Du sens véritable du repas du Seigneur

par | Résister et Construire - numéros 16-17

Le problème de la présence réelle

Nous voudrions tenter ici de clarifier les malentendus que pourraient susciter certaines affirmations simplificatrices, et même, pourrait-on dire, caricaturales, d’auteurs catholiques quant à la position réformée sur la Sainte-Cène. Il serait sans doute malheureux d’attribuer à la tradition catholique les bizarreries de toutes sortes exprimées par le modernisme, ou même de l’affubler des préjugés de Protestants ignorants. De même, il serait regrettable de trahir la véritable tradition réformée, et plus particulièrement celle des calvinistes confessants, en lui attribuant des doctrines qui sont, ou des préjugés catholiques mal renseignés, ou des curiosités théologiques avancées par divers milieux « protestants » rationalistes, libéraux, néo-orthodoxes (barthiens) ou même piétistes[1].

Prenons les affirmations du Père René-Marie, assez caractéristiques des critiques de catholiques traditionalistes à l’égard de la conception « protestante » de la Sainte-Cène :

« Pour le protestant, le Christ a institué seulement un repas… Pour le protestant, cette présence (du Christ dans l’Eucharistie) n’est que spirituelle dans l’esprit du croyant… Pour le protestant, la cène du Seigneur n’est qu’un mémorial et sa célébration ne dépasse pas l’envol d’une cérémonie de souvenir[2]. »

Examinons le problème.

Cet acte communautaire, institué par Jésus-Christ lui-même, n’est-il qu’un mémorial, qu’une communion fraternelle au travers d’un simple repas dont les éléments n’ont qu’une valeur symbolique ? Ou bien, selon l’institution des paroles du Christ lui-même, avec le pain et le vin de ce repas mangeons-nous véritablement son corps, buvons-nous véritablement son sang ? Participons-nous, en mangeant ce pain qui est son corps et en buvant le sang qui est son sang, à sa mort expiatoire pour nous à la croix, et ceci, comme nous le dit le texte de Paul dans la première épître aux Corinthiens, « jusqu’à ce qu’il vienne » ? À cette dernière question la réponse réformée et chrétienne ne peut être qu’un « oui » catégorique. Nous communions en toute vérité au corps et au sang du Seigneur Jésus-Christ par la Cène instituée par lui. Car ici ce qui est étonnant dans le fait de manger le pain et de boire le vin et, par ces éléments matériels, de communier au corps et du sang de notre Seigneur Jésus-Christ, c’est que cette communion n’est en aucune façon dépendante de la situation temporelle ou spatiale dans laquelle se trouve Jésus-Christ. La présence de Christ dans la Cène était réelle, lors de son institution, avant la mort du Seigneur. Son sens s’est parfaitement accompli lors de sa mort sur la croix au calvaire ; et elle demeure véritable maintenant que le Christ, ressuscité d’entre les morts, siège corporellement à la droite du Père dans les cieux. Nous voyons par là que notre communion à la réalité de la présence de notre Seigneur dans le pain et le vin de la Cène n’est aucunement affectée par la situation spatio-temporelle de Jésus-Christ, incarné, ressuscité ou glorifié. Tout ceci est lié à l’action du Saint-Esprit, à l’efficacité de la Parole divine instituant la la Cène, et à la foi du participant à ce saint repas. Car, comme nous le dit le Seigneur lui-même,

C’est l’Esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien. Les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie. Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas. (Jean 6:63-64)

Nous affirmons, avec Jésus-Christ, les paroles suivantes qui définissent la réalité de la Cène :

« Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang a la vie éternelle ; et je le ressusciterai au dernier jour. Car ma chair est vraiment une nourriture et mon sang vraiment un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. » (Jean 6:54-56)

Mais, comme le Christ lui-même l’affirmait dans le texte cité plus haut, ces paroles sont Esprit et vie. Par cela nous ne voulons pas dire que le pain et le vin de la Cène ne sont que des symboles figurant abstraitement le corps et le sang de Jésus-Christ. Car la nature du symbole est d’affirmer la séparation du signe de la réalité qu’il figure. Non, ici dans la Cène, le pain est le corps de Jésus-Christ, le vin est le sang de Jésus-Christ. Il y a dans la Cène, au moyen du pain et du vin, participation réelle, par la foi et l’action du Saint-Esprit, du croyant au sacrifice expiatoire unique et éternel du Fils de Dieu sur la croix du Calvaire hors des murs de Jérusalem, au temps où Caïphe était Grand Prêtre, Hérode Roi de Judée et Ponce Pilate Procurateur romain. Ce langage est celui d’un réalisme spirituel qui affirme un lien très fort entre le signe et la chose signifiée. La présence de Dieu est plus réelle encore que les réalités tangibles de sa création.

