors qu’ils sont de bons porteurs de la louange ; on s’en aperçoit dans un second temps. Par conséquent, le choix et l’adoption des thèmes musicaux ne se feront pas au jugé de l’ouïe, et selon notre goût, mais par un esprit de consécration et d’humilité, sous l’inspiration de la grâce. Nous avons connu des chrétiens qui, quoique n’étant pas musiciens ni chanteurs, recevaient paroles et musique, non pas toujours spontanément dans le culte, mais au cours de leurs journées. Ces personnes en conservaient le souvenir de façon étonnante, et pouvaient chanter plusieurs fois ce qu’elles avaient reçu.
Images et représentations
Le livre de l’Exode contient les dix commandements en son chapitre 20, versets 1 à 17. Le premier commandement stipule que le peuple de Dieu n’aura aucun autre dieu que l’Éternel, et le second a surtout pour objet de prévenir l’adoration du vrai Dieu par l’utilisation d’images ou de représentations. Ce commandement, tout comme l’ensemble de la loi de Dieu, n’a pas été aboli, ainsi que Jésus le précise (Mat. 5:17) et il a sa place dans le cœur des enfants de Dieu (Héb. 8:10). De plus, selon l’enseignement du Seigneur dans le chapitre 5 de Matthieu (21 à 48), caractérisé par la répétition « Mais moi, je vous dis… », la mise en pratique de la loi, dans l’ère de la Nouvelle Alliance, va au-delà de la lettre, pour s’étendre à toute pensée ou tout acte contrevenant à l’esprit de la loi. Par exemple, le commandement « Tu ne tueras point » atteint autant la colère et l’injure que le meurtre lui-même (Mat. 5:21-22 ; 1 Jean 3:15). Ainsi, le second commandement relatif aux images et aux représentations devra-t-il recevoir une application dépassant les statues ou les icônes, et allant jusqu’à écarter toute forme de représentation, qu’elle ait Dieu, le Christ, ou la parole de Dieu pour objet (nous le montrerons plus loin). Voilà ce qu’est « servir dans un esprit nouveau » (Rom. 7:6). En somme, le second commandement a trait à la façon dont nous servons ou adorons Dieu. Or, rappelons-le, nous sommes invités à adorer Dieu en esprit et en vérité ; par conséquent, à le servir de même. Il ne peut être question de se départir ni d’une relation en esprit, ni de la vérité, qui doit toujours se trouver présente dans nos œuvres, quelles qu’elles soient. C’est pourquoi les figurations, les représentations visuelles ou picturales,, les représentations animées par gestes ou sous forme théâtrale dans le service de Dieu, contreviennent toutes, avec la même évidence, au second commandement. La seule manière de communiquer la foi à d’autres consiste à vivre devant eux la vie nouvelle, révélatrice des principes de l’Évangile. Par contre, s’ingénier à mimer ou à jouer les récits ou les paraboles de la Bible, selon un scénario et une mise en scène, avec ou sans costumes, c’est s’engager à contre-courant de l’enseignement de la volonté de Dieu. Ces moyens ne bénéficient absolument pas de la grâce et de la puissance divines. Quelle différence peut-on faire entre une peinture représentant des personnages ou un événement bibliques, et les mêmes personnages ou le même événement en figuration animée sur une scène ? Les deux sont en complet désaccord avec l’esprit du second commandement ; et la représentation théâtrale accentue plutôt la désobéissance. Examinons bien les termes de l’Écriture : « Tu ne te feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. » Même entendu littéralement, ce texte veut s’étendre à toute image ou représentation quelconque (de quelque nature ou forme que ce soit) prenant pour objets les choses du ciel (les anges par exemple, ou la Personne du Christ), les choses qui sont sur la terre (particulièrement les personnages réels ou fictifs – ceux des paraboles – que la parole de Dieu utilise pour son enseignement inspiré), et les choses qui sont dans les eaux plus bas que terre (les eaux de la mer sont considérées comme « d’abîme » ou le séjour des ténèbres ; aucun démon, ni même Satan ne doivent être représentés).
