Nous nous devons de faire remarquer à nos lecteurs le caractère très particulier de l’œcuménisme pratiqué par les communautés chrétiennes, catholique romaine, protestantes et orthodoxes confondues, qui tombent d’accord pour refuser l’attitude de foi de l’Église chrétienne de tous les temps en l’inerrance et l’infaillibilité divines de la Révélation écrite de Dieu, la Bible. L’accord qui vient d’être conclut entre catholiques romains et certaines églises réformés luthériennes sur la question de la justification par la foi en est un exemple éloquent.

Comment par ailleurs prétendre faire se rejoindre les positions catholiques romaines et luthériennes face à la doctrine de la justification par la foi seule lorsqu’on constate que la doctrine et la pratique qui servirent de détonateurs à la première protestation publique de Luther, la vente des indulgences destinées à racheter les peines des catholiques romains enfermés dans le purgatoire (pour un temps susceptible d’être raccourci), vient d’être solennellement réaffirmée par le pape Jean-Paul II lui-même. Il est évident que la pratique de la vente des indulgences ainsi que la doctrine des peines du purgatoire, s’ajoutant comme elles le font à l’œuvre de la croix, ne peuvent d’aucune façon être réconciliées à la doctrine de la justification parfaite du chrétien par l’unique grâce de Dieu et cela au moyen de sa seule foi en l’œuvre entièrement accomplie de Jésus-Christ.

Sur le plan du véritable débat théologique actuel, un tel accord, qui au premier abord peut paraître heureux, est totalement dépourvu de sens. Car ceux qui y ont souscrit, tant du côté de Rome que de celui des dénominations luthériennes, sont sans exception des modernistes ou des libéraux qui acceptent sans réserves le credo exégétique de la sacro-sainte méthode historico-critique d’exégèse. Pour de tels théologiens, la sainte Écriture n’est aucunement inspirée de Dieu, elle n’est pas infaillible, elle ne constitue pas un livre uni et cohérent, livre ayant en fin de compte un seul auteur, Dieu, et, en conséquence, elle ne saurait avoir de valeur universellement normative pour tous les chrétiens. Ces théologiens catholiques romains et luthériens, étant d’accord sur l’essentiel, c’est-à-dire sur la non-fiabilité de l’Écriture sainte, peuvent en conséquence également tomber d’accord sur bien d’autres questions – telle celle de la justification par la foi – sans qu’un tel accord porte réellement à conséquence, car il n’a pas de rapport véritable avec la seule norme de foi, la sainte Écriture et, en conséquence, avec les réalités divines. Ayant dans leur esprit coupé le rapport organique, intrinsèquement insécable, entre la doctrine sacrée et l’Écriture sainte, on ne peut que se trouver enferré dans une épistémologie nominaliste.

On peut alors, dans une telle perspective, faire dire aux mots exactement ce que l’on veut, sans que ce que l’on dise ait le moindre rapport véritable avec les réalités spirituelles dont on prétend parler. Et ce que l’on pourra alors dire n’aura en conséquence aucune espèce d’importance théologique véritable. Luther (repris plus récemment par Francis Schaeffer) le disait fort bien : Si l’on combat contre toutes les erreurs du moment SAUF contre celle qui représente aujourd’hui le danger mortel pour l’Église, on n’aura en fait combattu contre rien du tout. En ce moment de l’histoire du salut, ce qui aurait été significatif pour l’Église de Dieu aurait été un accord entre catholiques romains et réformés luthériens pour condamner avec la dernière rigueur l’hérésie mortelle de la méthode historico-critique d’exégèse biblique. Car cette hérésie, se dressant contre la réalité, l’identité et la fiabilité de ce qui, au sens le plus strict du terme, EST la Parole même de Dieu, se dresse de ce fait même, avec tout l’orgueil de l’homme déchu et révolté, contre l’Auteur de la sainte Écriture, Dieu lui-même.

Rédaction