[…] Après 1900 années de dispersion les Juifs ont changé leurs coutumes, souvent aussi leur aspect physique. Ils ont, en outre perdu la caste sacerdotale indispensable à leur État théocratique et ont perdu la trame même de la Bible ; nombreux – comme nous l’avons déjà dit – ont également perdu la foi. Ce qui les tient ensemble avec beaucoup de force semble être surtout leur esprit messianique : l’attente constante d’un messie Rédempteur après qu’ils aient repoussé le Messie Jésus. Cette attente présente, même chez ceux qui sont devenus athées, a pris chez certains une connotation terriblement antichrétienne. Ainsi chez Marx qui a désigné le prolétariat comme rédempteur et chez Freud qui a fait consister la rédemption de l’homme dans la libération de sa sexualité. Accueillis par des multitudes, les théories du premier ont conduit à des massacres terrifiants et celles du second à une perversion sans précédent des mœurs à l’époque moderne. Nous ne savons pas si dans l’avenir il y aura encore de terribles épisodes analogues, nous ne savons pas davantage quel long itinéraire le peuple juif devra parcourir pour parvenir à la conversion sont parle saint Paul : la grande conversion en attente de laquelle ont été jusqu’à ce jour leurs pères.

Nous nous trouvons devant une terrible partie en cours entre ce peuple et le Dieu de l’Ancien Testament : le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Partie dans laquelle nous n’avons aucune possibilité réelle d’intervenir.

Eugenio Corti

L’Homme Nouveau, dimanche 16 novembre 2003.

Auteur entre autres ouvrages :

  • Le cheval rouge (roman épique), L’Âge d’Homme, 1997
  • La plupart ne reviendront pas (Chronique du front russe, hiver 1942-1943), L’Âge d’Homme-De Fallois, 2003.