Ainsi, l’opposition entre ceux qui affirment la présence réelle du Christ dans la Cène, et ceux qui nient cette présence en faisant de la Cène un repas uniquement symbolique, n’est pas simplement une opposition entre « catholiques traditionalistes » et toutes sortes d’« hérétiques protestants ». L’opposition entre ceux qui tiennent pour la transcendance de Dieu dans la Cène, dans les Saintes Écritures et surtout dans l’Incarnation du Fils de Dieu et ceux qui nient explicitement ou implicitement cette transcendance, se trouve aussi bien à l’intérieure de l’Église catholique romaine que dans les Églises issues de la Réforme. Un tel désaccord existait déjà en partie au XVI siècle parmi les réformés eux-mêmes. Ainsi nous voyons Luther s’opposer à Zwingli, Calvin aux Anabaptistes. Ainsi sur le sujet de la présence réelle il existerait, à notre sens, un terrain de discussion possible entre catholiques traditionalistes et réformés confessants.

Mais les différences sont cependant bien réelles, elles aussi. Nous ne devons pas les négliger. Elles se situent tout particulièrement sur deux plans que j’évoquerai brièvement.

La transsubstantiation

Ce mystère a reçu un essai d’explication et a été en partie rationalisé quant à son opération, dans l’enseignement du Magister romain. En effet, depuis Thomas d’Aquin, une tentative d’explication de ce mystère a été formulée en adoptant les termes de la philosophie aristotélicienne. On abandonnait ainsi les catégories bibliques qui sont celles du véritable sens commun. Si nous ne devons jamais diviser ce que Dieu a uni, nous devons également nous garder avec soin de confondre ce qu’il distingue. La réalité de Dieu ne doit pas être confondue avec la réalité créée. Que dirions-nous de ceux qui chercheraient à dissocier les actions divines de Jésus-Christ homme, de ses actions humaines ? Ou encore, de ceux qui voudraient confondre sa nature humaine et sa nature divine ? C’est dans ce sens que la doctrine thomiste, l’enseignement du Magister romain concernant la transsubstantiation du pain et du vin de la Cène en la chair et en le sang physique, matériel, de Jésus-Christ est une confusion du spirituel et du naturel. Il s’agirait d’une espèce de transformisme spiritualiste avant la lettre. Mais Dieu respecte toujours la nature de ses créatures. Le dogme catholique romain de la transsubstantiation nie un des principes les plus fondamentaux de la théologie chrétienne, celui selon lequel la grâce n’abolit jamais la nature. Selon la doctrine de la transsubstantiation le pain et le vin sont en fait abolis pour faire place au corps et au sang de Jésus-Christ. Mais en réalité la présence réelle du Christ dans la Cène n’abolit aucunement le caractère naturel, créé, du pain et du vin.

Nous voici ici avec notre pauvre raison bien confondue. Nos sens et notre logique – donnés de Dieu – nous disent que ce que nous avons ici, c’est du pain et du vin. Jésus nous dit lui-même de cette coupe que c’est « le fruit de la vigne » (Matthieu 26:29). La Parole même de Dieu, Jésus-Christ, affirme que nous devons prendre ce repas « en mémoire » de lui. Mais, en même temps, il nous dit le plus explicitement : « ceci est mon corps… ceci est mon sang… répandu pour beaucoup d’hommes, pour la rémission des péchés. » (Matthieu 26 : 26-29). Paul est tout aussi affirmatif lorsqu’il cite les paroles mêmes du Seigneur.