L’on objectera peut-être que les mimes ou les saynètes répondent soit à un but didactique, soit à l’intention d’attirer le monde à évangéliser par un moyen qui ne le rebute pas. Ce sont là des idées humaines qu’une réflexion basée sur la parole de Dieu aura vite balayées. Le Nouveau Testament nous fait remarquer que nous marchons par la foi et non par la vue. D’autre part, nul ne vient au Christ Sauveur si Dieu le Père ne l’attire à son Fils (Jean 6:44 et 65) ; or, Dieu attire les hommes par Sa parole qu’Il fait pénétrer dans le cœur par Son Esprit. L’indifférence de nos concitoyens a plus de résistance qu’on ne croit ; elle ne sera détrônée que par la puissance de l’Esprit ou au cours des épreuves de l’existence. Nous n’avons pas à combattre selon la chair, ayant à notre disposition des armes qui ne sont pas charnelles, quoique puissantes, de telle sorte que nous pouvons renverser les raisonnements et amener toute pensée captive à l’obéissance de Christ (II Cor. 10:3-5). Toute représentation selon les idées humaines se classe dans la catégorie des « armes charnelles Il, c’est certain. Du respect du second commandement, comme des autres, dépend l’authentique fidélité de l’Église, et sans ce respect, Dieu ne saurait être glorifié ; et pourtant, l’Écriture nous demande de tout faire pour la gloire de Dieu (1 Cor. 10:31). Les images et les représentations de toutes sortes ternissent la gloire de Dieu, par le fait d’une transgression de la loi, et parce qu’elles ne donneront qu’une idée imparfaite, sans force, du contenu de la parole inspirée, et qu’alors elles flétriront la vérité. « TA PAROLE EST LA VÉRITÉ » a dit le Seigneur. La vérité ne se représente pas ; elle surgit de la révélation divine, et doit être entendue seulement. « Amen, Amen ! » disait le Seigneur en proclamant la vérité. Peut-on dire « Amen ! » (en vérité) après avoir assisté à une représentation théâtrale ? Non, on applaudit !
En second lieu, images et représentations produisent un égarement, car elles opèrent dans le cœur des gens un mélange de pensées venant de leur imagination avec celles pouvant résulter de ce qui a été représenté. Pensées d’imagination et pensées suggérées par le spectacle vont aboutir à une analyse que le spectateur fera lui-même, et qui sera bien éloignée de l’impact que la vérité prêchée aurait pu produire en son cœur. Dans le désert, Aaron, cédant aux instances du peuple, confectionne un veau d’or, censé représenter l’Éternel. « Demain, il y aura fête en l’honneur de l’Éternel » dit-il (Ex. 32:5). Le lendemain, le peuple se livra à une orgie. Dans l’idée humaine, le taureau d’or évoquait la force de l’Éternel ; mais il n’en est résulté ni crainte de Dieu, ni incitation à la sanctification.
Quand les pensées de la chair interviennent pour représenter quelque chose, le résultat ne peut apparaître que dans le domaine humain et terrestre, et c’est là que les réactions des spectateurs se situent. Tel est l’enseignement de l’Écriture : « Qui donc parmi les hommes connaît ce qui est dans l’homme, sinon l’esprit de l’homme qui est en lui ? De même, ce qui est en Dieu, personne ne le connaît, sinon l’Esprit de Dieu. Pour nous, nous n’avons pas reçu l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu, afin que nous connaissions les dons de la grâce de Dieu. Et nous n’en parlons pas dans le langage qu’enseigne la sagesse humaine, mais dans celui qu’enseigne l’Esprit, exprimant ce qui est spirituel en termes spirituels. L’homme laissé à sa seule nature n’accepte pas ce qui vient de l’Esprit de Dieu. C’est une folie pour lui, il ne peut le comprendre, car c’est spirituellement qu’on en juge. » (1 Cor. 2:11-14 – TOB)
Que restera-t-il d’un sketch, d’une comédie musicale, ou d’un spectacle théâtral quel qu’il soit ? L’attention et le souvenir s’attarderont sur la pièce elle-même, sur le jeu des acteurs, et sur le plus ou moins grand intérêt qu’on y a trouvé. En s’adjugeant de tels moyens, l’Église ne parviendra qu’à montrer sa faiblesse et se heurtera à cette opposition qu’a proclamée le prophète Ésaïe en ces termes : « Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos pensées. » (Es. 55:8-9) Ces passages, tous les chrétiens les connaissent, mais ils n’impressionnent plus ; la rigueur de leur enseignement n’interpose plus le barrage qu’il faudrait au-devant d’initiatives provenant des pensées et des voies humaines.
