Par la foi contemplant Jésus-Christ attaché

Sur le bois de sa croix en moi je désespère,

Voyant le Fils, unique et bien-aimé, du Père

À tant de maux réduit pour mon vilain péché.

Connaissant, d’autre part, que je suis arraché

Des pattes de Satan et de la grand’ misère

De l’enfer ténébreux par la mort de mon frère,

Alors de tout chagrin je me sens dépêché[1].

O l’échange excellent ! Christ, prenant ma nature,

A chargé sur son dos de mes péchés l’ordure,

Et de ses plus grands biens, je me suis revêtu.

En descendant au monde, il fait qu’au ciel je monte,

Sa mort fait que la mort et péché surmonte,

Qu’enfer et Satan gît, sous moi mort, abattu.

Simon Goulart (1543-1628)

Ce sonnet est repris de l’ouvrage d’Albert-Marie Schmidt : Études sur le XVIᵉ siècle, Albin Michel, Paris 1967, p. 70-71. Il| se trouve dans le recueil collectif : Poèmes chrétiens de Bernard de Montméja et autres divers auteurs, Genève, 1574

[1]      Jeux de mots entre dépécher : débarrasser, délivrer et dé-pécher : enlever le péché.