Ceci est mon corps, qui est donné pour vous ; faites ceci en mémoire de moi. (I Corinthiens 11.23-25)

Comment alors sortir d’une pareille contradiction, d’une telle impasse logique ? Allons-nous, comme le fait la doctrine romaine, porter toute notre attention sur la matérialisation sensible du corps de Christ et affirmer que l’hostie est le corps même de notre Seigneur, à présent à nouveau immolé par le prêtre sur l’autel ? Ou allons-nous, comme les protestants rationalistes tout symboliser, tout spiritualiser, dissocier ce que Dieu a uni, le signe et la chose signifiée et dire que dans la Cène nous commémorons uniquement le souvenir de la mort de notre Seigneur ? Mais ces positions contradictoires ne seraient-elles pas toutes deux fausses puisqu’elles simplifient les données bibliques en choisissant parmi les textes ceux qui confortent leurs positions ? Un tel choix ne serait-il pas la marque même de l’hérésie ? Voyons Luther s’opposer à Zwingli. Car l’hérésie est toujours un choix entre les données de l’Écriture. Et si la réponse de l’Écriture serait de refuser à la fois, la solution du fond matérialiste romain (l’influence d’Aristote), et la solution spiritualiste protestante, (l’influence du nominalisme et de l’idéalisme) ?

Ne nous trouvons-nous pas ici aussi devant le mystère de l’Incarnation ? Le fait que le Fils de Dieu soit devenu homme ne change rien au fait qu’il soit, en même temps, toujours pleinement Dieu. Le fait que Jésus de Nazareth est Dieu Lui-même, la deuxième Personne de la Sainte Trinité, ne change rien non plus au fait qu’il était sur terre et est maintenant, au ciel et pour toujours, pleinement homme, hormis le péché. Le chrétien n’est-il pas à la fois citoyen de sa nation terrestre et citoyen des cieux, assis en Christ dans les lieux célestes et bel et bien marchant sur cette terre ? La Bible elle-même n’est-elle pas, elle aussi, pleinement la Parole infaillible, parfaite de Dieu, et aussi entièrement parole humaine, celle d’un pays, d’une époque, d’un homme avec son accent, avec les marques si distinctives du temps et du lieu ?

Pour le repas du Seigneur n’en serait-il pas de même ? Sur le plan terrestre, sur le plan de nos sens humains, de notre vue, de notre goût, de la logique qui est la marque de l’Image de Dieu en nous, nous nous trouvons devant du pain et du vin qui restent sur ce plan terrestre, pain et vin. Mais en même temps, sur cet autre plan, le plan céleste, le plan de Dieu, celui de la foi qui est celui de l’Esprit-Saint, ne mangeons-nous pas véritablement le corps de Christ, ne buvons-nous pas véritablement le sang de Christ, ne participons-nous pas réellement à sa mort sur la croix, jusqu’à ce qu’il vienne ? L’erreur du matérialisme romain est d’oublier que ce qui est de l’Esprit, du Saint-Esprit, est beaucoup plus réel que ce qui est de la création. L’erreur du rationalisme protestant est d’oublier l’Incarnation, le lien bien réel que le Père, au-travers de l’Incarnation de son Fils et par l’action du Saint-Esprit, à établi une fois pour toutes entre le Ciel et la terre pour tous ceux qui mettent leur confiance en Jésus-Christ.

Ainsi ce qui est de la création est une figure réelle de ce qui est dans les cieux. Le signe – le pain et le vin, et la réalité signifiée – le corps et le sang de notre Seigneur, dans la Cène et par l’action même de l’Esprit de Dieu, ne font qu’un. Nous sommes ici devant une des manifestations merveilleuses de la réalité de l’Incarnation, de ce lien que la grâce de Dieu établit entre les chose visibles et invisibles par la personne et l’œuvre du Seigneur Jésus-Christ. C’est le Saint-Esprit qui nous applique tout ce que Jésus-Christ a accompli et rend ainsi, pour celui qui croit au Fils de Dieu, le ciel proche de la terre. C’est là le Règne de Dieu venu sur la terre comme au ciel.

