Donnes-moi je te prie pour guide et conseillère
Cette sagesse assise en ton trône royal,
Et ne dédaigne point pour serviteur loyal,
Moi, ton petit garçon, fils de ta chambrière.
Car tu n’ignores pas comme je suis débile [faible],
Homme de courte vie, et de peu de pouvoir,
Mal entendu en lois, en pratique et savoir,
Pour régir comme il faut cette barque civile.
Et quand bien j’en aurais parfaite expérience,
Et qu’en tous arts exquis je serais consommé,
Ou pour autre valeur fameux et renommé,
Que me sert tout cela si je n’ai sapience [sagesse] ?
Donne donc pour secours ta sagesse profonde,
Qui connaît ton projet et fait ce que tu veux ;
Car elle détrempait le bourbier limoneux,
Quand tu arrondissais la boule de ce monde.
Les pensers des humains entre cent mille orages,
Ne font que chanceler vagabonds et flottants,
Et le vent qui conduit leurs desseins inconstants,
N’a rien de plus certain que les songes volages.
Qui pourrait deviner ce que ton vueil [vouloir] propose
Sinon que par sagesse il lui soit octroyé,
Et si ton Saint-Esprit de la-haut envoyée
Ne lève le bandeau de sa lumière close.
C’est la vive clarté qui notre cours (chemin) adresse,
Qui en tes droits sentiers va nos pieds conduisant,
Et nous montre à te faire un service plaisant.
Bref, pour avoir salut, il faut avoir sagesse,
Pierre Poupo
La Sapience de Salomon. In, La muse chrétienne de Pierre Poupo, 1585, p. 62.