L’Éternel Dieu, Jésus-Christ, la Parole de Dieu et le Saint-Esprit sont ensemble un seul et même Dieu, l’unique Seigneur, comme Jésus l’a dit Lui-même (Marc 12:29). Quant à la Bible, la parole écrite et inspirée, elle est le substrat pour nous de la Parole vivante de Dieu ; elle a le privilège d’être la révélation de la vérité ; et à travers la notion de vérité, nous retrouvons Jésus-Christ. Il ne peut y avoir de hiatus entre la parole écrite et la Parole vivante de Dieu, pas plus qu’il n’y en a entre l’humanité et la divinité de Jésus-Christ. Si bien que prétendre représenter théâtralement la Parole de Dieu équivaut à prétendre représenter Celui qui est la Parole de Dieu, Christ lui-même ; c’est là un mécompte certain. On ne fait pas ce qu’on veut de la parole de Dieu ; on ne plaisante pas avec elle, ce serait blasphémer ; elle est associée surnaturellement avec une puissance d’accomplissement ; elle est sortie de la bouche de Dieu ; elle est sacrée. Il est arrivé que, sous une puissante onction de l’Esprit, des hommes aient senti leurs larmes couler en lisant l’Écriture, et une intense émotion spirituelle s’étendait aux assistants. Apprenons ou réapprenons la crainte de Dieu et de Sa parole 1 Par Ésaïe, Dieu a dit : « Voici sur qui je porterai mes regards : sur celui qui souffre et qui a l’esprit abattu, SUR CELUI QUI CRAINT MA PAROLE » (Es. 66:2). Esdras note qu’auprès de lui s’assemblaient ceux que faisaient trembler les paroles du Dieu d’Israël (9:4). Enfin, ne soyons pas indifférents aux qualificatifs accordés à la parole de Dieu : elle est droite, éprouvée, pure ; elle est un feu, une lampe ; elle est plus douce que le miel ; elle demeure éternellement. Imaginer qu’elle soit mise en scène, pour être jouée selon l’art théâtral, nous ne pouvons l’admettre. Encore une fois, la parole de Dieu est la « RÉVÉLATION DE LA VÉRITÉ » ; or, la vérité touche à l’absolu de Dieu ; elle ne se représente pas, elle s’énonce par l’Esprit et se vit.
Dans le Deutéronome, l’exclusivité donnée à la parole de Dieu s’affirme : « Et l’Éternel vous parla du milieu du feu ; vous avez entendu le son des paroles, mais vous n’avez point vu de figure, vous n’avez entendu qu’une voix » (Deut. 4:12). Dieu veut toujours qu’il en soit ainsi. La parole de Dieu est seule porteuse du message du salut.
Le goût des expériences
Au cours de sa vie nouvelle, chaque enfant de Dieu reconnaît dans sa vocation la nécessité d’acquérir l’expérience de la parole de justice (Héb. 5:13) et de veiller à sa croissance. Cependant, en marge des expériences utiles qui contribuent à la maturité spirituelle, on assiste aujourd’hui au développement d’une tendance à rechercher des expériences, celles particulièrement qui permettent de rapporter en forme de témoignage les interventions opportunes de Dieu en des circonstances diverses. Les problèmes les plus courants de la vie active de chaque jour sont présentés au Seigneur dès qu’ils surgissent et ils sont soudain miraculeusement résolus. En général, il s’agit de besoins ou de difficultés d’ordre financier ou matériel, et, avec enthousiasme, on se plaît à étoffer de longs témoignages avec les exaucements obtenus, qu’ils aient eu place dans le foyer, dans la profession, dans le domaine de la santé ou dans celui des démarches administratives ou autres. Nous croyons fermement que, dans son incessante bonté, Dieu aime manifester sa sollicitude, ainsi que son action éducative, en intervenant pour affranchir notre route des écueils qui nous inquiètent. Il est écrit : « Ne vous inquiétez de rien ; mais en toute chose faites connaître vos besoins à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de grâce » (Phil. 4:6).
En toute chose, par conséquent au sujet des problèmes de la vie courante, certes. Remercions humblement et avec ferveur le Seigneur de cette sollicitude qui nous est précieuse. Nous n’avons nullement dans la pensée d’en restreindre le bienfait. Toutefois, nous éprouvons de la gêne du fait que certains témoignages soient, en quelque sorte, spécialisés, n’ayant pas d’autre objet que l’aplanissement des difficultés de l’existence, par exemple la remise en marche d’une activité industrielle ou commerciale qui périclitait, comme le succès de démarches assurant le gagne-pain, ou la profession, comme l’heureux aboutissement de la recherche d’un logement…, etc. En toutes ces choses qui nous préoccupent, assurément Dieu nous accorde aide et secours ; Il fait aboutir nos démarches, incline au besoin le cœur de ceux à qui nous avons à nous adresser. Il désire que nous soyons libres, dégagés des soucis pour mieux L’adorer et Le servir.
