Ce numéro de Résister et Construire que vous venez de lire a traité d’une erreur tragique qui est en train de détruire les fondements chrétiens de la plupart des églises évangéliques de notre région. Cette erreur s’attaque même, par voie de transmission évangélique, aux Églises officielles normalement en butte à d’autres déviations spirituelles et doctrinales. Récemment un pasteur d’une Église réformée baptiste de la région de Bath en Angleterre nous disait que son Église était la seule à des kilomètres à la ronde à ne pas avoir cédée au phénomène. Il s’agit, vous l’avez bien compris de ce qu’on appelle la bénédiction de Toronto ou la fièvre rieuse. On ferait mieux de pleurer sur ce désastre spirituel, sur cette malédiction divine. Car il devient de plus en plus clair pour de nombreux chrétiens qui ne se sont pas laissés hypnotisés, envoûtés, mesmérisés ou charmés par ces effusions trompeuses, que les Églises qui sont devenues réceptives à de telles expériences extatiques manifestent par là qu’ils font l’objet des jugements punitifs de Dieu (Ésaïe 28-29). À ce sujet certains textes du Nouveau Testament sont particulièrement claires. Sous la plume de Paul nous lisons ces mots d’une effrayante actualité :
L’avènement de l’impie se produira par la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges mensongers, et avec toutes les séductions de l’injustice pour ceux qui périssent, parce qu’ils n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés. Aussi Dieu leur envoie une puissance d’égarement, pour qu’ils croient au mensonge, afin que soient jugés ceux qui n’ont pas cru à la vérité, mais qui ont pris plaisir à l’injustice. (2 Thessaloniciens 2:9-12)
Mais notre réflexion historique et théologique nous pousse un pas plus loin. Dans le numéro 11-12 (mai-août 1990) de Résister et Construire nous avions consacré une étude substantielle sur le thème, Les racines évangéliques du Pentecôtisme, dans lequel, preuves à l’appui, il était démontré que le phénomène pentecôtiste, né au début du siècle, n’était pas sorti du néant mais qu’il était le fruit inévitable d’une évolution spirituelle et doctrinale malsaine qui avait affecté de larges pans du mouvement évangélique. Nous constatons que ce développement malsain ne s’est guère arrêté depuis, bien au contraire.
Tant la réalité que l’Écriture nous enseigne qu’il ne faut pas nous attendre à voir de mauvais arbres produire de bons fruits. Ainsi il nous faut constater que la Malédiction de Toronto est le fruit du mouvement des Signes et des Prodiges (Vineyard et Wimber !) ; que celui-ci, à son tour, nous vient du Mouvement Charismatique ; que ce dernier est issu du Pentecôtisme ; que pour sa part, comme nous l’avons jadis démontré, le Pentecôtisme est un fruit de certaines tendances des Mouvements de Sainteté du XIXᵉ siècle (une sainteté trop souvent opposée à la Loi de Dieu) ; et que ces mouvements, à leur tour, sortaient du Méthodisme Arminien. Il s’ensuit que l’arbre spirituel qui aurait produit un tel fruit ne saurait être bon. Ainsi ce n’est pas simplement le phénomène de Toronto qui est ici en cause mais toute une tradition spirituelle de plus en plus centrée sur l’expérience de l’homme, expérience toujours plus coupée de ses fondements chrétiens en Dieu et dans sa Parole. C’est cette tradition qui a produit comme fruit honteux de les aberrations que nous constatons aujourd’hui. Car les expériences torontistes, si vantées par ceux qui s’y livrent, déshonorent Dieu et, bien souvent poussent les hommes qui s’y abandonnent à des comportements qu’on oserait à peine, par respect pour les animaux, à décrire comme bestial. De telles aberrations doivent être rejetées par tous ceux qui se confessent chrétien et qui cherchent par leur foi et leur obéissance à la Parole de Dieu à honorer Jésus-Christ. Plus encore, une pareille hérésie doit être condamnée avec la plus grande vigueur par toute Église qui cherche à confesser fidèlement, en paroles et en actes, la vérité de Dieu. Un arbre produisant de tels fruits montre par là qu’il est pourri jusqu’à la racine. Il ne peut que s’attendre au jugement de Dieu, à être arraché, jeté au feu et brûlé. C’est ce que le Dieu des armées accomplit à travers la Malédiction de Toronto.