La confusion romaine entre ministère et prêtrise

Dans la doctrine du Magister romain concernant le clergé s’est, depuis longtemps, établie une confusion fondamentale entre les ministères et la prêtrise. Dans l’ancienne alliance les Lévites seuls avaient droit à la prêtrise. Dans la nouvelle alliance notre prêtre unique est Jésus-Christ. En lui et par lui a été accompli, une fois pour toutes, le sacrifice définitif pour nos péchés. En s’établissant eux-mêmes sacrificateurs de la nouvelle alliance, en prétendant offrir à nouveau à Dieu, chaque fois qu’ils célèbrent la messe, le sacrifice non sanglant du Fils de Dieu, les prêtres se substituent à Jésus-Christ, prennent la place de Jésus-Christ, notre sacrificateur suprême qui s’est offert lui-même en sacrifice pour les pécheurs. Car, nous dit l’Écriture « Il exerce un sacrifice intransmissible » (Hébreux 7:24). L’Écriture Sainte, le Saint-Esprit, Dieu lui-même qui parle par elle, nous dit, sans doute possible, que Jésus-Christ ne peut être à nouveau sacrifié pour les péchés des hommes :

En effet, Christ n’est pas entré dans un sanctuaire fait de main d’homme, imitation du vrai sanctuaire, mais il est entré dans le ciel même, afin de comparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu. Et ce n’est pas pour s’offrir plusieurs fois lui-même, comme le souverain sacrificateur qui entre dans le lieu très saint chaque année, avec un autre sang que le sien ; autrement il aurait fallu qu’il souffrît plusieurs fois depuis le commencement du monde. Mais il a paru une seule fois, à la fin des âges, pour abolir le péché par un sacrifice. Et de même qu’il est réservé aux hommes de mourir une fois, après quoi vient le jugement, de même, le Christ s’est offert une seule fois, pour ôter les péchés de plusieurs ; et il apparaîtra une seconde fois, non plus pour ôter le péché, mais pour donner le salut à ceux qui l’attendent. (Hébreux 9:24-28)

Il est ainsi mort une fois pour toutes pour les péchés du monde. C’est pourquoi celui qui, ayant connu la grâce, se détourne volontairement de cette grâce (connue mais point reçue) pèche contre le Saint-Esprit et ne pourra jamais être sauvé. Car Christ ne peut mourir deux fois pour le péché. Ici se trouve le mystère de l’iniquité.

Car ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don céleste, qui ont eu part à l’Esprit-Saint, qui ont goûté la bonne parole de Dieu et les puissances du siècle à venir, il n’est pas possible, s’ils retombent, de les amener à une nouvelle repentance puisqu’ils crucifient de nouveau, pour leur part, le Fils de Dieu et l’exposent à l’ignominie. (Hébreux 6:4-6)

Ainsi, il est absolument impensable que Christ soit matériellement, même d’une façon non sanglante, offert en sacrifice pendant la célébration de la messe. C’est le caractère de l’Antéchrist de prendre la place de Jésus-Christ. C’est ce que font tous ceux qui prétendent offrir sur les autels de l’Église de Rome le sacrifice du Fils de Dieu.

Tous les croyants, membres du corps même de Jésus-Christ, participent à ses fonctions de prêtre, de roi et de prophète (I Pierre 2:5 et 9). Ainsi, en Christ, il n’y a effectivement plus ni homme ni femme, ni juif ni grec, et même, ni Lévite, ni simple Israélite (Galates 3:28 ; Colossiens 3:11). Tous sont un en Jésus-Christ qui est, Lui, Roi, Sacrificateur et Prophète. Ceci se place sur le plan céleste. Mais l’Église militante se trouve sur terre. À ce niveau les distinctions demeurent, les hommes ne sont pas des femmes, tous ne reçoivent pas la charge du ministère dans l’Église. Les ministères sont donnés pour l’édification du corps, principalement par la prédication de la Parole de Dieu, par la prière, par la communion fraternelle et par la célébration de la Cène et du Baptême. Mais les ministres ne sont pas des prêtres qui célébreraient toujours à nouveau le sacrifice du Christ comme si ce qui avait eu lieu à Golgotha n’avait pas accompli de manière définitive, comme s’il fallait prolonger la personne et l’œuvre de Jésus-Christ dans le clergé catholique.