Il est cependant impossible que Dieu n’accorde que des exaucements de cet ordre, ayant trait uniquement à l’existence matérielle. Bien au contraire, Il entend nous faire connaître Son amour sous l’aspect essentiel de notre “perfectionnement”, nous fortifiant pour que nous marchions de progrès en progrès, que nous en ayons la vision et la volonté, que nous recherchions premièrement le royaume et la justice de Dieu, sans nous inquiéter du lendemain sur cette terre (le lendemain aura soin de lui-même).
Dieu veut, avant tout, nous préparer à l’entrée dans le royaume éternel, et désire surtout favoriser et bénir nos constants efforts de foi en ce sens. Pierre a été poussé à nous le dire : « C’est pourquoi, frères, appliquez-vous d’autant plus à affermir votre vocation et votre élection, car, en faisant cela, vous ne broncherez jamais. C’est ainsi, en effet, que l’entrée dans le royaume éternel de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ vous sera pleinement accorde. » (II Pierre 1:10 – 11) Dieu entend nous faire grandir dans Ses voies, si bien que le champ de Ses exaucements excède amplement l’ordinaire des problèmes de l’existence terrestre. Ceux-ci, étant résolus par la grâce de Dieu, doivent contribuer à notre élévation spirituelle.
Alors, pourquoi montrerait-on presque uniquement de l’enthousiasme pour les seuls bienfaits de Dieu qui concernent le cheminement terrestre ? Il doit y en avoir tant d’autres ! Et pourquoi, par des témoignages se limitant à la manifestation de la bonté divine devant les nécessités de la vie courante matérielle, va-t-on provoquer l’engouement des chrétiens, et soulever leurs alléluias, voire leurs applaudissements, comme cela devient la regrettable coutume ? Ne voyons-nous pas que, par de tels témoignages, nous faisons du tort au peuple de Dieu ? Nous ramenons, en effet, toute sa pensée vers une forme de christianisme déviée ; nous lui inculquons l’idée d’une vie chrétienne où l’essentiel consiste à recevoir constamment de Dieu le dénouement de nos difficultés matérielles et la bonne marche de nos petites affaires. Ce n’est pas cela le christianisme fidèle. Nous comptons en toute chose sur la grâce de Dieu, alors que « PREMIÈREMENT, NOUS CHERCHONS LA JUSTICE ET LE ROYAUME ». Le sage et véritable équilibre de la pensée chrétienne et de ses aspirations apparaît dans le passage suivant : « Elle (la grâce de Dieu) nous enseigne à renoncer à l’impiété et aux convoitises mondaines, et à vivre dans le siècle présent, selon la sagesse, la justice et la piété, en attendant la bienheureuse espérance, et la manifestation de la gloire du grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ, qui s’est donné Lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de se faire un peuple qui lui appartienne, purifié par lui et zélé pour les bonnes œuvres. Il (Tite 2:12-14) Que rien, surtout, ne puisse détourner la pensée du peuple de l’Église, et sa recherche, des directives élevées qui lui sont si clairement données par l’Écriture ; soit, l’espérance de la gloire et le constant désir d’être trouvé en Christ, non avec une propre justice, mais revêtu de la justice qui s’obtient par la foi en Christ et qui vient de Dieu. Courons tous vers le but, pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus-Christ ; et n’en détournons personne en dirigeant un faisceau de lumière sur l’aspect uniquement temporel et matériel des effets de la bonté et de la fidélité de Dieu, au détriment de l’aspiration essentielle à la gloire éternelle.
L’apostasie ou les premières œuvres
L’apostasie est un mot redoutable, qu’on attribue volontiers au christianisme dégradé, celui qui ne retient plus les vérités fondamentales telles que la divinité de Jésus-Christ, sa résurrection corporelle, son retour en gloire effective, la nouvelle naissance pour le salut…, etc.; mais l’on ne penserait jamais à se demander si elle ne commencerait pas à percer dans les milieux évangéliques. Nous nous en déclarons indemnes d’office, car, affirmons-nous, nous avons gardé la foi en toute la parole de Dieu. C’est ce qu’il faudrait peut-être regarder de plus près. Assurément, ce mal a des degrés, et c’est par degrés qu’il s’installe dans l’Église.