Nombreux sont ceux qui ont vu dans le mouvement pentecôtiste (et dans ses suites) les signes d’un réveil qui aurait pu renouveler une Église abâtardie par l’esprit du monde dans un siècle où l’Homme avec tout l’orgueil de la chair, des yeux et de la vie, se dressait contre Dieu, contre le Fils de Dieu et contre la Parole infaillible de Dieu. Mais une réflexion de longue haleine, sobre et attentive, tant aux données de l’a Bible qu’aux faits de l’histoire ecclésiastique moderne, ne peut plus nous laisser le moindre doute. Ce mouvement spirituel n’est aucunement ce réveil et cette source de bénédiction attendus avec une si vive impatience. Bien au contraire ! Il s’agit d’une puissante séduction spirituelle particulièrement contagieuse et d’envergure mondiale. L’ampleur et sa nuisance spirituelle de cette hérésie invitent tout naturellement la comparaison avec l’apostasie arienne du quatrième siècle qui, comme un raz de marée irrésistible, emporta pour un temps presque toute l’Église de cette époque. Seuls Athanase d’Alexandrie (c.296-373) et Hilaire de Poitiers (c.315-367), de tous les évêques chargés de veiller sur le troupeau de Dieu, gardèrent pure et intacte la confession de la foi. Avec Arius (c.250-336) l’attaque fut dirigée contre la Personne divine et humaine du Fils de Dieu, vrai homme et vrai Dieu. Aujourd’hui la cible visée n’est autre que la Personne divine du Saint-Esprit Lui-même. Sous prétexte de la mettre en vedette (aux dépens du Père et du Fils) on la triture, la manipule et la rend responsable des pensées et des actions humaines (et souvent démoniaques) les plus vils, les plus odieuses.
Car, comme nous l’avons vu dans les pages qui précèdent, la spiritualité dont se prévalent les partisans du torontisme ressemble bien étrangement à celle pratiquée par les adeptes des spiritualités orientales. Pour prendre un seul exemple (mais bien ciblé !) nous pouvons constater que le fameux parler en langues pentecôtiste, (pratique qui n’a rigoureusement rien à voir avec le parler en langues étrangères du livre des Actes), ressemble étrangement à la pratique bouddhiste du mantra. Il s’agit en effet de la répétition sans fin d’une formule de prière sans signification dont l’effet est de vider l’intelligence de toute pensée et de provoquer par ce moyen un renouveau psychique artificiel qui ressemble fort à celui que produit l’usage des drogues. Bien qu’il nous soit impossible de nier la présence de véritables chrétiens (séduits, bafoués et trompés) au sein de ces divers mouvements, et que l’Esprit de Dieu agit partout où la Parole est prêchée, il nous faut pourtant affirmer avec la dernière énergie que cette tradition d’erreur doit être rejetée tout entière comme étant au plus haut point nuisible à toute foi chrétienne véritable. Il s’agit en fait d’une perversion du christianisme, d’une immense erreur et, peut-être, de la plus grande séduction introduite dans ce monde par l’ennemi de nos âmes et de l’Église pour faire disparaître, si une telle chose était possible, le Royaume de Dieu de cette terre.
Non seulement ce phénomène effrayant représente manifestement un jugement de Dieu sur une Église infidèle, mais les moyens utilisés par un Dieu jaloux de sa gloire pour exécuter ses jugements sont aptes à nous faire dresser les cheveux sur la tête. Car Dieu a clairement lâché sur ces Églises des puissances démoniaques d’une force peu commune afin de les détruire. Et dans une invasion aussi flagrante de pratiques occultes dans la maison du Dieu vivant (qu’est l’Église visible) il est impossible de voir autre chose qu’un nouvel accomplissement de la prophétie mainte fois réalisée dans le passé qui nous avertit que l’abomination de la désolation siégerait un jour dans le Temple de Dieu. Cette fois l’abomination n’est plus matérielle mais spirituelle. En prétendant donner aux chrétiens une expérience spirituelle d’origine divine le Diable a en effet pénétré lui-même à l’intérieur d’innombrables Églises. Ainsi l’épidémie actuelle de fièvre rieuse et tombante ne peut aucunement être dissociée de ses racines pentecôtistes et charismatiques. Tant la racine que le fruit sont en contradiction totale avec l’orthodoxie de la foi chrétienne historique.
Car comme pour toute forme de théologie et de philosophie rationaliste, la question essentielle demeure ici celle du subjectivisme humain (intellectuel ou émotionnel) qui se dresse avec orgueil contre l’autorité normative absolue des Saintes Écritures sur les pensées, les sentiments et les actions des hommes. C’est sur ce terrain précis que doit se livrer la bataille actuelle. Et comme lors de la tentation du Christ au désert, nous ne doutons pas que la Parole de Dieu sortira victorieuse de ce combat.
Ne ferme pas d’un sceau les paroles de la prophétie de ce livre ! Car le temps est proche. Que celui qui est souillé se souille encore, que le juste pratique encore la justice, et que celui qui est saint soit encore sanctifié ! Voici : je viens bientôt, et j’apporte avec moi ma rétribution pour rendre à chacun selon son œuvre. Je suis l’Alpha et l’Oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin. Heureux ceux qui lavent leurs robes, afin d’avoir droit à l’arbre de vie, et d’entrer par les portes dans la ville ! – Dehors les chiens, les magiciens, les débauchés, les meurtriers, les idolâtres et quiconque aime et pratique le mensonge ! Moi, Jésus j’ai envoyé mon ange pour vous attester ces choses dans les Églises, Je suis le rejeton et la postérité de David, l’étoile brillante du matin. […] Amen ! Viens, Seigneur Jésus ! (Apocalypse 22:10-16, 20)
Jean-Marc Berthoud