Le véritable sacrifice perpétuel du corps de Christ

Mais il existe bien un ministère sacrificiel de tous les chrétiens. En se débarrassant si heureusement de la la messe beaucoup de protestants et d’évangéliques l’ont oublié. Voici comment l’apôtre Paul en parle :

Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps en sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui est votre culte raisonnable. (Romains 12:1)

Le corps de Christ, l’Église militante sur terre, s’offre elle-même continuellement à Dieu en offrande sainte, vivante et agréable à Dieu. Nous ne portons pas le poids du sacrifice du péché que seul Jésus-Christ a porté sur la croix, mais, comme le dit encore l’apôtre Paul,

Nous portons toujours dans notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans notre corps. Car nous qui vivons, nous sommes sans cesse livrés à la mort à cause de Jésus, afin que la vie de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle ; de telle sorte que la mort agit en nous, et la vie en vous. (II Corinthiens 4:10‑12)

Cette réalité du creuset de la souffrance ici-bas, par laquelle notre foi est éprouvée comme l’est l’or ou l’argent par le feu du fondeur, ne peut être esquivée :

C’est par beaucoup de tribulations qu’il nous faut entrer dans le Royaume de Dieu (Actes 14:22)

nous dit encore Paul. Et ailleurs, il ajoute :

Tous ceux qui veulent vivre pieusement en Jésus-Christ seront persécutés. (II Timothée 3:12)

Mais innombrables sont les astuces de ceux qui se réclament du nom de « chrétiens » pour éviter ces sacrifices, pour éviter la réalité de cette souffrance inévitable à une communion réelle avec Jésus-Christ.

  • Une des raisons d’être de la messe est de projeter sur le rite la souffrance que le chrétien devrait assumer dans sa marche de disciple du Christ.
  • Beaucoup de protestants, d’évangéliques et de calvinistes, pour éviter cette souffrance, ne veulent voir d’autre sacrifice que celui effectué une fois pour toutes à Golgotha. Ils ne veulent pas participer aux souffrances de leur maître : ils ne partageront pas non plus sa gloire (Romains 8:17).
  • C’est, entre autres, pour transporter les souffrances du chrétien hors de ce monde que le purgatoire a été inventé.
  • C’est pour esquiver cette réalité par trop douloureuse de la souffrance chrétienne que des évangéliques ont fabriqué la doctrine erronée et fort commode d’une tribulation qui frapperait le monde uniquement après l’enlèvement de l’Église.
  • La religion du succès, du bien-être, de la paix intérieure, de la guérison automatiquement acquise pour tous, de la délivrance immédiate, de la prospérité et la religion de l’illuminisme charismatique sous toutes ses formes, veut à tout prix passer à côté de cette école de la souffrance qui est l’école de Jésus-Christ et de ses disciples.

Ma prière est que nous prenions un tout autre chemin. Celui sur lequel nous sommes appelés est un chemin de souffrance, car nous ne sommes pas plus grands que notre Seigneur. Si nous sommes à lui, nous partagerons son sort : s’il a été persécuté, nous le serons aussi. Il nous invite à porter chaque jour notre croix et à le suivre, car son fardeau est léger et son joug doux. C’est en portant cette croix fidèlement chaque jour de notre vie, c’est en comptant sur sa seule grâce dans toutes nos épreuves, que se fera en nous ce travail de sanctification sans lequel nul ne verra Dieu. Mais les souffrances d’ici-bas, peines et difficultés que le Seigneur nous a promises, et qu’il porte avec nous, ne sont rien en comparaison des bienfaits à venir. Répétons-le encore avec l’apôtre Paul,

J’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire à venir qui sera révélée pour nous. (Romains 8:17)

Jean-Marc Berthoud

[1]      Jean CALVIN : Petit traité de la Sainte Cène, Les Bergers et les Mages, Paris 1959 (1541). Jean CALVIN : Institution de la Religion chrétienne, Labor et Fides, Genève, 1958, Tome IV, p.347-412. Jean CADIER : La doctrine calviniste de la Sainte Cène, Études théologiques et religieuses, Montpellier, 1951. Pierre COURTHIAL : Commentaire de la Confession de la Rochelle, Éditions Kerygma, Aix-en-Provence, 1979. Georges BAVAUD : Le réformateur Pierre Viret. Ch. XXIII : Le sacrement de la cène, Labor et Fides, Genève, 1986, p. 271-282.

[2]      R.P. René-Marie : Théologie de la Messe, Una Voce Helvetica, No. 3, mars 1982, p. 10.