Que signifie ce terme ? Nous ne le trouvons dans la Bible qu’une seule fois, en Il Thess. 2:3, en rapport avec l’apparition, la présence, la venue, la parousie de l’homme du péché, le fils de la perdition. Cependant, le trouble qu’il représente apparaît plus d’une fois dans les Écritures. En effet, au dire du Nouveau Testament, bien des gens ont apporté avec eux le vent de l’apostasie ; ils étaient : de faux apôtres, des ouvriers trompeurs déguisés en apôtres de Christ (II Cor. 11:3) ; des faux frères qui s’étaient furtivement introduits au milieu des chrétiens de la Galatie (Gal. 2:4) ; des “chiens”, des « mauvais ouvriers », des « faux circoncis » (Phil. 3:2), des ennemis de la croix de Christ (Phil. 3:18), des faux docteurs qui introduisaient des sectes pernicieuses, et faisaient que la voie de la vérité était calomniée à cause d’eux (II Pierre 2:1-2), des faux prophètes, des antéchrists (1 Jean 2:18- 19)…, etc.
Jésus-Christ a lui-même dénoncé des situations d’apostasie dans les Églises d’Asie mineure ; notamment la doctrine de Balaam, ou celle des Nicolaïtes (Apoc. 2:14-15), la séduction exercée par la femme Jézabel qui se dit prophétesse (Apoc. 2:20), enfin, la situation qui régnait dans l’Église de Laodicée (Apoc. 3:14-18). Jésus-Christ n’a pas rejeté ces Églises, mais Il les a sommées de se repentir sans attendre.
D’après le dictionnaire, l’apostasie est le contraire de la conversion. Elle n’est pas l’abandon du christianisme, mais celui de la vraie foi chrétienne. Elle commence à se caractériser lorsque l’Église néglige, abandonne certaines doctrines, ou refuse de mettre en pratique tel ou tel point particulier de l’enseignement biblique, ou bien qu’elle éloigne son action d’une entière fidélité à la parole de Dieu, ou encore, lorsqu’elle s’aventure dans un partage avec le monde, jusqu’à collaborer avec lui et lui emprunter ses moyens publicitaires. Une tendance humaine néfaste a toujours poussé l’Église à s’efforcer d’écarter d’elle l’opprobre de Christ (alors que Moïse le regardait comme une richesse – Héb. 11 :26), puis, la persécution plus ou moins rude, plus ou moins larvée selon les lieux et les moments (Jean 15:20-21). Cette tendance conduit également l’Église à tenter de se faire accepter par la société qui, plus encore aujourd’hui, est imprégnée d’humanisme athée, et qui, tenue par le prince de ce monde, ressent toujours de l’allergie à l’égard de l’Évangile, sachant bien que celui-ci menace son hédonisme (morale qui fait du plaisir le but de la vie). Le Christ est venu dans le monde y apporter un « SIGNE QUI PROVOQUERA LA CONTRADICTION » (Luc 2:34) ; un signe, c’est-à-dire une puissance surnaturelle de vérité qui ne sera jamais comprise par entendement naturel, ni admise, ni supportée par le monde ; si bien que celui-ci réagira en repoussant le Christ et sa parole, en Le persécutant, Lui et Son Église ; cela, jusqu’à la consommation des siècles. « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » La contradiction ne cesse au niveau de l’individu que lorsque l’Esprit-Saint a triomphé des résistances du cœur humain, l’amenant à la repentance et au salut. Que l’Église sache qu’elle sort de sa voie en cherchant à courtiser le monde, à l’amadouer, à se concilier ses bonnes grâces. D’abord, elle n’y réussira jamais en demeurant intègre ; de plus, en s’efforçant d’y parvenir, elle flétrira sa véritable image, elle se dégradera, elle perdra sa dignité et sa ‘force. Sur la terre, les chrétiens évangéliques auront à connaître une situation critique, et pour le moins désagréable à vue humaine, alors qu’ils ont dès à présent tant de magnifiques compensations et consolations ; cependant, l’opprobre de Christ leur rappellera constamment leur mission de témoins de Jésus ; et celle-ci leur procurera, s’ils l’honorent avec la puissance de l’Esprit-Saint, les joies de l’amour dans l’œuvre de ramener des âmes humaines à la vie. En second lieu, quelle consolation n’ont-ils pas dans les encouragements de leur Seigneur : « HEUREUX SEREZ-VOUS, LORSQU’ON VOUS OUTRAGERA, QU’ON VOUS PERSÉCUTERA ET QU’ON DIRA FAUSSEMENT DE VOUS TOUTE SORTE DE MAL, À CAUSE DE MOI. RÉJOUISSEZ-VOUS ET SOYEZ DANS L’ALLÉGRESSE PARCE QUE VOTRE RÉCOMPENSE SERA GRANDE DANS LES CIEUX, CAR C’EST AINSI QU’ON A PERSÉCUTÉ LES PROPHÈTES QUI ONT ÉTÉ AVANT VOUS. » (Mat. 5:11-12)
À l’Église d’Éphèse, le Seigneur adresse un terrible reproche : « MAIS CE QUE J’AI CONTRE TOI, C’EST QUE TU AS ABANDONNÉ TON PREMIER AMOUR » (Apo. 2:4) ; et le rétablissement de cet amour délaissé nécessite le conseil suivant : « SOUVIENS – TOI D’OÙ TU ES TOMBÉ, REPENS-TOI, ET PRATIQUE TES PREMIÈRES ŒUVRES… » (verset 5). Étant donné son objet, cette injonction de Jésus-Christ peut être généralisée, car tout éloignement d’une réelle fidélité à la parole de Dieu et à son esprit n’est pas autre chose qu’un abandon du PREMIER AMOUR. En entrant dans la vie nouvelle, chacun avait fortement à cœur de vivre toute la parole de Dieu ; et c’est par la suite que des variations sont apparues. Remarquons la netteté du terme employé par le Seigneur : «… tu es tombé » ; c’est une chute, une déchéance qu’Il constate. Son désir impérieux est un retour à l’accomplissement des « PREMIÈRES ŒUVRES ». Car, les œuvres de maintenant, celles que voit le Seigneur, sont des œuvres secondes, des œuvres qui ne reflètent plus le premier amour, qui ne portent plus le fruit qui demeure, qui ne glorifient plus Dieu ! Ces œuvres-là, Jésus ne les aime pas. Les premières œuvres, accomplies sous l’empire du premier amour, étaient celles de l’Église naissante. Elles étaient empreintes de consécration et de zèle, et s’accomplissaient de par la crainte de Dieu, dans la joie et la simplicité de cœur. Dans le cœur de chacun, la parole était une, et personne n’eût songé à en discuter le moindre mot, ou à l’interpréter selon son adaptation au temps actuel, aux changements survenus dans la pensée ou les vues du moment, aux exigences de la culture moderne. L’Évangile était donné pour être vécu ; il fallait le vivre avec zèle, tel était l’amour ; et l’on savait, et l’on pouvait le vivre. La parole de Dieu est éternelle, et l’adapter, c’est l’altérer.
Conclusion
L’Église reste en vérité « LE CORPS DE CHRIST » ou elle cesse d’être elle-même. Elle s’attache à toute la parole de Dieu, dans l’esprit même où son Maître l’a conduite et où l’Esprit de vérité veut encore la conduire, et ne s’en départit pas. Nous servons dans un esprit nouveau. La lettre de l’Écriture importe, mais sa portée spirituelle appelle tout autant notre fidélité que la lettre en premier lieu. Et cette portée spirituelle nous a été enseignée par le Seigneur lui-même, particulièrement dans le chapitre 5 de Matthieu « Mais moi, je vous dis… » Prenons garde aux sollicitations néfastes qui nous entraîneraient hors de la vérité ; notre époque en est généreuse. Aucune d’elles ne peut passer au filtre de la parole de Dieu consciencieusement gardée. Nous désirons un Évangile déployant sa puissance comme aux débuts de l’Église ; alors, repentons-nous et revenons aux premières œuvres, celles de cette Église, et peut-être aussi à celles que nous avons connues sous l’empire du premier amour. Il y a une promesse qui, en ce temps de la fin, nous concerne particulièrement, la voici : « Parce que tu as gardé ma parole avec persévérance, moi aussi je te garderai à l’heure de l’épreuve qui va venir sur l’humanité entière, et mettre à l’épreuve les habitants de la terre. Je viens bientôt. Tiens ferme ce que tu as, pour que nul ne te prenne ta couronne. » (Apo. 3 : 10-11, TOB)
Robert MONPIOT[1]
[1] Robert Menpiot est pasteur des Assemblées de Dieu de France. Il n’est aucunement responsable du contenu des autres contributions à ce numéro.